1) Le renforcement du rôle du syndicat de copropriétaires

Poursuivant sa recherche d’économies d’énergie dans le bâtiment existant, la loi du 12 Juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, s’est penchée sur le rôle central potentiellement jouable par les syndicats de copropriétaire dans le cadre d’une diminution globale de la consommation d’énergie au sein de l’immeuble concerné.

La loi n°65-557 du 10 Juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis prévoit que « la collectivité des copropriétaires est constituée en un syndicat qui a la personnalité civile » et que ce syndicat « a pour objet la conservation de l’immeuble et l’administration des parties communes ». Ses décisions sont prises en assemblée générale des copropriétaires « à la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents ou représentés » et mises en application par le syndic.

Si le syndicat de copropriétaires jouait initialement un rôle important dans la vie de l’immeuble notamment concernant les décisions de travaux à mener, la loi du 12 Juillet 2010 ne vient que l’accentuer par la création de l’article 24-4 au sein de la loi du 10 Juillet 1965 selon lequel « pour tout immeuble équipé d’une installation collective de chauffage ou de refroidissement, le syndic inscrit à l’ordre du jour de l’assemblée générale des copropriétaires qui suit l’établissement d’un diagnostic de performance énergétique […] la question d’un plan de travaux d’économies d’énergie ou d’un contrat de performance énergétique ». Toutefois, « avant de soumettre au vote de l’assemblée générale un projet de conclusion d’un tel contrat, le syndic procède à la mise en concurrence de plusieurs prestataires et recueille l’avis du conseil syndical ».

2) Le choix de procéder à des travaux d’amélioration de la performance énergétique

Dans la mesure où, en vertu de l’article L.134-4-1 du Code de la construction et de l’habitation, créé par la loi Grenelle 2, « un diagnostic de performance énergétique est réalisé pour les bâtiments équipés d’une installation collective de chauffage ou de refroidissement dans un délai de cinq ans à compter du 1er Janvier 2012 », l’ensemble des syndicats dont l’immeuble est soumis à l’article 24-4 de la loi du 10 Juillet 1965, sera dès lors dans l’obligation, par le jeu de l’article précité et de l’article 24-4 de la loi du 10 Juillet 1965, dans les cinq années à venir à décider ou non, lors d’une assemblée, d’entamer des travaux. Le rôle du syndic sera ici d’encourager à la réalisation effective de ces travaux en s’appuyant sur le diagnostic de performance énergétique réalisé, sur le technicien responsable de ce diagnostic et sur les avantages représentés par les propositions des prestataires mis en concurrence.

L’assemblée des copropriétaires dont fait partie le cas échéant le propriétaire du local commercial sis dans la copropriété concernée, se verra dès lors proposer le choix entre un Contrat de Performance Energétique et donc un plan pluriannuel de travaux.

Brièvement, le contrat de performance énergétique a été introduit par une directive européenne du 05 Avril 2006 selon laquelle il s’agit d’un « accord contractuel entre le bénéficiaire et le fournisseur d’une mesure visant à améliorer l’efficacité énergétique, selon lequel des investissements dans cette mesure sont consentis afin de parvenir à un niveau d’amélioration de l’efficacité énergétique qui est contractuellement défini ».

Le plan pluriannuel de travaux consiste quant à lui en la détermination, au vue du résultat du diagnostic de diagnostic de performance énergétique en l’identification des interventions de réhabilitation nécessaires et, après mise en concurrence, en leur budgétisation.

La décision d’opter pour l’une ou l’autre de ces solutions ou bien encore de préférer l’inaction à la réhabilitation de la copropriété suite à la réalisation du diagnostic de performance énergétique, est en principe prise à la majorité simple des copropriétaires. L’article 24-4 de la loi du 10 Juillet 1965 ne fait pas expressément référence à la majorité de l’article 24 de la même loi. Toutefois, cette absence ne peut « laisser penser que ce n’est pas cette majorité qui s’applique au vote de la question posée » comme le souligne Pascaline DECHELETTE-TOLOT. En effet, même si les articles 24-1, 24-2 et 24-3 mentionnent expressément cette majorité, si une autre majorité devait s’appliquer, l’article 24-4 le mentionnerait expressément et il ne se situerait pas sous l’article 24 énonçant le principe de la majorité simple dans le cadre des décisions de l’assemblée des copropriétaires. Dès lors, la règle de la majorité simple tend à s’appliquer.

