A titre préliminaire, rappelons qu’aux termes de l’article 4 de la loi « Grenelle 1 », l’Etat se fixe comme objectifs que toutes les constructions neuves faisant l’objet d’une demande de permis de construire déposée à compter de la fin 2012 présentent une consommation d’énergie primaire inférieure à un seuil de 50 kilowattheures par mètre carré et par an en moyenne, en application de la RT 2012 consacrant ainsi le label Bâtiment Basse Consommation (BBC).

Pour atteindre cet objectif, le législateur ne s’en est pas tenu à édicter une norme de construction, mais a entendu mobiliser l’outil opérationnel que constituent les procédures d’autorisation du droit de l’urbanisme (1), tout en imposant la conciliation entre ces deux droits (2), mais aussi la possibilité de refuser la conformité du bâtiment (3), et une sanction pénale officielle (4).

1. La mise en place d’un outillage adapté
La loi mobilise le droit de l’urbanisme pour qu’il fournisse l’outillage permettant d’assurer un contrôle efficace du respect de la norme issue du code de la construction et de l’habitation.
C’est ainsi qu’au moment du dépôt de la demande de permis de construire, l’article L. 111-9 du code de la construction et de l’habitation impose au maître d’ouvrage d’attester de la prise en compte de la réglementation thermique pour les constructions neuves.

La même disposition existe à l’article L. 111-10 du code de la construction et de l’habitation pour les bâtiments ou parties de bâtiments existants.

Le maître d’ouvrage devra aussi attester de la réalisation de l’étude de faisabilité relative aux approvisionnements en énergie, elle-même imposée par l’article L. 111-9 du code de la construction et de l’habitation.

Le législateur a par ailleurs renouvelé – mais en le modifiant substantiellement– le mécanisme d’incitation introduit dans le droit de l’urbanisme par la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique , dite loi « POPE ».

Concernant le fonctionnement du plafond légal de densité (PLD) et la possibilité de dépassement des coefficients d’occupation des sols (COS), l’article L. 128-1 du code de l’urbanisme offre désormais la possibilité dans les zones urbaines ou à urbaniser de dépasser les règles de gabarit et de densité d’occupation des sols résultant du plan local d’urbanisme (PLU), dans la limite de 30% pour les constructions remplissant des critères de performance énergétique ou alimentées à partir d’équipements performants et production renouvelable ou de récupération.

Ces nouvelles dispositions ne sont toutefois pas applicables dans un secteur sauvegardé ou faisant l’objet d’une réglementation particulière (immeuble classé ou inscrit au titre des monuments historiques…) ou dans un périmètre délimité après avis de l’ABF (Architecte Bâtiment de France).
En outre, ces mesures nouvelles ne peuvent pas permettre de déroger aux servitudes d’utilité publique visées à l’article L. 126-1 du Code de l’urbanisme.

Par rapport au dispositif antérieur, la limite du dépassement est portée de 20 à 30%.

En outre, si le cumul de ce dépassement avec celui instauré par la loi n°2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement dite « ENL » en matière de logements sociaux est admis, l’article L. 128-3 du code de l’urbanisme interdit un dépassement de plus de 50% de la densité autorisée par le coefficient d’occupation des sols (COS) ou du volume autorisé par le gabarit.

La recherche de la performance énergétique et environnementale des bâtiments ainsi imposée aux documents d’urbanisme peut entrer en conflit avec les objectifs poursuivis par les documents d’urbanisme et notamment le style et la qualité de l’architecture ou de l’aménagement urbain.

Le législateur en a été parfaitement conscient et a tenté de poser les bases d’une conciliation, notamment avec les enjeux de protection.

2. La conciliation entre la norme de construction et les enjeux d’urbanisme
Eut égard, au principe de l’indépendance des législations, le législateur a tout d’abord consacré la primauté de la norme de construction, en posant à l’article L. 111-6-2 du Code de l’urbanisme : un principe d’inopposabilité des règles d’urbanisme constituant des freins à l’utilisation de matériaux renouvelables ou de matériaux ou de procédés de construction permettant d’éviter l’émission de gaz à effet de serre et à l’installation de dispositifs favorisant la production d’énergie renouvelable correspondant aux besoins de la consommation domestique des occupants de l’immeuble ou de la partie d’immeuble concernés.

Ce nouveau texte concerne le permis de construire, le permis d’aménager ou la décision prise sur une déclaration préalable.

En pratique, lorsque la construction utilise des énergies renouvelables à usage domestique (systèmes solaires thermiques ou photovoltaïque, utilisation en façade du bois, toitures végétalisées), les règles d’urbanisme relatives à l’extérieur des bâtiments sont inopposables.
La liste des dispositifs, procédés de construction et matériaux concernés est fixée par voie réglementaire à l’article R. 111-50 du Code de l’urbanisme, crée par l’article 1 du décret n°2011-830 du 12 juillet 2011.

Le législateur a néanmoins écarté cette disposition dans un secteur sauvegardé ou faisant l’objet d’une réglementation particulière (notamment les immeubles classés ou inscrits au titre des monuments historiques et le patrimoine architectural) ou dans un périmètre délimité après avis de l’ABF.

