Par sa décision ici commentée, le Conseil d'Etat a rappelé le contenu du I de l'article L.171-8 du code de l'environnement. Aux termes de ces dispositions, le préfet, qualité d'autorité de police des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) "met en demeure" la personne qui ne respecte pas les prescriptions de fonctionnement d'une installation :

"6. D'autre part, aux termes du I de l'article L. 171-8 du code de l'environnement, en vigueur à la date de l'arrêté préfectoral du 13 juillet 2016 : " Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, en cas d'inobservation des prescriptions applicables en vertu du présent code aux installations, ouvrages, travaux, aménagements, opérations, objets, dispositifs et activités, l'autorité administrative compétente met en demeure la personne à laquelle incombe l'obligation d'y satisfaire dans un délai qu'elle détermine. En cas d'urgence, elle fixe les mesures nécessaires pour prévenir les dangers graves et imminents pour la santé, la sécurité publique ou l'environnement."

Toutefois, on peut se demander si le préfet est contraint d’exercer son pouvoir de police, ou bien, s’il s’agit ici, d’une simple faculté ?

En réponse, le Conseil d'Etat rappelle :
• d'une part que le préfet est tenu d'édicter une mise en demeure à l'exploitant en cas d'inobservation par ce dernier des prescriptions applicables à son installation ;
• d'autre part que le préfet dispose ensuite d'un choix entre plusieurs catégories de sanctions en cas de non-exécution de son injonction

La décision précise en effet :

"7. Il résulte des dispositions citées au point 6, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 19 juillet 1976 relative aux installations classées et de l'ordonnance du 11 janvier 2012 portant simplification, réforme et harmonisation des dispositions de police administrative et de police judiciaire du code de l'environnement dont elles sont issues, qu'en cas d'inobservation de prescriptions applicables à une installation classée, le préfet est tenu d'édicter à la personne à laquelle incombe l'obligation d'y satisfaire une mise en demeure de satisfaire à ces conditions dans un délai déterminé. Si le II de l'article L. 171-8 du code de l'environnement laisse au préfet un choix entre plusieurs catégories de sanctions en cas de non- exécution de son injonction, cela n'affecte pas la compétence liée du préfet pour édicter la mise en demeure. Par suite, en jugeant que le préfet n'était pas en situation de compétence liée pour prendre la mise en demeure édictée par l'arrêté du 13 juillet 2016, la cour
administrative d'appel de Nancy a entaché son arrêt d'une erreur de droit."

En annulant l’arrêt de la cour administrative d’appel de Nancy, cette décision est une confirmation de la jurisprudence existante.

Par une décision du 9 juillet 2007, le Conseil d'Etat avait déjà en effet jugé que le préfet est tenu d'éditer une telle mise en demeure :

"(...) qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 19 juillet 1976, que lorsque l'inspecteur des installations classées a constaté, selon la procédure requise par le code de l'environnement, l'inobservation de conditions légalement imposées à l'exploitant d'une installation classée, le préfet, sans procéder à une nouvelle appréciation de la violation constatée, est tenu d'édicter une mise en demeure de satisfaire à ces conditions dans un délai déterminé ; que si l'article L. 514-1 laisse au préfet un choix entre plusieurs catégories de sanctions en cas de non exécution de son injonction, la mise en demeure qu'il édicte n'emporte pas par elle-même une de ces sanctions ; que l'option ainsi ouverte en matière de sanctions n'affecte donc pas la compétence liée du préfet pour édicter la mise en demeure ;".