Relativement à l’article 24-4 de la loi du 10 Juillet 1965, la loi Grenelle 2 est donc une nouvelle fois plus incitative que coercitive dans l’objectif qu’elle poursuit de valoriser le patrimoine immobilier existant et de réduire la consommation d’énergie, n’imposant des obligations qu’au syndic de la copropriété et non aux copropriétaires qui demeurent libre de voter contre les travaux de réhabilitation. Le propriétaire d’un local commercial au sein d’une copropriété peut donc, dans le cadre de cet article, opter ou non pour la réhabilitation.

3) L’impact sur les parties privatives

Néanmoins, il est un point sur lequel la loi Grenelle 2 aura un impact plus significatif sur le propriétaire d’un local commercial au sein d’une copropriété. L’article 7 de cette dite loi a modifié les dispositions de l’article 25 g) de la loi du 10 Juillet 1965 qui prévoit maintenant que « ne sont adoptées qu'à la majorité des voix de tous les copropriétaires les décisions concernant, […] à moins qu'ils ne relèvent de la majorité prévue par l'article 24, les travaux d'économies d'énergie ou de réduction des émissions de gaz à effet de serre ».

Cet article vient donc compléter l’article 24-4 de la même loi dans la mesure où il prévoit la majorité applicable, à savoir la majorité absolue sauf recours à l’article 25-1 qui permet de recourir à la majorité de l’article 24 lors d’un second vote, lorsqu’est soumise à l’assemblée des copropriétaires une question relative à des travaux d’économies d’énergie en dehors du cadre du diagnostic de performance énergétique ou de l’audit. Il élargit par ailleurs son champs d’application puisqu’il s’applique potentiellement à l’ensemble des travaux prévus par la loi Grenelle 2 alors qu’il ne concernait à l’origine que les travaux amortissables sur une durée inférieure à dix ans.

En outre, l’article 25 g) de la loi du 10 Juillet 1965 ajoute que « ces travaux peuvent comprendre des travaux d'intérêt collectif réalisés sur les parties privatives et aux frais du copropriétaire du lot concerné ». Cette disposition introduite par la loi Grenelle 2 tend à démontrer la volonté d’efficacité affichée par la loi en ce qu’elle impacte directement, au nom de « l’intérêt collectif », la propriété privée. Ainsi une majorité simple de copropriétaires peut imposer des aménagements et travaux de réhabilitation sur les parties privatives du propriétaire d’un local commercial opposé à de telles mesures. Aucune autre mesure n’aurait pu s’avérer aussi efficace concernant la réduction de la consommation énergétique, en effet il serait peu rationnel de procéder à des travaux de réhabilitation « importants et coûteux sur les parties communes et de ne pas isoler les parties privatives » qui resteraient dans leur état initial et non conformes au but poursuivi par le Grenelle 2. Tous les spécialistes s’accordant à dire qu’afin d’économiser l’énergie « l’ensemble de l’immeuble doit être traité » et en particulier « les fenêtres, parties privatives […] lieux évidents de pertes énergétiques ».

Enfin, si le propriétaire d’un local commercial pourra en conséquence se faire imposer par la copropriété des travaux de réhabilitation dans son propre local à ses seuls frais en vertu de l’article 10-1 de la loi du 10 Juillet 1965 selon lequel « sont imputables au seul copropriétaire concerné […] les dépenses pour travaux d’intérêt collectif réalisés sur les parties privatives en application du g de l’article 25 », il n’en demeure pas moins que cet article 25 g) précité lui permet le cas échéant de s’exonérer de cette obligation s’il « est en mesure de produire la preuve de la réalisation de travaux équivalents dans les dix années précédentes ». Par ailleurs, il n’aura pas à assumer la responsabilité de la maîtrise d’ouvrage, le syndicat exerçant « les pouvoirs du maître d’ouvrage jusqu’à réception des travaux ».

La loi Grenelle 2 a donc offert de nouveaux outils efficaces aux syndicats de copropriétaires afin d’améliorer la performance énergétique des immeubles via des travaux de réhabilitation.