L'hémophilie est un trouble hémorragique grave héréditaire qui se traduit par l’incapacité du sang à coaguler correctement, entraînant dans les cas graves un saignement incontrôlé, qui est soit spontané, soit lié à un traumatisme mineur. Bien qu’une personne atteinte d’hémophilie ne saigne pas plus ou plus vite qu’une personne non atteinte, elle saigne plus longtemps et les saignements récurrents peuvent entraîner une détérioration importante, notamment au niveau des articulations.

On découvre à la fin de 1984 que le chauffage d'extraits du plasma permettait d'inactiver les virus ; il s'agissait alors d'éliminer le virus de l'hépatite B, qui s'est révélé résistant au traitement, et c'est par hasard que l'on a découvert l'inactivation du VIH. Toutefois les capacités de traitement de la France sont insuffisantes, et celle-ci refuse d'importer du sang de l'étranger (en particulier des États-Unis), essentiellement pour quatre raisons :

• pour des raisons éthiques : le sang utilisé par les laboratoires américains sont issue des commerce exploitant les pays pauvres ;
• pour des raisons de qualité : le surchauffage aurait provoqué une diminution d'activité du produit, et amplifié le risque d'apparition d'anticorps anticoagulant circulant chez le receveur;
• pour des raisons financières : l'importation de produits étrangers chauffés produits par les firmes étrangères allemandes et américaines (Behring, Travenol, Alpha, Armour, Cutter et Kabi) représentait un certain cout ;
• pour des raisons stratégiques : l'importation des produits chauffés étrangers, disponible à partir de mars 1983, remettait en cause le monopole du Centre national de la transfusion sanguine sur le marché français des produits sanguins. Or, en 1983, le CNTS ne maîtrisait pas la technique de production des produits chauffés. L'unité de production sera opérationnelle à partir de 1984, mais non prévue, dès le départ, pour éliminer le virus du VIH.

Des produits non chauffés seront donc distribués jusqu'en 1985 uniquement aux hémophiles, les produits chauffés étant réservés aux séronégatifs ou à ceux qui n'avaient jamais été transfusés, en raison de la rareté d'alors des produits. À cause de cela, les stocks de produits non chauffés, d'une valeur de 34 millions de francs, ont été laissés en circulation et remboursés jusqu'au 1er octobre 1985.

L'opinion publique n'est réellement alertée qu'à la mi-1985, lorsque le Premier ministre annonce le dépistage obligatoire des donneurs de sang à partir du 1er août (arrêté du 23 juillet 1985). À ce moment, 95 % des hémophiles sont déjà contaminés.

L'ampleur du drame n'est connue qu'en août 1986, avec la publication d'un rapport du CNTS, qui affirme qu'un hémophile 1/2 a été contaminé, environ 2 000 personnes.
Il faudra attendre cinq ans, pour qu’enfin, par voie de presse, à la fin du mois d’avril 1991, grâce aux investigations de la journaliste Anne-Marie Casteret, la vérité éclate enfin : des lots de sang contaminé (certains par le virus du SIDA) ont été sciemment distribués à des malades hémophiles lors de transfusions au cours de cette même année 1985. Résultat des comptes : la moitié de la population hémophile, soit plusieurs milliers de personnes, infectée par des maladies et plusieurs centaines de personnes contaminées, elles, par le virus du SIDA.