Le 14 juillet dernier - dans le cade du pacte vert pour l’Europe (Green Deal) - la Commission européenne dévoilait 12 projets de directives et règlements - parmi lesquels on retrouve des dispositions tenant à la rénovation thermique, l’accélération de la transition vers les énergies renouvelables ou encore le renforcement des forets - avec en ligne de mire l’objectif de neutralité carbone d’ici 2050.
Focus sur le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières.

Projet en vogue depuis plusieurs années, ce dernier poursuit un fil conducteur assez simple : en plus du prix de vente des produits et services importés, s’ajoute un cout - calqué sur les cours du système d’échange des quotas d’émissions carbone (ETS) - calculé en fonction des émissions carbone du produit ou service en question. Il pourrait rapporter entre 5 et 14 Milliards d’euros par an et son entrée en vigueur est prévue pour courant 2023.

Ce dernier témoigne d’une nouvelle approche européenne de la mondialisation et du commerce international dans la région qui compte le plus d'émissions importées au monde. A titre d’exemple, en France, celles-ci représentent 37,6 % de l'empreinte carbone totale des ménages.

Outre la nécessité climatique de répondre au premier objectif fixé par le green deal - pour rentrer dans les clous de l’Accord de Paris - de réduire des émissions carbone de 55%, par rapport à l’ère pré-industrielle, d’ici 2030 au sein de l’Union Européenne - le projet vise à freiner, autant que possible, les délocalisations d’entreprises vers des territoires dans lesquels la fiscalité environnementale est plus avantageuse ainsi qu’à garantir une juste concurrence entre les entreprises intra et extra européennes.

Un tel mécanisme permettra en outre de favoriser la compétitivité des fabricants européens en faisant grimper les couts des produits importés depuis les pays tiers.

Attention néanmoins, la récente flambée du prix du CO2 sur le marché carbone européen - qui a atteint un record historique de 56 € la tonne en mai dernier - pourrait émettre un sérieux frein au projet, incitant les entreprises de pays tiers non soumis à ce dispositif à commercer entre elles avec des représailles sur les exportateurs européens.

Il n’est pas non plus impossible de voir d’autres pays membres de l’OMC mettre en place de tels mécanismes mais rien n’indique que ces derniers reposent sur le modèle de calcul du cout du carbone européen.

En outre, certains pays tiers ne disposent pas d’assez d’informations sur le CO2 qu’ils émettent pour la fabrication de produits et d’autres pourraient les minimiser, il faudra alors s’assurer de l’effectivité de mise en place d’organismes de contrôle.

Un tel mécanisme - pour être compatible avec les règles de l’OMC - devra vraisemblablement s’accompagner d’une limitation progressive des quotas octroyés à titre gratuit dans les secteurs à forte intensité énergétique - d’ores et déjà annoncée pour le secteur de l’aviation dans les 12 premiers projets du green deal - agrandissant inéluctablement le spectre dudit marché.

S’il est trop tôt pour conjecturer l’ensemble des effets du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières sur les entreprises ainsi que sur le commerce international, nous pouvons d’ores et déjà en tirer plusieurs enseignements :

Un développement vraisemblable des filières territoriales ainsi qu’une multiplication des échanges intra-européens
Une nécessité de pédagogie des instances européennes auprès des partenaires commerciaux internationaux
Un agrandissement conséquent du système d’échange des quotas d’émissions carbone
Une augmentation de la tarification carbone