
Les nuisances lumineuses: cadre juridique général
Par Bo HAN
Posté le: 27/04/2012 14:28
Les nuisances lumineuses résultent de la multiplication des points lumineux d'origine artificielle générée par certaines installations et de leur réfléchissement.
L'Association nationale pour la protection du ciel et de l'environnement nocturne définit les nuisances lumineuse, comme « la dégradation de l'environnement nocturne par émission de lumière artificielle entraînant des impacts importants sur les écosystèmes (faune et flore) et sur la santé humaine suite à l'artificialisation de la nuit » (Sources : ANPCEN, 2009).
Leurs impacts sont non négligeables pour l’environnement.
1. Effets sur la consommation d'énergie
L'éclairage public représente 47 % de la consommation d'électricité des communes et rejette annuellement 670 000 tonnes de CO2 (Sources : ministère de l'écologie, 2011).
2. Effets sur la faune et la flore
L'illumination directe ou indirecte des espaces naturels provoque chez les animaux, un dérèglement des rythmes biologiques, des horloges internes et des processus hormonaux affectant l'alimentation, la reproduction, les périodes d'activités et la migration. Elle se traduit, soit par la diminution du nombre d'individus ou par la disparition d'espèces ou de groupes entiers, soit par l'accroissement de populations ayant su s'adapter à l'éclairage artificiel (Sources : ANCPEN, 2010).
3. Effets sur la santé, le confort et la sécurité
Des études révèlent un lien entre l'exposition à la lumière artificielle pendant la nuit et divers problèmes de santé : stress, fatigue, troubles du sommeil, myopie, perturbation du cycle de l'hormone mélatonine. (Sources : ANCPEN, 2010).
4. Effets sur l'astronomie
L'éclairage artificiel créé un brouillard lumineux qui masque la vision des étoiles et gêne le travail des astronomes (Sources : ANCPEN, 2010).
Jusqu'au Grenelle de l'environnement, aucune disposition spécifique ne réglementait les émissions lumineuses artificielles. Seul le maire, par le biais de son pouvoir de police générale (CGCT, art. L. 2212-1 et L. 2212-2), pouvait prendre les mesures appropriées pour mettre fin au trouble de voisinage généré par l'éclairage un éclairage excessif.
En octobre 2007, l'engagement n° 75 du Grenelle de l'environnement met en évidence la nécessité de prendre en compte les impacts des émissions de lumière artificielle sur l'environnement.
Une proposition de loi vise ainsi à lutter contre les pollutions lumineuses nocturnes en soumettant les installations intérieures d'éclairage à des prescriptions générales en vue de limiter les émissions de sources lumineuses sans nécessité (Proposition de loi AN n° 858, 7 mai 2008). Cette proposition de loi sera ensuite intégrée à la loi Grenelle I dont l'article 41 prévoit que « les émissions de lumière artificielle de nature à présenter des dangers ou à causer un trouble excessif aux personnes, à la faune, à la flore ou aux écosystèmes, entraînant un gaspillage énergétique ou empêchant l'observation du ciel nocturne feront l'objet de mesures de prévention, de suppression ou de limitation » (L. n° 2009-967, 3 août 2009).
Que sont les installations lumineuses soumises à cette réglementation ?
Les installations lumineuses concernées sont définies par décret en Conseil d'État selon leur puissance lumineuse totale, le type d'application de l'éclairage, la zone d'implantation et les équipements mis en place ( C. envir. art. L. 583-1, al. 2).
