Le 29 octobre 2012, le Conseil européen a adopté une directive modifiant les dispositions de la directive européenne 1999/32/CE concernant la teneur en soufre des combustibles marins. La mise en place de directives portant sur les combustibles marins a pour objectif majeur la protection de la santé humaine et de l'environnement. En effet, les substances nuisibles émises par les navires ont pour conséquence non seulement la pollution de l'air, sous la forme d'émissions de dioxyde de soufre et de particules, mais elles contribuent également à son acidification. La directive du 29 octobre vise donc à réduire de manière significative ces émissions de dioxyde de soufre.


I- L'HISTORIQUE DE LA POLITIQUE COMMUNAUTAIRE VISANT LA REDUCTION DES EMISSIONS DE DIOXYDE DE SOUFRE

En 1948, la Conférence internationale de Genève met en place l'Organisation Maritime Internationale (OMI), initialement connue sous le nom d'Organisation maritime consultative intergouvernementale. Cette institution spécialisée des Nations Unies a pour objectifs principaux la mise en place d'une collaboration entre les Etats membres pour la réglementation maritime, l'adoption de normes de sécurité et la prévention des pollutions du milieu marin par les navires et installations portuaires.

Le 12 mai 1954, la Convention internationale pour la prévention de la pollution de la mer par les hydrocarbures, dite Convention OILPOL, est adoptée. Elle fut le premier texte à traiter de l'environnement marin. A défaut de force contraignante réellement établie, la Convention a mis en place les prémisses d'une protection de l'environnement marin, notamment en évaluant les risques et dommages causés par la pollution maritime par les hydrocarbures. Cette Convention a entrainé une prise de conscience de la nécessité d'une réglementation plus rigoureuse en la matière.

La Convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires 73/78 du 2 novembre 1973, dite Convention MARPOL, est venue remplacée la Convention OILPOL. Cette Convention a été élaborée dans le cadre de l'Organisation Maritime Internationale et complétée par le protocole de 1978. Elle compte aujourd'hui 136 Etats membres dont la France. La Convention définit pour la première fois la notion de substance nuisible : il s'agit de "toute substance dont l'introduction dans la mer est susceptible de mettre en danger la santé de l'homme, de nuire aux ressources biologiques, à la faune et à la flore marines, de porter atteinte à l'agrément des sites ou de gêner toute autre utilisation légitime de la mer, et notamment toute substance soumise à un contrôle en vertu de la présente Convention". L'objectif de cette Convention est de mettre en place un cadre général de lutte contre les substances nuisibles émises par "tous les navires autorisés à battre le pavillon d'un Etat membre ou exploité par celui ci". Les directives européennes suivantes vont permettre d'identifier ces substances nuisibles et de participer à la réduction de celles-ci afin de protéger la santé humaine et les milieux marins.

La réduction des émissions de dioxyde de soufre est entrée dans les objectifs du 5e programme d'action en matière d'environnement. A cette fin, le 26 avril 1999 est adoptée la directive 1999/32/CE, concernant une réduction de la teneur en soufre de certains combustibles liquides, modifiant la directive 1993/12/CEE du 23 mars 1993 portant sur le même objet. La directive indique notamment dans son article 11 la nécessité de mettre en place une action de réduction des émissions de dioxyde de soufre au niveau communautaire, estimant que la mise en place d'un tel plan d'action au niveau national entrainerait un dysfonctionnement de la politique visant la réduction de ces émissions et pourrait être contreproductive. La directive du 29 octobre 2012 vient compléter les deux directives précédentes.


II- LES MODIFICATIONS APPORTEES PAR LA DIRECTIVE DU 29 OCTOBRE 2012

Le Conseil européen a choisi d'adopter une directive durcissant les normes d'émission de soufre des navires marchands. Selon un communiqué de Bruxelles, elle vise à réduire les émissions de dioxyde de soufre et à assurer la protection de la santé humaine et de l'environnement en rendant contraignantes au sein de l'Union Européenne les règles les plus récentes de l'Organisation Maritime Internationale en matière de normes pour les combustibles marins. Cette perspective juridique impose donc la modification de la directive 1999/32/CE.

La directive reprend notamment l'annexe VI de la Convention de MARPOL, adoptée en 1997 par la Conférence des Parties à la Convention. Celle-ci fixe la teneur maximale en soufre des combustibles marins utilisés dans les Zones de Contrôle des Emissions de dioxyde de soufre (ZCES) à 1% jusqu'au 31 décembre 2014 et à 0,1% à partir du 1er janvier 2015. Les ZCES couvrent, au sein de l'Union Européenne, la Mer Baltique, la Manche et la Mer du Nord.
Les normes de l'OMI ayant vocation à devenir contraignantes, celle fixant à 0,5% la teneur maximale en soufre en dehors de ZCES le deviendra dans les eaux de l'Union Européenne à compter de 2020.
Il existe également une norme générale, reprise par la directive, interdisant l'utilisation de combustibles marins dont la teneur en soufre excède 3,5% en masse sur le territoire des Etats membres. Cependant, une exception est faite pour les "navires équipés de dispositifs alternatifs d'épuration des gaz d'échappement fonctionnant en circuit fermé".

La directive enjoint aux Etats membres de mettre en place des aides afin de faire face aux coûts d'investissement supportés par les opérateurs de transport maritime pour se conformer à ses exigences. En effet, ces actions étatiques auront pour objectif de lutter contre les incidences de ces coûts sur la compétitivité du secteur et d'empêcher une prévalence du transport terrestre sur le transport maritime. Les Etats auront la charge de les mettre en place conformément aux règles applicables en matière d'aides publiques dès lors que ces mesures sont jugées compatibles avec la directive.

Dans un communiqué, Bruxelles a indiqué que les Etats membres devront fixer des pénalités "devant être au moins équivalentes aux avantages tirés des violations des dispositions de la directive". La directive 1999/32/CE ainsi que la Convention MARPOL prévoyaient également que les Etats membres devaient déterminer les sanctions relatives à la violation de leurs dispositions. On constate qu'une évolution majeure est intervenue entre la Convention OILPOL, à l'époque dépourvue de force contraignante, et la directive adoptée le 29 octobre 2012 enjoignant aux Etats membres d'assortir de pénalités chaque disposition nationale conforme de la directive. Les dispositions portant sur la réduction des émissions de dioxyde de soufre disposent désormais d'une force contraignante.

La directive entrera en vigueur le vingtième jour suivant sa publication au Journal Officiel de l'Union Européenne (JOUE). Les Etats membres disposeront alors d'un délai de 18 mois à compter de l'entrée en vigueur de la directive pour adopter les dispositions nationales requises et conformes à celle-ci.