Deux ans après l'adoption du Plan Particule, où en est-on ?
Par Sandrine EICHENLAUB
Juriste environnement
SNCF
sandrine.eichenlaub@hotmail.fr
Posté le: 12/09/2012 16:56
Les origines d'une réglementation sur la qualité de l'air résultent d'une préoccupation croissante de la pollution de l'air et de ses effets.
La pollution de l'air peut bien évidemment être naturelle. Néanmoins, elle trouve aussi et surtout ses fondements dans l'activité humaine.
Pour exemple la combustion du fioul induit l'émanation de dioxyde de souffre (SO2), le trafic routier produit quant à lui des oxydes d'azote (NO2). Le brûlage du bois et la circulation automobile génèrent quant à eux la diffusion de particules en suspension (PM).
Une précision quant à la nature de ces particules doit être cependant posée puisqu'il existe deux catégories. On distingue ainsi les « particules grossières » appelées aussi « PM10 » dont la taille est inférieure à 10µm pénétrant facilement dans l'appareil respiratoire des « particules fines » dites « PM2,5 » inférieures ou égales à 2,5µm pouvant se loger dans les alvéoles respiratoires.
Quant à la provenance de ces nanoparticules, elles sont principalement d'origine domestique (34%) et résultent de la combustion. 31 % sont d'origine industrielle et sont issues de la transformation de l'énergie. 21 % proviennent de l'utilisation d'engrais dans le secteur agricole. Enfin 14 % sont issues des transports routiers et marins.
L'ensemble de ces particules présentent un danger certain. Elles auraient ainsi pour effet de favoriser les asthmes, les allergies, les cancers voire certaines maladies respiratoires ou cardio-vasculaires. Selon une étude de 2005 réalisée à l'échelle de 25 pays de l'Union européenne dans le cadre du programme Clean Air For Europe (CAFE), 42 000 décès par an seraient dus à la pollution de l'air par les particules PM2,5.
Une réaction de l'Union Européenne régissant ces particules s'avérait ainsi nécessaire. La directive du 21 mai 2008 a ainsi été adoptée. Elle ne prévoit pas de grands changements pour les particules PM10. La conservation des normes existantes est ainsi privilégiée. Ainsi les concentrations en PM10 ne devront pas dépasser 50µg/m3 sur 24h plus de 35 fois par an, la concentration moyenne restant fixée à 40µg/m3. Cependant la directive prévoit une possible dérogation de trois ans pour les zones et agglomérations ne parvenant pas à respecter les valeurs limite des PM10.
Ce texte s'attache essentiellement à la limitation des particules de diamètre inférieur à 2,5µm. Elle impose notamment aux Etats membres de réduire en 2020 de 20 % l'exposition aux particules par rapport aux chiffres de 2010. Outre cette exigence la directive impose aussi de rabaisser les niveaux d'exposition à 20µm/m3 d'ici 2015. Sur l'ensemble du territoire, un plafond de 25µg/m3 devra en toutes hypothèses être respecté d'ici à 2015, voire si possible en 2010.
L'ensemble de ces dispositions communautaires sont reprises à l'article 35 de la loi relative à la mise en œuvre du Grenelle 1 de l'environnement du 3 août 2009. L'article 32 de cette même loi pose quant à lui le principe « d'un plan de réduction des particules dans l'air ». Le plan particules est dès lors mis en place et doit « apporter des réponses pour la réduction de fond des émissions de particules dans l'air ». De plus, ce plan particules a pour objectif la réduction de 30 % des émissions de particules primaires PM2,5 d'ici 2015. Tous les secteurs sont ici concernés qu'il s'agisse de l'industrie ou du tertiaire, du secteur domestique, agricole ou même encore des transports.
Concernant les mesures instituées par le Plan Particules, il convient de procéder à une approche distinguant les mesures applicables à chaque secteur.
Dans le secteur domestique, le plan particules propose la mise en place d'un crédit d'impôt au développement durable 2010. Il s'agit d'aides accordées aux nouveaux appareils de chauffage au bois lesquels sont les plus performants en termes d'émission de particules et substituant un appareil ancien. Dans ce secteur, ce plan se traduit aussi par l'émission d'une circulaire adressée aux préfet et visant à mieux informer les maires sur les conditions et l'interdiction du brûlage à l'air libre. L'autre objectif est d'améliorer la communication publique sur le chauffage au bois sur les installations peu polluantes. La label flamme verte est d'ailleurs attribué lors du respect d'un certain nombre de performances environnementales intégrant aussi la réduction de poussières. Enfin l'ADEME se chargera d'orienter la recherche et l'innovation sur l'amélioration des performances des appareils de combustion quant à l'émission de poussières.
