DROIT DE LA SANTE: LE RENFORCEMENT DE LA RESPONSABILITE EN MATIERE DE SANTE
Par Cossi Blaise Gnankadjan
Posté le: 26/09/2022 11:03
La responsabilité en matière de santé
          La responsabilité personnelle dans le domaine de la santé a des incidences à la fois sur  les systèmes de santé et la santé  publique(dimension collective), ainsi  que sur  ce qu’une personne est censée faire pour rester en bonne santé et sur les limites (éventuelles) de  la  couverture des  dépenses  de  santé  qui  pourraient  (éventuellement)  en  découler (dimension individuelle). Le rapport du CIB analyse quelques-unes de ces  questions  du  double point  de  vue éthique et juridique,  et  indique  les  orientations  qui  permettent  à  l’individu  de prendre des responsabilités.
I-	L’extension de la responsabilité individuelle liée à l’évolution des soins et de la technologie dans le domaine de la santé
             Jusqu’à  présent,   l’organisation   des   soins   et   des   recherches   liées   à   la   santé dépendait dans une très large mesure de l’avis des responsables politiques,  des professionnels  et  des  experts  scientifiques.  Aujourd’hui, le CIB constate un certain nombre d’évolutions en la matière qui, dans certains pays au moins, tendent à faire peser une plus grande   responsabilité   sur   les   consommateurs,   publics   et   patients,   tantôt   à   l’échelon individuel,  tantôt  à  l’échelon  collectif.  Quelques-unes  de  ces  évolutions  sont  présentées  ci-après.
             De  nombreux  êtres  humains  vivent à  l’ère  de  la  technologie.  La  technologie  est partout, dans la façon dont sont fabriquées les maisons, dont sont construites les villes, dont les  gouvernements sont  constitués et, naturellement  aussi,  dont  les  prestations  de santé sont délivrées. L’introduction  de  nouvelles  technologies  va  toujours  de  pair  avec  une extension de la responsabilité de l’individu. Dans le passé, l’infertilité devait être acceptée. À présent,  on  peut  décider  de  recourir  à  la  procréation médicalement  assistée  (PMA)  si  l’on veut avoir un  enfant(voir  également  le  Rapport  du  CIB  sur  la PMA  et  les  nouvelles parentalités).   Autrefois,   la   naissance   d’un enfant était   un   événement qui   survenait; aujourd’hui (ou dans un proche avenir), il  est (ou sera)possible d’apprendre l’existence de cet  enfant  grâce  à  une  échographie  (ou  à  un  test  génétique  après  un  test  prénatal  non invasif)  et il  faut (ou  faudra) décider  de  poursuivre  ou  non  la  grossesse.  Autrefois,  le médecin  disait  simplement  au  patient  qu’il  avait  une  maladie  mortelle, ce  qui  signifiait  qu’il n’y  avait pas d’option;  aujourd’hui, le  patient doit faire  des  choix  en  ce  qui concerne la réanimation ou le recours à une chimiothérapie invasive. Les exemples sont innombrables. Le  mécanisme  est  toujours  le  même:  la  technologie  crée  des  possibilités  nouvelles  qui, lorsqu’elles sont disponibles, obligent l’individu à prendre des décisions dans des situations où  il  n’avait  auparavant  aucune  possibilité  de  choix.  Même  dans  les  cas  où  l’individu  n’est pas contraint de choisir entre plusieurs options, il lui faut prendre une décision, car ne pas le faire reviendrait à renoncer à l’intervention qui exige cette décision, de sorte qu’il est malgré tout   placé   devant   un   choix. En   même   temps,   l'aspect   positif   du   développement technologique, par  exemple  la  médecine  de précision,  est  l'autonomisation  du  patient  qui peut s'informer sur son état et faire des choix.
II-	La responsabilité envers soi-même
                 La  responsabilité qui incombe  à  l’individu  d’être  en  bonne  santé  rejoint,  selon certains, le «devoir d’essayer d’être en bonne santé»: il incombe à chacun de chercher à se  soigner  et  de  prendre  soin  de  soi,  ainsi  que  de  prévenir  les  facteurs  de  risque  de maladies attribuables à des comportements individuels qui peuvent être modifiés. Vue sous cet angle, la santé acquiert la dimension d’une responsabilité collective face à la raréfaction des  ressources  (en  raison  du  renforcement  des  exigences  en  matière  de  santé  sur  le  plan quantitatif  et  qualitatif).  
           Il faut en  outre maintenir  un  service  de  santé  efficace  et  pérenne, accessible  au  plus  grand  nombre  possible  de  citoyens. Il  en  va  de l’intérêt  général. Par conséquent,  il  est  indispensable  de  pouvoir  compter  sur  l’engagement  personnel  des individus à contribuer, dans la mesure du possible, au maintien de leur état de santé, tout en concourant  à  la  création  et  au  bon  fonctionnement  d’un  système  de  santé  universel. 
Cela n’exclut  nullement  le  droit  de  refuser  un  traitement,  même  un  traitement  chirurgical  ou pharmaceutique  pouvant  sauver  la  vie, tant  que  cela concerne  la  personne  elle-même.
 Lorsque cela met en danger les autres, le traitement coercitif de patients compétents dans certaines juridictions est légalement accepté en faisant figure d’exception, alors qu’il ne l’est pas dans certaines autres. 
 Sur  le  plan  éthique,  il  y  a  un  certain  nombre  de  raisons  de s'opposer  au traitement  coercitif,  même  si  certains  l'accepteraient  dans  des  circonstances exceptionnelles pour des raisons de santé publique.