Sont ainsi visées par le dispositif de prescriptions et de contrôle, les installations suivantes destinées à ( C. envir., art. R. 583-2) :
— l'éclairage extérieur favorisant la sécurité des déplacements, des personnes et des biens et le confort des usagers sur l'espace public ou privé, en particulier la voirie, à l'exclusion des dispositifs d'éclairage et de signalisation des véhicules ;
— l'éclairage de mise en valeur du patrimoine ( C. patrim., art. L. 1), du cadre bâti, ainsi que des parcs et jardins ;
— l'éclairage des équipements sportifs de plein air ou découvrables ;
— l'éclairage des bâtiments, incluant illumination des façades des bâtiments et éclairage intérieur émis vers l'extérieur de ces mêmes bâtiments ;
— l'éclairage des parcs de stationnement non couverts ou semi-couverts ;
— l'éclairage événementiel extérieur, constitué d'installations lumineuses temporaires utilisées à l'occasion d'une manifestation artistique, culturelle, commerciale ou de loisirs ;
— l'éclairage de chantiers en extérieur.
Quelles prescriptions techniques sont-elles applicables aux installations lumineuses précitées ?
Des prescriptions peuvent être imposées aux exploitants d'installations lumineuses par l'autorité administrative pour tout à la fois prévenir ou limiter les dangers ou trouble excessif aux personnes et à l'environnement causés par les émissions de lumière artificielle et limiter les consommations d'énergie.
Le législateur a néanmoins prévu que ces dispositions ne doivent pas compromettre les objectifs de sécurité publique et de défense nationale ainsi que de sûreté des installations et ouvrages sensibles ( C. envir., art. L. 583-1, al. 1er).
Il revient au ministère de l'écologie de prendre un arrêté fixant ces prescriptions, après consultation des instances professionnelles concernées, d'associations de protection de l'environnement agréées désignées par arrêté du ministre chargé de l'environnement, de l'association représentative des maires au plan national et de l'association représentative des collectivités organisatrices de la distribution publique d'électricité au plan national ( C. envir., art. L. 583-2, I).
Quel est le contenu de ces prescriptions techniques ?
Les prescriptions techniques sont applicables à chaque type d'installations, en fonction de plusieurs critères ( C. envir., art. L. 583-2, I, 1o) :
— leur puissance,
— leur type d'éclairage,
— la zone d'implantation,
— les équipements mis en place.
Ainsi, ces prescriptions peuvent notamment porter sur ( C. envir., art. L. 583-2, I, 1o et R. 583-4, al. 3) :
— les niveaux d'éclairement (en lux), l'efficience lumineuse et énergétique des installations (en watts par lux et par mètre carré) et l'efficacité lumineuse des lampes (en lumens par watt),
— la puissance lumineuse moyenne des installations (flux lumineux total des sources rapporté à la surface destinée à être éclairée, en lumens par mètre carré),
— les luminances (en candelas par mètre carré),
— la limitation des éblouissements,
— la distribution spectrale des émissions lumineuses,
— les grandeurs caractérisant la distribution spatiale de la lumière.
En outre, les prescriptions peuvent fixer les modalités de fonctionnement de certaines installations lumineuses en fonction, d'une part, de leur usage, d'autre part, de la zone concernée ( C. envir., art. R. 583-4, al. 3), notamment dans certains espaces protégés et dans les zones proches des observatoires astronomiques.
Les installations lumineuses peuvent-elles être interdites ou limitées ?
Certaines sources ou des émissions lumineuses peuvent être limitées ou interdites lorsque les caractéristiques locales ou leur nature le justifient au regard des objectifs de prescriptions prises par arrêté ministériel ( C. envir., art. L. 583-2, II). Le décret d'application a toutefois réduit cette possibilité à quatre types d'installation.
Quelles sont les sanctions administratives applicables ?
En cas d'inobservation des dispositions législatives ou réglementaires applicables aux installations lumineuses, le maire ou le préfet met en demeure la personne à qui incombe l'obligation d'y satisfaire dans le délai qu'elle détermine ( C. envir., art. L. 583-5).
Si, à l'expiration de ce délai, l'intéressé n'a pas déféré à la mise en demeure, l'autorité administrative compétente suspend par arrêté le fonctionnement des sources lumineuses jusqu'à exécution des conditions imposées et prend les mesures conservatoires nécessaires, aux frais de la personne mise en demeure ( C. envir., art. L. 583-5).