Les nuisances sonores figurent parmi les critères importants que les occupants d’un immeuble prennent en compte. Le législateur a donc mis en place un ensemble de règles permettant d’une part de diminuer les nuisances sonores dans les bâtiments neufs, et d’autre part de fixer la limite de bruit admissible.

Ainsi l’article R1334-33 du Code de la santé publique issu du décret du 31 août 2006 (n°2006-1099) indique que « les valeurs limites de l'émergence sont de 5 décibels A en période diurne (de 7 heures à 22 heures) et de 3 dB (A) en période nocturne (de 22 heures à 7 heures), valeurs auxquelles s'ajoute un terme correctif en dB (A), fonction de la durée cumulée d'apparition du bruit particulier ».

De la sorte les mesures acoustiques réalisées, conformément aux dispositions, dans les immeubles neufs permettent d’établir si le niveau de bruit ressenti respecte ou non la réglementation.


De leur côté, les constructeurs doivent respecter les normes en vigueur et les règles de l’art. Ainsi les architectes doivent notamment prévoir de ne pas accoler une pièce sensible (chambre par exemple) à une gaine d’ascenseur. In fine, le respect de cette réglementation doit permettre d’apporter aux occupants de l’immeuble une bonne qualité de confort.

Toutefois lorsque les propriétaires d’un immeuble récent ressentent une nuisance sonore, ils ont la possibilité de mettre en œuvre la garantie décennale (dans les 10 ans à compter de la réception de l’ouvrage). En effet, l’arrêt de la cour de cassation du 27 octobre 2006 (n° 05-19408) a affirmé qu’une nuisance sonore pouvait être constitutive d’un désordre de nature décennale.


Néanmoins, ce même arrêt indique que « les désordres d'isolation phonique d'un immeuble peuvent relever de la garantie décennale même lorsque les exigences minimales légales ou réglementaires ont été respectées ». De la sorte, si le niveau de bruit ne dépasse pas la limite fixée réglementairement, la garantie décennale peut tout de même être mise en œuvre.

Lorsque les constructeurs, sur lesquels pèse la garantie décennale issue de l’article 1792, respectent l’ensemble des normes en vigueur à la date de construction du bâtiment, leur responsabilité peut tout de même être engagée.


Sur ce point, il convient de rappeler que l’article 1792 al 1er du Code civil met en œuvre un régime de responsabilité de plein droit à l’égard des constructeurs. Il pèse donc sur ceux-ci une présomption de responsabilité.

A ce titre, l’absence de faute ne pourra pas exonérer le constructeur. Ce principe est d’ailleurs sous-entendu à l’article 1792 al 2 du Code civil qui précise qu’une « telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère ». A contrario, seule la cause étrangère peut exonérer le constructeur de la garantie décennale.

Par ailleurs cette solution a été confirmée à de nombreuses reprises par la jurisprudence. La décision de la Cour d’appel de Douai du 8 juin 2005 en est une bonne illustration (SMABTP / SA ACE INSUANCE SNAV). En l’espèce, des désordres à caractère décennal avaient été constatés par le propriétaire. La maîtrise d’œuvre invoquait une absence de faute pour s’exonérer de la responsabilité de plein droit. La Cour d’appel a donc rappelé que la « mise hors de cause ne peut être prononcée au seul motif qu’elle n’aurait commis aucune faute ».


L’impossibilité d’exonération pour absence de faute propre à ce régime de plein droit, peut être mise en parallèle à la décision rendue par la Cour de cassation en 2006 (vu ci-dessus).

Si le niveau de bruit de l’immeuble était conforme à la réglementation en vigueur, cela n’exonère pas le constructeur. En effet, ici le constructeur n’a commis aucune faute, il a respecté la réglementation acoustique mais cela ne l’exonère pas de la responsabilité de plein droit pesant sur lui.

Toutefois, le respect de la réglementation pourra jouer un rôle essentiel quant à la nature décennale ou non du désordre.

Ainsi si le bruit constaté est au-dessus des limites réglementaires, l’impropriété à destination de l’immeuble semble acquise. En revanche, lorsque le bruit est conforme à la réglementation le désordre semble peu important et l’impropriété à destination plus difficilement démontrable.




Source : Droit de la construction : responsabilités et assurances, Droit et professionnels urbanisme et construction, LexisNexis, Edition 2011