Aujourd'hui, l'EFSA (Autorité européenne de la sécurité des aliments) a rendu un avis scientifique sur la définition des critères d'identification des perturbateurs endocriniens pour éclairer le législateur européen quant aux dangers potentiels de ces substances. Au niveau français, la stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens, a démarré avec une première réunion du groupe de travail créé à cet effet. En juin 2013, il présentera au conseil des ministres un rapport au conseil des ministres sur le sujet. Cette stratégie devra permettre de diminuer les impacts sanitaires et environnementaux des perturbateurs endocriniens. Ces derniers sont donc au coeur de l'actualité de la sécurité alimentaire.

Ils peuvent avoir une origine naturelle comme artificielle. Ils ont été identifiés, notamment, dans les matériaux en contact avec les denrées alimentaires. Volatiles, certains sont capables de migrer dans les aliments devenant ainsi un risque pour la sécurité alimentaire. L'exemple le plus connu est certainement le bisphénol A (BPA) qui fait l'objet de mesures de suspension de commercialisation de plus en plus étendues. Celui-ci est largement présent dans l'industrie agroalimentaire. Il est utilisé, notamment, pour tapisser des emballages et jusqu'à récemment en France dans les biberons. C'est pourquoi, le législateur a voulu restreindre son utilisation.

Que sont finalement ces perturbateurs endocriniens qui migrent dans nos denrées alimentaires et comment la législation limite leur quantité présente dans notre alimentation ?

Les perturbateurs endocriniens sont des molécules chimiques capables de modifier les systèmes hormonaux, ce qui engendre des dommages au corps humain. En effet, les hormones sont essentielles pour le corps humain. Produites par les glandes endocriniennes, elles servent de messagers aux différents organes du corps afin de réguler notamment le taux de glucose ou la reproduction. Or, d'après la communication de l'Union Européenne de 1999 (COM/99/0706 final), les perturbateurs endocriniens peuvent agir de trois façons :
« - en imitant l'action d'hormones naturelles telles que les œstrogènes ou la testostérone et donc en déclenchant des réactions chimiques similaires dans l'organisme;
- en bloquant les récepteurs des cellules recevant les hormones (récepteurs des hormones), empêchant ainsi l'action des hormones normales ; ou
- en agissant sur la synthèse, le transport, le métabolisme et l'excrétion des hormones, modifiant ainsi les concentrations d'hormones naturelles. »
S'agissant du BPA, il est principalement suspecté d'imiter l'action des œstrogènes. Il présente alors un danger particulièrement important lors de la grossesse et pour les jeunes enfants, en ayant un impact sur le développement des organes génitaux mâles. Le 27 septembre 2011, l'ANSEM (aujourd'hui dénommée : agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail soit l'ANSSET) a publié deux rapports analysant les risques sanitaires du Bisphénol A (BPA). En somme, le rapport conclue que les études disponibles concernant les effets du BPA sur la santé humaine sont généralement insuffisantes pour conclure sur les dangers qu'il représente. En revanche, les études chez l'animal, notamment la souris, ont démontré que ce perturbateur endocrinien affecte le bon fonctionnement du système reproducteur féminin comme masculin, mais aussi le développement cérébral en cas d'exposition au BPA pré ou périnatale. Ainsi, les recherches quant aux effets chez l'être humain doivent être continuées, puisqu'un risque d'un danger est manifeste en raison des résultats des études effectuées sur les animaux. Pour anticiper les risques potentiels, le législateur est intervenu par application du principe de précaution.

La loi du 24 décembre 2012 n° 2012-1442 a modifié la loi du 30 juin 2010 n°2010-779 relative à la suspension de la fabrication, l'importation, l'exportation et la mise sur le marché de biberons à base BPA, pour restreindre l'utilisation du BPA plus largement. Plusieurs mesures ont été prises.

La loi n° 2012-1442 du 24 décembre 2012 a interdit le BPA dans les contenants destinés à des enfants de moins de trois ans, ce qui concerne, entre autres, tous les biberons à compter de janvier 2013. Dès le 1er janvier 2015, l'interdiction sera généralisée à tout conditionnement qui est directement en contact avec les denrées alimentaires. Avant le 1er juillet 2014, le gouvernement doit fournir un rapport indiquant les substituts possibles au BPA qui sont moins toxiques pour la santé humaine. De plus, un avertissement déconseillant l'usage pour les personnes sensibles telles que les femmes enceintes ou les jeunes enfants, devra être indiqué sur les objets à base de BPA destinés à être en contact avec les denrées alimentaires. Enfin, les agents mentionnés à l'article L 215-1 du code de la consommation sont désormais habilités à sanctionner les infractions relatives à la loi du 30 juin 2010 précitées dans sa version consolidée.

Ces mesures prises à l'encontre du BPA s'inscrivent dans un contexte plus général de vigilance à l'encontre des composants des matériaux en contact avec les denrées alimentaires prévu par le règlement (CE) n° 1935 du 27 octobre 2004 concernant les matériaux et objets destinés à entrer des denrées alimentaires et abrogeant les directives 80/590/CEE et 89/109/CEE.

Le règlement 1935/2004 s'applique à tout objet ou matériau destiné à être en contact avec des aliments, qu'il s'agit des emballages, conditionnements, mais également, entre autres, des ustensiles de cuisine ou la vaisselle. Contrairement à la précédente directive, cela concerne également les matériaux dits actifs et ceux dit intelligents. Il s'agit des matériaux utilisés pour interagir avec les aliments. Ils peuvent servir à prolonger leur durée de conservation ou à améliorer leur qualité. Par contre, les matériaux d'enrobage, les matériaux et objets fournis en tant qu’antiquités et les installations de distribution de l'eau sont exclus du champ d'application puisqu'ils reçoivent l'application d'une législation particulière.
Le Règlement prévoit en premier lieu le principe d'inertie. Les matériaux, à l'exception de ceux intelligents/actifs, en contact avec les aliments ne doivent pas migrer dans ces derniers dans une proportion pouvant présenter un danger pour la santé humaine, modifier de manière inacceptable la composition des denrées ou d'altérer le goût, l'apparence, la texture de celles-ci.
En outre, le règlement donne pouvoir aux États membres de prendre des mesures de sauvegarde lorsqu'il s'avère que l'emploi d'un matériau ou d'une substance alors même qu'il est conforme au règlement 1935/2004, présente un danger pour la santé humaine. Sur ce fondement, le 24 mars 2010, le Danemark avait interdit provisoirement l'utilisation du BPA dans la fabrication des objets destinés à être en contact avec des aliments pour les moins de trois ans. En juillet 2010, la France a également demander la suspension et a produit des études sur les dangers du BPA. Sous cette impulsion à l'encontre du BPA, l'Union Européenne a élaboré la directive 2011/7 visant à interdire l'utilisation du bisphénol A dans la fabrication des biberons en plastique des nourrissons pour tous les États membres.

Ainsi, l'Union Européenne ou l'un de ses États Membres a la possibilité de restreindre l'utilisation de toute substance utilisée dans la fabrication de matériaux en contact avec les aliments sur son territoire dès lors qu'il démontre que son emploi entraîne potentiellement un danger pour la santé humaine. Ces restrictions peuvent se faire, même lorsque que la substance a été antérieurement autorisée. Or, de plus en plus de recherches visent à identifier des perturbateurs endocriniens, notamment avec le rapport qui sera publié en juin 2013. Ces mesures prises par les autorités permettront de favoriser l'innovation dans la recherche de nouvelles substances en remplacement de ces perturbateurs endocriniens, moins nocives pour l'être humain.