
La responsabilité spéciale relative aux dommages consécutifs à l'exploitation minière
Par Marine BATTEZ
Juriste en Droit des Affaires et Environnement
STORENGY-GDF SUEZ
Posté le: 17/09/2012 15:14
En cas de dommages, l'exploitant, ou, à défaut, le titulaire du titre minier est responsable des dommages causés par son activité. Particulièrement stricte, la loi institue à l'égard de l'exploitant minier une responsabilité objective qu'il est particulièrement intéressant d'analyser.
1. LA RESPONSABILITE OBJECTIVE DE L'EXPLOITANT MINIER
L’article L.155-3 du nouveau code minier, issu de la loi ° 99-245 du 30 mars 1999 relative à la responsabilité en matière de dommages consécutifs à l'exploitation minière et à la prévention des risques miniers après la fin de l'exploitation, institue un régime de responsabilité de plein droit à l’égard de l’exploitant minier pour les dommages liés à son activité. Ce régime est particulièrement lourd pour l’exploitant qui ne peut s’exonérer de sa responsabilité en prouvant qu’il n’a pas commis de faute et particulièrement avantageux pour la victime qui n’a pas à démontrer la faute de l’exploitant. La loi prévoit cependant que l’exploitant peut s’exonérer de sa responsabilité en apportant la preuve d’une cause étrangère.
La deuxième chambre civile de la cour de cassation, dans un arrêt du 23 novembre 1988, a ainsi considéré que la présomption de responsabilité ainsi instauré n’était pas écartée même en l’absence de toute faute dans la réalisation des travaux à condition que les dommages subis proviennent directement des travaux miniers correspondant (Rapport d’Arnaud Gossement « Droit minier et Droit de l’environnement »). La victime doit donc uniquement apporter la preuve de son dommage en lien avec l’exploitation minière.
1.1 Les débiteurs de la responsabilité objective
Sont au terme de la loi responsables, l'explorateur, l'exploitant ou, à défaut, le titulaire du titre minier. On entend généralement par exploitant la personne qui a obtenu et exploite en vertu d’un titre minier valable. Il est important de ne pas confondre l’exploitant avec le propriétaire de la surface qui ne forme pas nécessairement une seule et unique personne. « L'institution d'une concession crée un droit immobilier distinct de la propriété de la surface et investit l'exploitant d'un statut légal fait de droits et d'obligations spécifiques » (« La responsabilité de l’exploitant pour dommages consécutifs à l’exploitation minière », La semaine juridique entreprise et affaires n°39, 28 septembre 2000, Bruno WERTENSCHLAG). Autrement dit, en pratique, c'est le titulaire du titre minier, et plus généralement le concessionnaire, qui encourra cette responsabilité objective. Cet exploitant au sens général du terme est visé par la loi comme « le titulaire du titre minier ».
Il est à noter que la notion d’ « exploitant », telle que visée par la loi, ne renvoie pas à cette définition générale mais à celle qui prévalait avant la loi du 15 juillet 1994. La loi vise ainsi par la notion d’exploitants, ceux dont les permis en cours de validité sont soumis aux dispositions en vigueur lors de leur attribution. Enfin, l’explorateur est la personne qui entreprend des travaux de recherches de gisements miniers. Il peut s’agir alors du propriétaire de la surface, d'un tiers autorisé par l'Administration ou bien encore du titulaire d'un permis exclusif de recherches.
1.2 Un champ d’application vaste
Le champ d’application de la responsabilité objective instituée par le code minier est relativement large puisque la responsabilité n'est limitée ni au périmètre du titre minier ni à sa durée de validité. Dès lors que le fait générateur d'un sinistre est lié à l'activité minière de l'exploitant, la responsabilité de ce dernier sera établie à raison de dommages, même apparus hors du périmètre de la mine, à la condition toutefois qu'il soit clairement établi un lien de causalité entre le fait générateur et le dommage. En ce qui concerne sa durée de validité, la deuxième chambre civile de la cour de cassation, dans l’arrêt du 23 novembre 1988, a accueilli une action en recherche de responsabilité civile de l’exploitant et ce plusieurs années après la fermeture de la mine. Toutefois, il est important de noter que cette responsabilité n’est pas pour autant illimitée. En effet, à défaut de prescription spéciale plus courte, la prescription de l’action en responsabilité de droit commun trouve à s’appliquer.
Concernant les dommages subis, le champ d’application de la loi demeure relativement vaste. En effet, sont visés de manière générale les dommages causés par l'activité de l'exploitant. Tous les dommages sont par conséquent indemnisables sur ce fondement qu’ils soient corporels ou incorporels. Toutefois, le code minier limite l’indemnisation des dommages immobiliers qui consiste en une remise en état de l’immeuble sinistré. Lorsque cette réparation est impossible en raison de l’ampleur des dégâts subis par l'immeuble, l’indemnité versée au propriétaire doit lui permettre de recouvrer dans les meilleurs délais la propriété d'un immeuble de consistance et de confort équivalents.
2. LA GARANTIE DE l'ETAT EN CAS DE DEFAILLANCE DU RESPONSABLE
Le régime de responsabilité de plein droit institué par le code minier est particulièrement protecteur des victimes. En effet, la loi précise qu’en cas de disparition ou de défaillance du responsable, l'Etat est garant de la réparation des dommages causés par son activité minière. Il est alors subrogé dans les droits de la victime à l'encontre du responsable. Autrement dit, il pourra exercer l'action personnelle qu'eût pu intenter cette victime à l'encontre de l'exploitant.
Le droit minier ne précise toutefois pas ce qu’il faut entendre par la notion de défaillance. Par analogie, en matière de remise en état de sites pollués, l’on considère que la défaillance est liée à l'insolvabilité du responsable telle qu’elle peut apparaître lorsque l’exploitant est en état de cessation des paiements. Cette solution trouve t-elle à s’appliquer également en droit minier ou doit-on admettre une conception plus large selon laquelle il reviendrait à considérer que l’exploitant est défaillant dès lors qu’au terme d’un délai de mise en demeure, celui-ci n’ait pas procéder à l’indemnisation ?
En conclusion, ce régime de responsabilité est strict à l’égard de l’exploitant et particulièrement avantageux pour la victime qui bénéficie d’un fondement de responsabilité objective au champ d’application relativement vaste.