Après plusieurs mois de polémique, un arrêté en date du 27 décembre 2019 relatif aux mesures de protection des personnes lors de l'utilisation de produits phytopharmaceutiques, et entré en vigueur le 1er janvier 2020 est venu fixer de nouvelles distances de sécurité entre les zones traitées avec des produits phytopharmaceutiques par les agriculteurs et les lieux d'habitation. Les distances à respecter sont les suivantes :

- 5 mètres pour les cultures dites basses comme les légumes et les céréales
- 10 mètres pour les cultures hautes, fruitiers ou vignes etc.
- 20 mètres pour les substances les plus préoccupantes

Du fait du confinement imposé par la crise sanitaire actuelle liée au Covid-19, les riverains étaient davantage exposés aux agriculteurs procédant à l'épandage de pesticides à proximité des habitations.

Face à cette situation préoccupante, le Conseil n'a toutefois pas prononcé de décision favorable aux riverains. Dans deux ordonnances rendues le 15 mai 2020, la plus haute juridiction administrative a rejeté deux requêtes qui lui avaient été adressées en urgence, autorisant ainsi les agriculteurs à continuer l'épandage des pesticides à proximité des habitations.

Le premier recours en référé émanant du Collectif des maires antipesticides visait à obtenir l'annulation du décret du 27 décembre 2019 instaurant des distances minimales d'épandage à proximité des habitations. Alors que le gouvernement a retenu dix mètres pour les cultures hautes (vignes et arbres fruitiers) et cinq mètres pour les cultures dites "basses" comme les céréales et les salades, le Collectif des maires antipesticides prône au moins 150 mètres.

A noter que les produits "les plus dangereux" représentant environ 0,3% des substances actives utilisées doivent respecter une distance d'au moins 20 mètres, bien loin des 150 mètres revendiqués par le Collectif des maires antipesticides.

Pour appuyer leurs propos, Corinne Lepage, l'avocate du Collectif des maires antipesticides s'est référée à une étude néerlandaise mettant en évidence des traces de pesticides jusqu'à 250 mètres de leur lieu d'épandage. Elle a également estimé que "les liens entre pesticides et pollution de l'air sont établis et il est tout à fait clair que les populations de zones à l'air pollué présentent une fragilité accrue au Covid".

Le second recours émanant d'un regroupement d'associations (Générations futures, UFC-Que-choisir, France Nature Environnement, Union syndicale Solidaires, la Ligue pour la protection des oiseaux, Alerte médecins pesticides de l'Ouest ou encore Eau et rivières de Bretagne) demandait la suspension de divers textes assouplissant les conditions de validation de dérogations ramenant les distances à trois mètres pour les cultures basses et cinq pour les hautes. Toutefois, elles n'ont pas obtenu du Conseil d'Etat l'annulation de la dérogation faite en mars dernier par le ministère de l'Agriculture à la règle de distance minimum, soit 5 mètres ramenés à 3 mètres. Le juge des référés a en effet estimé qu'une modification à ce régime dérogatoire apportée par le ministère de l'Agriculture rendait la demande sans objet et la en conséquence rejetée, comme l'avait demandé le ministère.

Cette dérogation avait été accordée dans les départements où a été lancée la concertation préalable à l'établissement des zones de non-épandage adaptées au terrain et finalisées par des chartes dérogatoires. On compte 25 départements concernés notamment l'Hérault, la Gironde ou encore le Nord-Pas-de-Calais.

Ces décisions ne seront pas sans conséquence sur les habitants. En effet, l'Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale a affirmé que les pollutions, entre autres aux pesticides, renforcent notre vulnérabilité face au virus.