
Les apports du décret du 9 mai 2012 relatif à la déclaration publique d’intérêts
Par Augustin LABBE DE LA GENARDIERE
Posté le: 13/09/2012 11:22
Après un véritable déferlement médiatique ayant suspecté les autorités publiques de connivences malvenues avec les entreprises pharmaceutiques, une nouvelle approche était nécessaire afin de restaurer la confiance si ce n’est de l’opinion, au moins celle des médias concernant l’impartialité, la transparence et l’indépendance des pouvoirs publics à l’égard des laboratoires. C’est dans ce but que la loi du 29 décembre 2011 sur le renforcement de la sécurité sanitaire du médicament a prévu la mise en place d’un vaste dispositif de transparence tendant à la prévention des conflits d’intérêts. Des obligations nouvelles viennent s’imposées aux divers agents publics (membres des cabinets ministériels, agents des agences régionales de santé, de l'ANSM, de la HAS, etc.) ainsi qu‘aux experts mandatés par les autorités sanitaires. Pour les premiers, la loi leur impose dorénavant de rédiger une déclaration d’intérêts, les seconds se verront contraints au surplus de respecter une charte de l’expertise sanitaire toujours en cours d'élaboration. Il convient d’analyser les types d’instances soumises à cette obligation (I) ainsi que la procédure relative à cette mesure (II).
I/Instances soumises à l’obligation de déclaration
Les éventuels liens d’intérêts direct ou indirect que peut avoir un acteur public du domaine de la santé avec des entreprises doivent aujourd’hui faire l’objet d’une déclaration publique. Cette déclaration est régie par les dispositions l’article L.1451-1 du Code de santé publique créé par la loi du 29 décembre 2011, ainsi que celle du décret n° 2012-745 du 9 mai 2012 relatif à la déclaration publique d’intérêts et à la transparence en matière de santé publique et de sécurité sanitaire.
L’arrêté du 2 août 2012 donne la liste des instances dont les intervenants ont l’obligation de remplir une déclaration publique d’intérêts.
On y retrouve premièrement une liste des instances collégiales placées auprès des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale :
-Comité de pilotage de l'Observatoire national de la fin de vie
-Comité national de l'organisation sanitaire et sociale, section sanitaire
-Commission de suivi des programmes de prévention des infections associées aux soins en établissements de santé et en secteur des soins de ville
-Commission nationale d'agrément des établissements de formation en ostéopathie
-Commission nationale de l'internat et du post-internat
-Conseil national de l'urgence hospitalière
-Haut Conseil des professions paramédicales
-Conseil de l'hospitalisation
-Commission scientifique du Haut Conseil des professions paramédicales
-Comité de pilotage du programme national relatif à la nutrition et à la santé (2011-2015) et du plan « Obésité » (2010-2013)
-Comité de pilotage restreint et groupes de travail du comité national de suivi du plan pour préserver l'efficacité des antibiotiques
-Comité national de santé publique
-Comité national de suivi et de prospective du plan national de lutte contre les hépatites B et C
-Comité national des registres
-Comité spécialisé des registres de maladies rares
-Comité technique plomb
-Commission nationale d'agrément des associations représentant les usagers dans les instances hospitalières ou de santé publique
-Commission nationale de la naissance et de la santé de l'enfant
-Commission nationale de l'échographie obstétricale et fœtale
-Commission nationale des accidents médicaux
-Commission nationale des formations aux soins d'urgence en situation sanitaire normale et exceptionnelle et aux centres d'enseignement des soins d'urgence (CESU)
-Conseil de modération et de prévention (prévention de l'alcoolisme)
-Conseil national du syndrome immunodéficitaire acquis
-Groupe d'appui technique sur les pratiques non conventionnelles à visée thérapeutique
-Haut Conseil de la santé publique, ses commissions spécialisées, ses comités techniques permanents
-Comité scientifique du site « interventions précoces, soutien à la parentalité.
La liste ci-dessus concerne les instances rattachées à la Direction Générale de la Santé ainsi qu’à la direction générale de l'offre de soins. En complément de cette liste, le Comité économique des produits de santé, les Commissions scientifique indépendante des médecins, pharmaciens, sages-femmes et chirurgiens-dentistes et diverses instances de l'Organisme gestionnaire du développement professionnel continu sont eux aussi soumis à cette même obligation.
II/Procédure de déclaration
Par arrêté du 5 juillet 2012, un formulaire de déclaration type a été créé. Il reprend les dispositions de l'article R. 1451-2 du code de la santé publique relatives au contenu de la déclaration.
La déclaration mentionne les nom et prénom du déclarant, la qualité au titre de laquelle le déclarant est tenu d’établir la déclaration, le tiers éventuellement concerné par le lien d'intérêt et la mention de l’administration, de l'instance, de l’autorité, de l’établissement ou du groupement auprès duquel il exerce, son activité principale actuelle, rémunérée ou non ainsi bien évidemment que ses activités principales et accessoires, exercées au cours des cinq années précédentes dans des sociétés, établissements, organismes et associations en lien avec le domaine de la santé.
La mention des liens de parenté et les montants des sommes perçues ou des participations financières ne sont pas rendus publics comme l'indique le décret.
Ces déclarations doivent être établies et actualisées à l'initiative du déclarant par télédéclaration sur un site internet unique ou par la remise d’un formulaire conforme.
Elle est conservée cinq ans après la fin de l'exercice de la fonction ou de la mission.
En application de l’article L. 1452-3 du Code de santé publique les experts sont eux aussi contraints à la remise de déclaration publique sous peine de se voir interdire de participer à des travaux d’expertise. Ils se verront de plus soumis une charte de l'expertise sanitaire actuellement en cours d'élaboration.
Ce dispositif tend à prévenir de tout conflit d'intérêt pouvant avoir un impact quelconque sur l'impartialité du déclarant. L’article L. 1454-2 du code de la santé publique prévoit des mesures de sanctions à l'encontre des personnes physiques, est puni de 30 000 euros d'amende le fait d'omettre, sciemment, dans les conditions fixées par ce même article, d'établir ou de modifier une déclaration d'intérêts afin d'actualiser les données qui y figurent ou de fournir une information mensongère qui porte atteinte à la sincérité de la déclaration. Par cet article, et la relative sévérité de l’amende encourue, les autorités sanitaires se donnent les moyens d’adopter une meilleure transparence, ce qui permettra d’assurer leur indépendance et leur impartialité.