C’est dire que la norme de construction cède lorsqu’elle est confrontée à un enjeu de protection.

A compter du 13 juillet 2010, toute règle nouvelle qui, dans l’un des périmètres ci-dessus, interdirait ou limiterait l’installation de ces dispositifs, devra faire l’objet d’une justification particulière.
In fine, l’article L. 111-6-2 prévoit l’applicabilité du premier alinéa six mois après la publication de la loi « Grenelle 2 » , c’est-à-dire le 13 janvier 2011.

3. Le rôle de l’attestation de parfait achèvement

La loi « Grenelle 2 » mobilise le droit de l’urbanisme pour qu’il fournisse l’outillage permettant d’assurer un contrôle efficace du respect de la norme issue du code de la construction et de l’habitation.

Ainsi, le code de l’urbanisme prête également son outillage procédural au contrôle du respect de la réglementation thermique à l’occasion de l’achèvement des travaux et constructions.

La loi prévoit en effet qu’à l’issue de la construction de bâtiments neufs ou de parties nouvelles de bâtiments soumis à la demande de permis de construire, le maître d’ouvrage devra fournir à l’autorité compétente pour délivrer le permis de construire un document attestant que la réglementation thermique a été prise en compte par le maître d’œuvre ou, en son absence par lui- même. Un article L. 111-9-1 du code de la construction et de l’habitation a été créé afin d’intégrer cette nouvelle obligation.

Par ailleurs, le même type de disposition a été inséré à l’article L. 111-10-2 du code de la construction et de l’habitation concernant cette fois les bâtiments existants.

Ainsi, à l’issue de l’achèvement de travaux de réhabilitation thermique des bâtiments existants, le maître d’ouvrage devra remettre à l’autorité qui a délivré l’autorisation de construire, un document attestant de la prise en compte de la réglementation thermique.

Dans tous les cas, la loi « Grenelle 2 » a prévu que l’attestation puisse être établie par différentes personnes citées dans différents articles du code de la construction et de l’habitation.
En premier lieu, l’attestation peut être établie par le contrôleur technique de l’article L. 111-23, en deuxième lieu un « diagnostiqueur » au sens de l’article L. 271-6, en troisième lieu un organisme ayant certifié la performance énergétique du bâtiment ou des travaux dans le cadre de la délivrance d’un label « HPE » ou encore par un architecte, comme le prévoit l’article L. 111-9-1.

Mais comme l’a fait remarquer Monsieur le Professeur Hugues Périnet- Marquet, étant donné que les parlementaires ont finalement admis que l’attestation puisse être faite par un architecte, y compris celui de l’opération, ce dernier se trouve placé en « situation d’héroïsme » puisque, si la réglementation thermique n’est pas parfaitement respectée, il a le choix soit de faire un faux en disant le contraire, soit de se dénoncer lui-même comme complice voire auteur d’une infraction pénale. Ainsi, si l’Etat a voulu une privatisation du contrôle, peut- être aurai- il fallut que le contrôleur à défaut d’être une personne publique, soit au moins indépendant… comme semble l’imposer la directive 2010/31/UE du 19 mai 2010 sur la performance énergétique (refonte).

4. La sanction pénale

La sanction officielle prévue par la loi est de nature pénale puisque le non- respect de la RT 2012 entre dans le champ d’application du droit pénal de la construction qui se retrouve dans un chapitre II intitulé « Sanctions pénales » regroupant les articles L. 152-1 à L. 152-5 du Code de la construction et de l’habitation.

Ainsi, l’article L. 152-4 du Code de la construction et de l’habitation puni les personnes physiques (utilisateurs du sol, bénéficiaire des travaux, architectes, entrepreneurs ou toute autre personne responsable de l’exécution des travaux) ayant méconnu les obligations de réglementation thermique d’une amende de 45.000 € et d’une peine d’emprisonnement de six mois en cas de récidive.
Les personnes morales peuvent aussi être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues à l’article 121-2 du Code pénal.
Elles encourent une amende de 225.OOO €, ainsi qu’une peine complémentaire d’interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq au plus, d’exercer une ou plusieurs de leurs activités professionnelles ou sociales.

Par ailleurs, l’article L. 152-2 du Code de la construction et de l’habitation prévoit la possibilité d’ordonner l’interruption des travaux.

Enfin, en cas de condamnation, l’article L. 152-5 du Code de la construction prévoit que le tribunal statue soit sur la mise en conformité des ouvrages avec les règlements, la démolition des ouvrages, la réaffectation du sol en vue du rétablissement des lieux dans leur état antérieur.

Mais, on sait bien qu’en pratique ce type de droit pénal spécial est marginal et qu’il est peu probable que les procureurs se mettent à poursuivre ce type d’infraction… Néanmoins, ces infractions trouveront de véritables sanctions dans d’autres domaines du droit (droit commun de la vente, responsabilité des constructeurs, des fabricants etc.).