Produits chimiques dangereux : le durcissement des règles tenant à l'exportation/importation
Par Sandrine EICHENLAUB
Juriste environnement
SNCF
sandrine.eichenlaub@hotmail.fr
Posté le: 13/09/2012 11:55
Par son adoption, ce nouveau règlement renforce les exigences posées par le règlement précédent 689/2008 du 17 juin 2008. Il permet par ailleurs d'aller aussi au-delà des prescriptions de la convention Rotterdam.
Afin d'analyser les apports de ce nouveau règlement, il convient d'examiner ce qui s'appliquait préalablement, que reprend en partie le règlement du 4 juillet 2012.
Intéressons-nous tout d'abord aux exigences de la convention de Rotterdam que réintègre le nouveau règlement.
Engagée par le Programme des Nations Unies pour l'Environnement et l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture, la convention de Rotterdam a pour but de favoriser le partage de responsabilités et la coopération entre les 165 pays signataires dans le domaine du commerce international de produits chimiques dangereux.
Le principe fondamental régissant cette convention est avant tout le consentement préalable en connaissance de cause entre les différentes parties (dite Procédure CIP) lors de l'importation/exportation de produits chimiques. Plus concrètement un produit chimique ne peut être exporté sans le consentement préalable de l'importateur. Afin que l'importateur prenne une décision en connaissance de cause, il doit aussi être en possession de toutes les informations détaillées relatives aux produits, ses propriétés, ses effets sur la santé humaine et l'environnement. De plus, une procédure dédiée à faire connaître les décisions des pays importateurs et à mettre en œuvre le principe du CIP a été établie.
Son application ne vise que les produits mentionnés à l'annexe III. Sont exclus de son champ d'application :
- les stupéfiants et les substances psychotropes
- les matières radioactives
- les déchets
- les produits pharmaceutiques
- les armes chimiques
- les produits alimentaires
- les aliments et additifs alimentaires
- les produits importés en petites quantités ne présentant pas de risques particuliers et importés aux fins de travaux de recherche ou d'analyse, ou servant à l'usage personnel d'un particulier
L'autre obligation posée par la convention est celle de la désignation d'une autorité nationale en charge de la mise en œuvre au niveau national. Un autre comité, le Comité d'étude des produits chimiques, est responsable quant à lui de l'analyse et de l'évaluation des produits.
Ce Comité peut, si une des parties adopte une réglementation particulière relative à un produit chimique/pesticide, après analyse, décider de recommander l'inscription d'un produit chimique aux dispositions de la convention.
Pour qu'une importation puisse être réalisée, le consentement de la partie est bien évidemment nécessaire, il peut être également soumis à certaines conditions.
A contrario, l'exportation est interdite si la partie importatrice n'a communiqué aucune réponse ou n'a transmis qu'une réponse provisoire.
Toute information supplémentaire concernant un produit, demandée par une partie importatrice, doit bien évidemment être transmise. Si un produit interdit par la convention est exporté, ce dernier devra être accompagné d'une notification d'exportation et la partie importatrice devra accuser réception dudit produit. Les produits exportés doivent dans cette hypothèse être étiquetés.
Le règlement précédant le règlement du 16 août 2012 allait déjà au-delà des dispositions de la convention de Rotterdam en ce qu'il s'appliquait également aux produits chimiques dangereux interdits ou fortement réglementés par la Communauté européenne ou par un Etat membre. Il assurait aussi largement la classification, l'étiquetage et l'emballage de l'ensemble des produits chimiques exportés.
En outre le règlement de 2008 ajoutait des délais et des obligations concernant la procédure de notification. Chaque année des notifications d'exportation devaient être présentées par l'exportateur exportant pour la première fois un produit chimique. La notification était présente aussi pour tous les produits interdits ou réglementés par la Communauté européenne et pour les articles en contenant. Un consentement explicite pour ces produits était présent alors même que ces produits ne figuraient pas à l'annexe III de la convention de Rotterdam. L'étiquetage et l'emballage devaient déjà être plus stricts. Enfin des conditions minimales quant à la durée de vie utile des produits et des conditions de stockage étaient respectées.
L'ensemble des dispositions posées étaient aussi applicables au pays tiers non partis à la convention de Rotterdam.
Certains produits chimiques dangereux devaient en outre être totalement fermés à toute exportation ou importation.
Enfin des rapports réguliers sur les quantités de produits chimiques/pesticides exportées étaient imposés aux Etats membres.
Le règlement 689/2008 paraissait déjà très exhaustif. Quels peuvent être alors les apports du nouveau règlement 649/2012 du 4 juillet 2012 ?
Le nouveau règlement tente avant tout de répondre à un premier écueil relatif à la procédure de consentement préalable. Un effet, la Commission européenne a pu constater que dans 30 % des cas, aucune réponse n'avait été obtenue du pays importateur.
Aussi la nouvelle réglementation tend à mieux prendre en considération les exigences et la terminologie des règlements REACH et CLP.
Ainsi parmi les nouvelles conditions du règlement 649/2012, il a été institué qu'en cas d'absence d'accord explicite du pays importateur dans un délai de 60 jours, l'exportation pourra bien avoir lieu si le produit chimique est enregistré ou autorisé dans le pays importateur.
S'il s'avère néanmoins que le produit n'est ni enregistré, ni autorisé dans le pays de destination, trois conditions cumulatives devront être remplies pour que l'exportation puisse avoir lieu:
- il doit être prouvé par une source officielle que le produit a été utilisé ou importé dans le pays de destination au cours des cinq dernières années
- aucune interdiction ou restriction ne doit être présente pour l'usage auquel le produit chimique est destiné
- le produit ne doit pas figurer sur une liste noire de la convention de Rotterdam ou sur une autre liste communautaire similaire
En tout état de cause, les produits classés CMR (cancrigène, mutagène, reprotoxique), PBT (persistant, bio-accumulable ou toxique) nécessitent un accord express.
La terminologie résultant des règlements REACH et CLP devra être reprise. Les exportations et importations issues de ce nouveau règlement devront se baser et se conformer aux dispositions des règlements REACH et CLP.
Enfin l'Agence européenne des produits chimiques devra transmettre les différentes notifications des industriels aux pays importateurs ne faisant pas partie de la Communauté européenne. Elle sera aussi en charge de toutes les communications connexes. Enfin cette agence sera en charge de conserver l'ensemble des notifications entre pays exportateurs et importateurs qui seront accessibles sur le site de l'Agence.
En espérant que ce nouveau règlement puisse être une source voire un modèle d'harmonisation international quant à l'exportation et à l'importation de produits chimiques dangereux. A terme, il conduira peut-être à la diffusion et à l'adoption mondiale des exigences des règlements REACH et CLP.