L'impact du décret et des arrêtés de mai 2012 sur les attestations de garanties financières des installations classées
Par Sandrine EICHENLAUB
Juriste environnement
SNCF
sandrine.eichenlaub@hotmail.fr
Posté le: 12/09/2012 8:06
La mise en activité de certaines installations classées est subordonnée à la constitution par l’exploitant de garanties financières « destinées à assurer, suivant la nature des dangers ou inconvénients de chaque catégorie d’installations, la surveillance du site et le maintien en sécurité de l’installation, les interventions éventuelles en cas d’accident avant ou après la fermeture et la remise en état après fermeture » (article L516-1 du Code de l’environnement). Grâce à cette exigence l’administration et la collectivité peuvent se prémunir de l’éventuelle insolvabilité de l’exploitant.
En substance, seules certaines catégories d’installations sont concernées par la constitution de garanties financières. Ces dernières sont principalement visées à l’article R516-1 du Code de l’environnement. Il s’agit avant tout d’exploitants d’installations qui font l’objet d’un suivi technique très approfondi de la part des services de l’administration.
Parmi ces installations, on peut tout d’abord recenser les installations de stockage des déchets pouvant engendrer des risques d’atteinte à la ressource en eau, mais aussi des nuisances olfactives. Une circulaire n°96-858 du 28 mai 1996 vise ici les exploitants de « toutes les décharges, dépôts, déposantes, centres d’enfouissement technique d’élimination de déchets par dépôt ou enfouissement dans le sol ou dans des cavités artificielles ou naturelles du sol suivi d’une couverture sans intention de reprise ultérieure ». Tous les déchets, quelque soit leur nature, sont concernés. L’installation peut être interne ou collective. L’exploitant peut être une personne physique ou morale.
Doivent aussi être pris en compte les carrières. Un arrêté ministériel du 9 février 2004 rappelle que « les installations concernées sont les activités soumises à la rubrique n°2510 de la nomenclature des installations classées, quelle que soit la date de mise en exploitation ». Etaient cependant exclues les carrières relevant du régime de la déclaration.
La dernière catégorie d’installations concernées était les installations relevant de la catégorie « S » de la nomenclature visées à l’article L515-8. Parmi elles, figurent :
- Les exploitants d’installations destinées à être implantées sur un site nouveau et susceptibles de créer, par danger d’explosion ou d’émanation de produits nocifs, des risques très importants pour la santé et la sécurité des populations voisines et pour l’environnement
- Les exploitants d’installations « S » nouvelles implantées sur un site existant et qui sont susceptibles de générer des risques supplémentaires
- Les exploitants d’installations « S » existantes qui font l’objet de modifications nécessitant la délivrance d’une nouvelle autorisation
La lecture attentive de ce texte permet d’exclure l’ensemble des exploitants dont les installations ont été mises en activité avant le 14 décembre 1995 à condition qu’ aucun « changement notable » n’ait été apporté aux installations depuis cette date.
Le récent décret du 3 mai 2012 relatif à l’obligation de constituer des garanties financières en vue de la mise en sécurité de certaines installations classées pour la protection de l’environnement ajoute à cette liste certaines installations soumises à autorisation ainsi que les installations de transit ou de traitement de déchets relevant des régimes de l’autorisation ou de l’enregistrement.
Il exempte par ailleurs de constitution de garanties financières les installations exploitées directement par l’Etat qu’il s’agisse de stockage ou de traitement de déchets, de carrières, d’installations Seveso, de stockage géologique de CO² ou d’installations IPPC.
Une autre dérogation à l’exigence de garanties financières est présente si leur montant se révèle inférieur au seuil de 75 000euros.
Deux arrêtés, parus au Journal officiel le 23 juin 2012, précisent les installations dont il est question. Sont à présent visées les installations relevant du régime de l’autorisation ainsi que les installations de transit, regroupement, tri ou traitement de déchets relevant du régime de l’enregistrement. En tout 51 rubriques de la nomenclature sont concernées. Toutes ces installations devront constituer des garanties financières dès le 1er juillet 2012.
Sont également concernées les installations soumises à autorisation relevant de la directive IPPC dont l’obligation de constitution de garanties financières démarre soit au 1er juillet 2012 si les installations vont au-delà du seuil IPPC, soit au 1er juillet 2017 pour les installations comprises entre le seuil de l’autorisation et le seuil IPPC.
