État des lieux

Les maladies chroniques liées à la pollution de l’air touchent principalement le système respiratoire. Elles se manifestent souvent sous la forme d’asthme et allergies, bronchopneumopathie chronique obstructive, cancer du poumon, fibrose pulmonaire… La plupart d’entre ont des répercussions importantes sur la qualité de vie des personnes concernées, leur entourage, leur activité socio-professionnelle, mais aussi sur les coûts de leur prise en charge par l’Assurance Maladie. Ces pathologies peuvent toutes évoluer, dans leurs formes sévères, vers l’insuffisance respiratoire qui résulterait du remodelage pulmonaire (altérations du processus de réparation tissulaire). Elles causent environ 30% des décès après 65 ans. Selon la Société de pneumologie de langue française (SPLF), près de dix millions de Français sont touchés par une maladie chronique des voies respiratoires selon les conclusions des états généraux de la santé respiratoire, du 8 décembre 2021 consultable par le biais du lien suivant : https://splf.fr/ma-sante-respiratoire-2022. Poursuivant plus de 40 000 personnes décèdent chaque année de la pollution de l’air en France selon Santé publique France et 90 % de la population respire de l’air pollué dans le monde selon l’OMS. En France Une dizaine de polluants atmosphériques est actuellement identifiée dans le cadre de la surveillance de la qualité de l’air avec des objectifs en terme de concentration définis par le Code de l’environnement. Il s’agit entre autres du dioxyde d’azote (NO2), des oxydes d’azote (NOX), du dioxyde de soufre (SO2), du monoxyde de carbone (CO), du benzène, des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), des métaux lourds (cadmium, mercure gazeux, plomb, arsenic, nickel), de l’ozone (O3) et des particules en suspension (PM10, PM2,5).
Ces polluants atmosphériques font l’objet de réglementations adoptées, à partir des lignes directrices de l’OMS (Nouvelles lignes directrices publiées le 22 septembre 2021.).
Ces réglementations fixent des valeurs réglementaires pour ces polluants, incitant les pays à mettre en œuvre des actions en vue d’améliorer la qualité de l’air permettant de protéger la santé des populations. Ainsi, en France un décret en l’occurrence le décret n° 2017-949 du 10 mai 2017 fixe les objectifs nationaux de réduction des émissions de certains polluants atmosphériques. Concrètement ce décret déterminer les valeurs réglementaires, en concentration dans l’air, par des objectifs de réduction des émissions. En France, comme dans d’autres pays industrialisés (ou occidentaux), la mise en œuvre de ces dispositifs a permis une amélioration globale de la qualité de l’air, avec une baisse de concentration dans l’air de la majorité des polluants.

En plus des polluants atmosphériques, il y a des agents biologiques dans l’air. Il s’agit entre autres des moisissures, des pollens, des bactéries ou encore des virus. Les moisissures sont des champignons microscopiques dont le développement dans l’air extérieur est principalement lié au climat et à la végétation. Les pollens quant eux jouent un rôle essentiel dans la reproduction de la majorité des plantes. D’origine naturelles, les moisissures et pollens sont cependant à l’origine de maladies respiratoires telles que l’asthme ou la rhinite. Cependant, il est difficile de quantifier de manière fiable le nombre de personnes réellement touchées par ces allergies. Selon certaines estimations, le nombre de personnes touchées par des pathologies allergiques respiratoires comme les rhinites saisonnières et l’asthme aurait doublé ces 20 dernières années dans les pays industrialisés : de l’ordre de 20% des enfants à partir de 9 ans et de 30% des adultes en France d’où la nécessité de surveiller la qualité de l'air.

La surveillance de la qualité de l’air

À la suite de la Conférence des Nations-Unies (Stockholm, 1972), qui fait de la protection de l’environnement un enjeu international, la pollution atmosphérique est reconnue comme pouvant provoquer « à court ou à long terme des effets dommageables (…) y compris la pollution atmosphérique transfrontière à longue distance ». Cette prise de conscience, tant sur le plan écologique que sanitaire, conduit les parties contractantes à lutter contre l'acidification de l'air, des sols, des eaux et des pluies, puis à mettre en place une dynamique internationale via la Convention de Genève adoptée en 1979 par 34 pays. Celle-ci porte sur toutes les formes de pollution atmosphérique « dont la source physique est comprise totalement ou en partie dans une zone soumise à la juridiction nationale d'un État et qui exerce des effets dommageables dans une zone soumise à la juridiction d'un autre État à une distance telle qu'il n'est généralement pas possible de distinguer les apports des sources individuelles ou groupes de sources d'émission » (voir Convention sur la pollution atmosphérique transfrontière à longue distance, 1979) . Ces préoccupations incitent les pays signataires à s’engager concrètement à une réduction des émissions de certains métaux (cadmium, mercure, plomb…), à encourager la surveillance de leurs dépôts et des niveaux de contamination dans différents compartiments de l’environnement. A cette époque, la pollution de l’air constitue une problématique environnementale d’importance motivant la mise en place d’une politique européenne visant le développement et la mise en œuvre de moyens pour améliorer la qualité de l’air ambiant. Dans les décennies suivantes, la réglementation européenne va évoluer et structurer des mesures de surveillance, d’évaluation et de maîtrise de la qualité de l’air ambiant pour différents polluants chimiques déployés dans l’ensemble des pays de l’Union européenne.

