
CE, 13/07/2006, Société minière et industrielle de Rouge et la responsabilité étendue du producteur de déchets
Par Pauline DESNOUS
Responsable regionale Prevention des risques
GDF Suez
Posté le: 08/09/2012 14:03
Dans cet arrêt, le Conseil d’Etat a jugé que le détenteur ou le producteur des déchets reste responsable de ceux-ci jusqu’à ce que leur élimination soit achevée. Le fait qu’il ait transféré par contrat à un tiers cette mission ne le décharge pas de cette responsabilité.
Le Conseil d’Etat n’avait statué jusqu’ici que dans des affaires où le producteur des déchets était exploitant d’une installation classée, en édictant que, dans le cas où des déchets pouvant se rattacher à l’exploitation de l’installation avaient été éliminés dans des conditions irrégulières, l’administration était fondée à rechercher la responsabilité de l’exploitant. Cette position, toujours confirmée depuis, découle du fait que «les dispositions du contrat de droit privé par lesquelles cet exploitant s’était déchargé sur un tiers moyennant une rémunération forfaitaire de la responsabilité du stockage des résidus de son exploitation ne sont pas opposables à l’administration » (CE, 24 mars 1978, société La Quinoléine).
L’arrêt du 13 juillet 2006 précité s’inscrit dans cette jurisprudence mais présente le grand intérêt d’avoir été prononcé dans le cadre de l’application de la législation des déchets et en particulier de l’article L. 541-3 du code de l’environnement : « Lorsque des déchets sont abandonnés, déposés ou gérés contrairement aux prescriptions du présent chapitre et des règlements pris pour leur application, l'autorité titulaire du pouvoir de police compétente avise le producteur ou détenteur de déchets des faits qui lui sont reprochés ainsi que des sanctions qu'il encourt et, après l'avoir informé de la possibilité de présenter ses observations, écrites ou orales, dans un délai d'un mois, le cas échéant assisté par un conseil ou représenté par un mandataire de son choix, peut le mettre en demeure d'effectuer les opérations nécessaires au respect de cette réglementation dans un délai déterminé ».
Le Conseil d’Etat a confirmé que « la seule circonstance que le détenteur ou le producteur de déchets a passé un contrat en vue d’assurer l’élimination de ces déchets ne l’exonère pas de ses obligations légales auxquelles il ne peut être regardé comme ayant satisfait qu’au terme de l’élimination des déchets». Cet arrêt a donc une portée générale: un producteur ou un détenteur de déchets, qu’il soit ou non exploitant d’une installation classée, n’est libéré de ses obligations que lorsque les déchets dont il est responsable ont été effectivement éliminés.
De ce fait, si des déchets ne sont pas traités, ou le sont de façon non conforme à la législation, l’administration est fondée à mettre à la charge de ce producteur ou détenteur l’élimination de ces déchets, quand bien même celui-ci se serait acquitté de la facture de leur élimination auprès du tiers avec qui il avait passé contrat. C’est le constat que les déchets n’ont pas été traités, ou ne l’ont pas été conformément à la législation, qui permet de mettre en cause la responsabilité du détenteur ou du producteur.
Par cet arrêt, on constate que la responsabilité du producteur de déchets est consolidée, malgré le fait que les déchets aient été confiés à un tiers de manière contractuelle. Le producteur conserve la responsabilité des déchets, même lors de leur transport ou de leur stockage par un tiers.