À la veille de la COP 30, l’Union européenne se trouve sous pression non seulement de ses États membres, mais aussi de ses propres champions industriels. Dans une déclaration relayée le 18 septembre 2025, des groupes européens de premier plan exhortent Bruxelles à maintenir sans concession l’objectif de neutralité carbone fixé à 2040.

Leur argument central est celui de la stabilité réglementaire. Pour ces acteurs, souvent engagés depuis plusieurs années dans des investissements massifs en technologies bas carbone — capture et stockage de CO₂, électrification des procédés industriels, infrastructures renouvelables —, toute révision à la baisse constituerait un signal négatif pour les marchés financiers. Un report ou un affaiblissement de la cible 2040 risquerait de compromettre l’accès aux financements verts, en particulier les obligations durables et les prêts préférentiels conditionnés à des trajectoires claires.

Les entreprises alertent également sur le risque de fragmentation juridique. En l’absence d’un cap harmonisé, chaque État membre pourrait être tenté de définir sa propre trajectoire, générant un « patchwork » normatif. Une telle divergence accroîtrait les coûts de conformité et menacerait la fluidité des chaînes d’approvisionnement européennes. Or, rappellent-elles, la valeur ajoutée du marché unique repose précisément sur l’unicité des règles applicables.

Face aux arguments des États membres plus réticents, qui invoquent les coûts sociaux et industriels d’une transition accélérée, les entreprises insistent sur la dimension géopolitique : maintenir une ambition élevée constitue un avantage comparatif face aux économies concurrentes aux objectifs moins contraignants. Anticiper la neutralité carbone offrirait à l’industrie européenne une position de leader technologique et un socle crédible pour les partenariats internationaux.

Elles appellent enfin à un dialogue renouvelé entre législateur et secteur privé. La révision prochaine de la directive Climat et des normes de reporting ESG devrait, selon elles, intégrer des mécanismes de flexibilité sans pour autant diluer l’ambition. Leurs contre-propositions incluent une reconnaissance mutuelle des certifications bas carbone et l’introduction de mécanismes de transition progressifs, mais juridiquement contraignants.

En définitive, le message des grandes entreprises à Bruxelles est limpide : l’Europe doit tenir son cap. Renoncer à l’objectif 2040 reviendrait à fragiliser sa crédibilité internationale, déstabiliser ses marchés et hypothéquer ses investissements. Maintenir la trajectoire est, au contraire, la clé de sa souveraineté industrielle verte.

Référence : Reuters, Why business wants Europe to hold its nerve on its 2040 climate target, 18 septembre 2025 – Lien officiel