Concernant l'industrie et le résidentiel-tertiaire, il s'agit avant tout d'abaisser les valeurs limites d'émission des installations de combustions classées ICPE.
Pour les installations soumises à autorisation (supérieur à 20MWth), un arrêté ministériel a ainsi été adopté en juillet 2010 afin de renforcer les exigences quant aux valeurs limites d'émission des nouvelles installations. Un autre arrêté publié à la fin de l'année 2010 pose aussi de nouvelles exigences concernant les installations existantes.
Quant aux installations soumises à déclaration (puissance comprise entre 2 et 20 MWth) a modifié l'arrêté du 25 juillet 1997 portant des prescriptions générales. Il permet aussi de renforcer les exigences portant sur les valeurs limites d'émission.
A présent pour les installations non classées, ce plan devrait permettre la réalisation d'un contrôle périodique des émissions de particules pour les chaudières non classées.
Pour les installations utilisant de la biomasse, une étude particulière est portée sur les conditions requises quant à la limitation maximale des impacts sur la qualité de l'air et sur le rendement des installations des appels d'offres.
En matière agricole, le plan particule prévoit une adaptation du matériel d'épandage. Il impose aussi de tenir compte de la quantité et de la formulation des engrais afin de limiter les particules volatiles présentes lors de l'épandage. L'action se porte aussi sur la réduction des polluants résultant de l'emploi de tracteurs. Autre exigence : l'adaptation de l'alimentation aux besoins des animaux. Enfin a été prévu la couverture des fosses, ceci permettant de réduire fortement les émissions d'ammoniac.
Concernant le secteur des transports, il est prévu l'instauration d'une « éco-redevance » kilométrique pour les poids lourds. Autre mesure : l'instauration des Zones d'Actions Prioritaires pour l'Air (ZAPA) dans certaines agglomérations volontaires. Six agglomérations devraient tester les drastiques restrictions de la circulation parmi lesquelles Paris, la Plaine-Commune, Lyon, Grenoble , Aix-en-Provence et Bordeaux, des villes comme Nice ou Clermont-Ferrand s'étant retirées du dispositif. Ces communes devront déterminer des zones dans lesquelles les véhicules les plus polluants comme les voitures particulières, autobus, poids lourds, deux-roues immatriculés avant 2001 et émettant trop de particules fines et d'oxydes d’azote seront interdits.
Sur un plan plus local, les Plans de Protection de l'Atmosphère peuvent être établis pour les agglomérations de plus de 250 000 habitants et où des dépassements de normes sont à craindre. Dans un périmètre donné, ces plans ont pour mission de définir les mesures devant être prises, localement, secteur par secteur, afin de réduire les émanations de polluants. Ils sont soumis à enquête publique.
Parmi les résultats apportés par le Plan particule, on peut tout d'abord constater l'édification effective du label Flamme Verte pour les chaudières. Un étiquetage de performance environnementale a aussi été établi qui sera de plus en plus strict dans les années à venir. Une circulaire interministérielle du 18 novembre 2011 a quant à elle permis l'interdiction du brûlage à l'air libre des déchets verts.
Concernant le domaine des transports, des ZAPA ont été, comme nous avons déjà pu l'évoquer, mises en place. Une meilleure régulation de la mobilité a aussi pu être établie lors des pics de pollution. Enfin le Comité interministériel de la sécurité routière a permis l'instauration d'un contrôle technique obligatoire des deux-roues tous les deux ans à compter de leur deuxième année de mise en circulation afin de vérifier l'absence de tout débridage.
Le principal apport présent dans le secteur de l'industrie est l'amélioration des conditions d'appel d'offre pour les installations utilisant la biomasse. Une augmentation de la TGAP NOx a aussi pu être intégrée dans la loi de finances rectificative de 2010.
En matière agricole, la mesure visant à adapter l'alimentation animale aux besoins des animaux a été mise en œuvre. Des efforts ont déjà été réalisés permettant de limiter les émissions d'ammoniac dans la filières porcines majoritairement concernées par le phénomène.
Par ailleurs 33 Plans de Protection de l'Atmosphère sont actuellement en cours d'élaboration ou de révision couvrant un peu moins de la moitié de la population française.
Ainsi ce Plan particule a permis d'entreprendre les premières avancées concernant la réduction de l'émanation de particules. Cependant de nombreuses mesures restent encore à développer afin d'arriver à l'objectif de réduction des PM2,5 de 30 % d'ici 2015.