Une vague de chaleur extrême s'est abattue, jeudi 28 avril, sur une partie de l'Inde et du Pakistan, avec des températures supérieures à 46 °C dans plusieurs villes de ces deux pays qui abritent près de 20% de la population mondiale. Cette vague de chaleur extrême devrait sévir encore pendant cinq jours dans le nord-ouest et le centre de l'Inde et jusqu'à la fin de la semaine dans l'est, selon le département météorologique indien.


Le 29 avril, en Inde, il a fait jusqu'à 47,4 °C à Banda, dans le nord du pays, et 46,2 °C à New Delhi, la capitale, selon les relevés du département météorologique indien*. "Il fait tellement chaud, c'est intenable. Normalement, en mars-avril, il fait doux, c'est le printemps, ce sont les mois de mai-juin-juillet qui sont très chauds. Là, il fait déjà très lourd, regardez comme je transpire", témoigne sur France 2 Deepak Kumar, en tirant son chariot dans les rues de New Delhi.


En mars, déjà, Delhi a connu un maximum de 40,1 °C, la plus chaude température jamais enregistrée pour ce mois depuis 1946.

Le Pakistan voisin subit aussi cette chaleur extrême. A Dadu, dans le sud du pays, le thermomètre est monté jusqu'à jeudi, un record pour un mois d'avril. Il a fait 47 °C à Jacobabad et 46 °C à Khairpur, dans la même région du Sindh, selon le bureau météorologique du Pakistan*. "Les températures dans certaines parties du pays sont 5 à 7 °C au-dessus des normales de saison", a signalé vendredi le même service*. Toujours selon la même source, le mois de mars a été le plus chaud jamais enregistré depuis 1961.


Les vagues de chaleur sont l'une des manifestations les plus criantes du changement climatique que nous connaissons, comme l'a rappelé le Giec dans son dernier rapport. Depuis les années 1950, les pics de chaleur sont devenus plus fréquents et plus intenses, sous l'effet du changement climatique provoqué par l'homme.

"Le changement climatique rend les températures élevées en Inde plus probables", confirme à l'AFP Mariam Zachariah, scientifique à l'Imperial College de Londres et autrice d'une analyse encore non publiée sur la canicule en cours. "Avant que les activités humaines n'accroissent les températures mondiales, une chaleur comme celle qui a frappé l'Inde au début du mois n'aurait été observée qu'environ une fois tous les cinquante ans, ajoute l'experte. Nous pouvons désormais nous attendre à des températures aussi élevées environ une fois tous les quatre ans."

Pour sa consœur Friederike Otto, coautrice du dernier rapport du Giec, "les vagues de chaleur en Inde et ailleurs continueront de devenir plus chaudes et plus dangereuses, jusqu'à la fin des émissions nettes de gaz à effet de serre", ces gaz produits lorsque nous utilisons des énergies fossiles (charbon, pétrole, gaz) pour nous déplacer, nous chauffer ou nous nourrir.

En ce qui concerne les conséquences , il n'existe pas encore de bilan humain concernant ce pic de chaleur. Mais ces canicules extrêmes tuent. En mai-juin 2015, un épisode comparable avait provoqué la mort de 3 500 personnes en Inde et 1 100 au Pakistan, rappelle l'encyclopédie Britannica*. Selon l'AFP, les vagues de chaleur ont tué plus de 6 500 personnes en Inde depuis 2010. A Calcutta, dans l'est de l'Inde, après des malaises en série dans les transports en commun, de l'eau sucrée a été distribuée aux passagers.

A New Delhi, la chaleur provoque un autre problème de santé publique. Les décharges, comme celle de Bhalswa, s'enflamment spontanément, dispersant leurs fumées toxiques vers les habitations. Trois autres incendies se sont déclarés en moins d'un mois dans la plus grande décharge de la capitale, Ghazipur, gigantesque montagne de déchets haute de 65 mètres. Au Pakistan, le bureau météorologique* met en garde contre un risque d'inondation éclair, provoqué par la rupture soudaine d'un glacier.

Pour se protéger de la chaleur, ceux qui en ont les moyens font tourner leurs climatiseurs. Mais l'utilisation de ces derniers fait exploser la consommation d'électricité, provoquant des rationnements et des coupures de courant dans le nord-ouest du Rajasthan indien, l'ouest du Gujarat et le sud de l'Andhra Pradesh. "La situation dans toute l'Inde est désastreuse", selon Arvind Kejriwal, ministre en chef de Delhi, cité par l'AFP. Au Pakistan, plusieurs villes ont ainsi subi jusqu'à huit heures de coupure de courant par jour la semaine dernière, tandis que des zones rurales enregistraient des délestages la moitié de la journée.

Ces pics de consommation plongent ces pays dans un véritable cercle vicieux : en Inde, 83% de l'électricité* est fabriquée en brûlant du charbon (55%) et du pétrole (28%). Au Pakistan, c'est 86%* avec le gaz (43%), le pétrole (25%) et le charbon (18%). Des énergies fossiles qui émettent des gaz à effet de serre, aggravant encore un peu plus le réchauffement climatique.