Parmi les opérations couvertes par la mise en place de garanties financières figurant à l’article R516-2, sont visées pour les installations de stockage de déchets, la surveillance du site, les interventions en cas d’accident ou de pollution ainsi que la remise en état du site après exploitation.
S’agissant des carrières, elles ne concernent que la remise en état du site après exploitation. En présence d’installations de stockage de déchets inertes présentes dans le site de la carrière, les garanties couvrent aussi :
- « La surveillance des installations de stockage de déchets inertes et de terres non polluées résultant de l’exploitation de la carrière lorsqu’elles sont susceptibles de donner lieu à un accident majeur à la suite d’une défaillance ou d’une mauvaise exploitation, tel que l’effondrement d’une verse ou la rupture d’une digue »
- « L’intervention en cas d’effondrement de verses ou de rupture de digues constituées de déchets inertes et de terres non polluées résultant de l’industrie extractive lorsque les conséquences sont susceptibles de donner lieu à un accident majeur »
Les installations « S » sont garanties au titre de la surveillance et du maintien en sécurité de l’installation en cas d’évènement exceptionnel ainsi que des interventions en cas d’accident ou de pollutions.
Les sites de stockage géologique de dioxyde de carbone sont couverts au titre de la « mise en œuvre de mesures prévues par le plan de postfermeture incluant notamment la mise à l’arrêt définitif du site et sa surveillance pendant au moins trente ans après sa mise à l’arrêt définitif, les interventions en cas de fuite ou de fuites de dioxydes de carbone ou d’accident ou de pollution avant ou après la mise à l’arrêt définitif, la restitution en cas de fuites de quotas d’émissions de gaz à effet de serre ».
Enfin pour les installations soumises à autorisation sont couverts la mise en sécurité du site de l’installation et les mesures de gestion de la pollution des sols et des eaux souterraines.
La constitution de garanties financières devra avoir lieu au moment du dépôt du dossier de demande d’autorisation initiale et au moment de la mise en service des installations. Elles se présentent sous la forme d’une caution bancaire ou d’un engagement écrit d’une compagnie d’assurance. Les garanties financières peuvent aussi être couvertes par une société parente dès lors que celle-ci dispose d’une contre-garantie d’un établissement de crédit ou d’une société d’assurances. Il est possible enfin de recourir à un fonds de garantie privé ou à une consignation volontaire à la Caisse des Dépôts.
Toutefois lors d’un changement d’exploitant le nouvel exploitant devra constituer ses propres garanties financières.
Aussi de nouvelles garanties financières devront être prises en cas d’une modification substantielle impliquant le dépôt d’un nouveau dossier de demande d’autorisation soumis à enquête publique.
La constitution ou la révision des garanties financières peut être décidée par le préfet lors d’une modification substantielle des capacités techniques et financières de l’exploitant.
Quant aux modalités de calcul des garanties financières, l’arrêté du 31 mai 2012 prévoit la mise en place d’un mode de calcul forfaitaire, rappelé dans l’annexe 1 du texte, ou basée sur une méthode de calcul forfaitaire propre à la branche professionnelle devant être approuvée par le ministre de l’Ecologie. L’exploitant doit transmettre au préfet une proposition accompagnée des valeurs et des justifications techniques des différents paramètres ayant permis le calcul.
Toutefois les mesures déjà mises en œuvre dans le cadre du fonctionnement normal de l’installation participant à la mise en sécurité du site doivent être exclues du montant des garanties.
Ce même arrêté prévoit aussi la mise en place de garanties additionnelles en cas d’une pollution significative des sols ou des eaux lorsqu’elle celle-ci se produit après le 1er juillet 2012. Tous les cinq ans, l’exploitant devra présenter un état actualisé du montant des garanties financières. Il y rappelle aussi « toute modification des conditions d’exploitation conduisant à une modification du coût de mise en sécurité [impliquant] une révision du montant de référence des garanties financières ».
Devraient prochainement être publiés deux arrêtés complémentaires relatifs aux modalités de fonctionnement des fonds de garanties privés et touchant à la définition des mesures de gestion de la pollution des sols et des eaux souterraines.