Avec l’adoption de ces législations pour limiter la pollution atmosphérique, la question des outils de surveillance de la qualité de l’air et de la mise en place de dispositifs s’est posée. Notons que la France est un bon élève en matière de gestion de la qualité de l’air. En effet, dès les 1954, rappelle Gaëlle Guillossou, Paris s’est doté(e) « des toutes premières stations permanentes au monde de mesure de l’acidité forte de l’air et des fumées noires, grâce aux efforts conjugués du laboratoire d’hygiène de la ville de Paris et du Laboratoire central de la préfecture de police ». Puis, toutes les grandes villes françaises se sont progressivement équipées de systèmes de surveillance afin d’accompagner les politiques de mises en œuvre. C’est ainsi qu’intervient la loi n° 61-842 relative à la lutte contre la pollution de l’air et des odeurs du 2 août 1961. Aujourd’hui, à la suite de la loi n° 96-1236 du 30 décembre 1996, sur l’air et l’utilisation rationnelle de l’énergie dite loi LAURE, la surveillance de la qualité de l’air a été confiée par l’État à des associations agréées à savoir les Aasqa. Les AASQA sont les Associations agréées de surveillance de la qualité de l’air, financées principalement par l’État, les collectivités territoriales et par des entreprises qui émettent des substances surveillées. Selon la compilation des données de ces associations la France compterait plus de 577 stations de mesure sont réparties sur le territoire national, qui peuvent suivre un ou plusieurs polluants, de manière continue ou ponctuelle (mesures fixes, mesures indicatives, estimations…). Les données sont ensuite collectées, analysées pour :
• Mieux documenter et caractériser la pollution atmosphérique (ex. composition chimique des particules fines) ;
• Vérifier le respect des valeurs réglementaires (« Normes de qualité de l'air ambiant » définit à l’article R.221-1 du code de l’environnement.) et alerter le public lors de la survenue de pics de pollution (Arrêté du 7 avril 2016 modifié relatif au déclenchement des procédures préfectorales en cas d’épisodes de pollution de l’air ambiant) ;
• Alimenter les outils de modélisation numérique et prévenir les épisodes de pollution atmosphérique ; • Participer à l’échange d’informations dans le cadre européen et favoriser ainsi une meilleure connaissance partagée. En ce qui concerne la pollution par les véhicules motorisés c’est le décret n° 2017-782 du 5 mai 2017 renforçant les sanctions pour non-respect de l'usage des certificats qualité de l'air et des mesures d'urgence arrêtées en cas d'épisode de pollution atmosphérique qui constitue le cadre juridique le plus opérationnel. La qualité de l’air étant un enjeu sanitaire majeur, l’État a mis en place, dans le cadre de la loi de transition énergétique pour la croissance verte, un plan d’action interministériel pour la qualité de l’air afin de protéger la santé des populations et de favoriser la circulation des véhicules propres, dont les mesures prioritaires sont définies dans le PRÉPA (Plan national de réduction des émissions de polluants atmosphériques). Parmi les mesures retenues, un dispositif d’identification des véhicules à faibles émissions de gaz, le Certificat qualité de l’air( Crit’Air), a été introduit pour encourager leur utilisation et permettre leur circulation en cas de pics de pollution. En même temps, des zones dites "environnementales" ont été créées dans les centres urbains et les agglomérations urbaines. Concrètement, il permet aux collectivités locales de moduler les mesures incitatives ou restrictives qu’elles souhaitent mettre en place. Il faut différencier les ZCR (Zone à circulation restreinte), permanentes et surtout en vigueur dans les centres des villes, aux ZPA (Zone de protection de l’air), qui ne sont pas constantes, et qui ne sont activées que lors de pics de pollution persistants, au sein de communes ou d’agglomérations. Le Certificat Crit’Air est entré en vigueur le 1er juillet 2016. Paris est la première ville à avoir mis en place un dispositif de Zone à Circulation Restreinte le 15 janvier 2017, suivie par les villes de Grenoble le 1er novembre 2016, et de Strasbourg le 1er novembre 2017. Lyon a mis en place une Zone de Protection de l’Air, à compter du 12 décembre 2016.
Il est utile de rappeler qu’en milieu professionnel, le renforcement de la réglementation oblige les entreprises à mettre en place des mesures de prévention adaptées pour protéger la santé des travailleurs. Dans le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) par exemple, réduire l’exposition à la silice cristalline (Arrêté du 26 octobre 2020 fixant la liste des substances, mélanges et procédés cancérogènes au sens du Code du travail). Selon Alison Alazard ; en raison de la multiplicité des tâches susceptibles d’exposer les salariés, de nombreux matériaux pouvant contenir de la silice cristalline et des conditions de travail variables des mesures adéquates doivent être adoptées » (voir Alison Alazard, La réduction des poussières de silice cristalline, pp. 20-22). L’originalité de son projet consiste à tester les solutions de réduction des poussières selon une double approche à savoir étude en laboratoire et sur terrain afin d’évaluer leur efficacité.