
Le potentiel de la France en énergie hydrolienne et son régime juridique
Par Bo HAN
Posté le: 06/08/2012 10:17
L’énergie utilisant les courants marins est une des pistes envisagées pour subvenir à nos besoins énergétiques futurs. Cette piste pourrait prendre la forme de fermes d’hydroliennes installées dans des zones maritimes où les courants marins sont les plus propices à la production d’énergie. La France possède des zones puissantes au niveau européen dans ce sens (raz Blanchard).
Outre les défis technologiques que représentent les fermes d’hydroliennes (plusieurs technologies sont avancées, telles que les technologies à axe horizontal, à axe vertical ou « hydroplanes », disposant d’avantages et d’inconvénients propres, notamment liés à la possibilité ou non de maintenir la navigation sur le site), elles sont susceptibles de poser des problématiques juridiques complexes, notamment lorsqu’il est envisagé (i) d’installer ces hydroliennes dans des zones intermédiaires entre pays souverains et (ii) d’évacuer la production d‘électricité sur des réseaux gérés par plusieurs GRT (Gestionnaires de Réseaux de Transport).
En outre, un projet de ferme hydrolienne est susceptible de comporter les ouvrages suivants : les turbines en elle-même, un convertisseur qui convertit l’énergie en électricité, qui peut être installé par exemple sur une plate forme off shore ou sur la terre ferme, et des lignes d’évacuation, notamment sous marines, reliant les turbines au convertisseur et le convertisseur au rivage, pour que le projet soit ensuite raccordé au réseau de transport d’électricité.
Du point de vue juridique, la faisabilité de la construction des installations doit être examinée au regard de plusieurs « socles » de règles : droit international (ex : conventions multilatérales et bilatérales relative aux droits/obligations des Etats sur la mer), droit européen (ex : paquet « énergie ») et droits nationaux (ex : pour le droit français, Code de l’énergie, décret relatif aux concessions d’occupation du domaine public maritime, Grenelle de l’environnement, projet de décret relatif aux décret relatif à la réglementation applicable aux iles artificielles, aux installations, aux ouvrages et à leurs installations connexes dans la zone économique exclusive, sur le plateau continental, dans la zone économique et la zone de protection écologique ainsi qu'au tracé des câbles et pipelines sous-marins).
De plus, il convient de tenir compte des évolutions réglementaires en cours, telles que le projet de décret relatif à la réglementation applicable aux îles artificielles, aux installations, aux ouvrages et à leurs installations connexes dans la zone économique exclusive, sur le plateau continental dans la zone économique et la zone de protection écologique ainsi qu'au tracé des câbles et pipelines sous-marins, qui a fait l’objet d’une consultation publique entre le 13 avril et le 2 mai 2012.
Le cadre juridique en mer est défini, pour l’essentiel, par la Convention des Nations
Unies sur le Droit de la Mer, signée à Montego Bay en 1982, et que la France a ratifiée
en 1995.
Cette convention définit un certain nombre de zones maritimes, sous la souveraineté ou sous la juridiction des États côtiers, dont la mer territoriale (souveraineté jusqu’à 12 milles des lignes de base; en deçà de ces lignes, les eaux intérieures sont soumises au seul droit national) et la zone économique exclusive (ZEE, juridiction jusqu’à 200 milles des lignes de base). Dans toutes ces zones (c’est à dire en règle générale jusqu’à 200 milles au moins de ses côtes), l’État côtier dispose de droits souverains en ce qui concerne les « activités tendant à l'exploration et à l'exploitation de la zone à des fins économiques, telles que la production d'énergie à partir de l'eau, des courants et des vents» (art. 56 de la Convention). Il dispose aussi du droit de réglementer « la mise en place et l'utilisation d'îles artificielles, d'installations et d'ouvrages ».
Il est donc impossible d’exploiter sans son autorisation les ressources énergétiques de la mer, quelles qu’elles soient dans les zones maritimes sous la juridiction d’un État côtier.
Ceci est théoriquement possible en haute mer (au-delà des ZEE nationales), mais sans doute techniquement difficile compte tenu de l’éloignement (plus de 350 km des côtes).
Les zones maritimes sous juridiction française se trouvent pour l’essentiel outre-mer, la
ZEE de métropole et de Corse ne dépassant pas 500 000 km_.En Méditerranée, la
France n’a pas défini de ZEE, et ses droits en matière d’exploitation de l’énergie ne s’étendent pas au-delà de la mer territoriale (soit 21 km environ de la côte). Rappelons également que la France métropolitaine compte 5500 km de façade maritime.
Dans la quête de nouvelles sources d’énergie, il est donc judicieux qu’un pays comme la
France entreprenne d’examiner le potentiel que peuvent apporter les diverses formes d’énergie marines. Ceci doit bien entendu être réalisé dans le cadre d’une gestion rationnelle et concertée de l’espace maritime, car la mer est le théâtre de très nombreuses activités.