
Oui, le préjudice environnemental existe déjà !
Par Benjamin GUERET
Posté le: 29/05/2012 18:08
Un colloque organisé dans les locaux de Sciences Po Paris le 23 mai dernier, réunissant de multiples et éminents praticiens du droit a abouti à cette conclusion : oui le préjudice environnemental existe déjà !
Nul besoin d’attendre l’arrivée du très attendu jugement de l’Erika prévu au 25 septembre prochain pour souhaiter un droit pénal de l’environnement répressif, plus répressif en tout cas qu’actuellement. Rappelons pour mémoire l’euro symbolique de sanction suite à la destruction d’une zone de nidification du goéland brun, espèce protégée s’il en est.
Cependant, ces praticiens du droit estime qu’une jurisprudence existe sur le préjudice environnemental. « Il est reconnu dans 200 décisions mais c’est encore un contentieux réduit » précise le président de la troisième chambre civile de la Cour de Cassation.
Notre maître à Tous, Monsieur Laurent Neyret explique qu’ « il existe un certain flou dans la prise en compte du préjudice écologique dans la jurisprudence ». Pour combler ce vide ces portes drapeaux du droit de l’environnement ont décidé de lancer une nomenclature dans le but de « nommer pour mieux normer ». Cette nomenclature regroupe tous les textes dans lesquels on peut trouver trace de ce préjudice écologique comme notamment la loi LRE du 1er août 2008 ou encore l’article 4 de la Charte de l’Environnement. Mais surtout cette nomenclature liste l’ensemble des préjudices envisageables et en donne une possible classification.
Deux catégories se dégagent alors, d’un côté les préjudices écologiques causés à l’environnement avec en premier lieu les atteintes aux eaux ou aux espèces et de l’autre côté les atteintes à l’homme, collectives, comme les atteintes à la protection de l’environnement ou individuels à l’instar des préjudices moraux ou économiques.
Surtout cette nomenclature rédigée par 15 éminences grises de tout bord amène deux innovations qui pourraient jouer un rôle majeur dans l’avenir. La première repose sur la différenciation entre préjudice écologique et préjudice morale, deux notions bien trop souvent liées devant les tribunaux ce qui avait pour conséquence de vider de son sens un préjudice écologique rapidement considéré comme « un sac fourre-tout » par les praticiens.
La deuxième innovation se concentre sur la réparation intégrale comme principe fondamental et essentiel du droit pénal de l’environnement. Le président de la troisième chambre civile de la Cour de cassation rappelle ainsi que « dès que les juges concluent à une réparation forfaitaire, leur décision est systématiquement cassée par la Cour de cassation ».
Mais il est des points que cette nomenclature occulte. Ainsi, le problème de la responsabilité juridique n’a pas été étudié, car reposant sur le législateur.
Se pose aussi la question du délai de prescription qui n’a pas été abordé ainsi que les éventuelles actions réunissant préjudice écologique et préjudice fait à l’homme. L’incertitude juridique persiste donc.
Dans l’avenir un observatoire sera mis en place afin de connaître de l’application de cette nomenclature sur le terrain.
Les instances auront un guide de plus pour se diriger vers un droit pénal plus répressif, espérons que cela suffise.