Le 6 janvier 2020 l’ordonnance n°2020-7 relative à la prise en compte des besoins de la défense nationale en matière de participation et de consultation du public, d’accès à l’information et d’urbanisme a été publiée.
Cette ordonnance a été prise suite à la loi du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense.

Cette ordonnance vient répondre aux besoins de certains projets d’infrastructure intéressant la défense la nationale. En effet, certaines installations comme les dépôts de munitions par exemple nécessitent une protection particulière.
Avant l’ordonnance n°2020-7, ces installations étaient soumises à différents régimes dérogatoires (code de l’environnement, code de l’urbanisme, code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, code des relations entre le public et l’administration, code de la défense).

Cependant, la pratique a montré qu’il n’y avait pas d’harmonisation entre les différents régimes dérogatoires et que l’exemption dispensée par un régime dérogatoire n’entrainait pas d’exemption au titre des autres régimes dérogatoires.
Dès lors, est apparue la volonté de mettre en place une nouvelle procédure unique permettant la mise en œuvre coordonnée au sein du ministère des armées des différentes dispositions permettant de déroger ou d’aménager le droit commun afin de protéger la confidentialité de certains projets.

C’est ainsi que l’ordonnance n°2020-7 du 6 janvier 2020 consacre la notion d’opération sensible intéressant la défense nationale.
L’opération sensible intéressant la défense nationale institue une procédure unique permettant de déroger à certaines règles d’information du public et de garder la confidentialité des projets et plans.

Les principaux objectifs de cette ordonnance sont les suivants :
- « harmoniser, clarifier et compléter les procédures d’information et de participation du public ou de consultation relatives à la réalisation de certains projets, plans, travaux et opérations ayant un caractère dérogatoire ou spécifique justifié par des motifs liés aux impératifs de la défense nationale ;
- prévoir des dérogations à l’obligation d’organiser une enquête publique préalablement à l’institution de certaines servitudes ;
- faire bénéficier les projets et plans dont il est nécessaire de protéger la confidentialité, d’une procédure unique permettant l’application conjointe des dispositions dérogatoires précitées. »

L’ordonnance n°2020-7 du 6 janvier 2020 tend donc à harmoniser les différentes législations dérogatoires au titre des intérêts de la défense nationale et d’en simplifier l’utilisation sans pour autant modifier les règles de fond applicables. Elle préserve également le principe d’information et de participation du public concernant les opérations et projets ayant une incidence sur l’environnement ou sur le droit de propriété conformément à l’article 7 de la Charte de l’environnement.
Elle met en place une législation moins complexe et mieux adaptée au besoin d’information et participation du public et articule les dérogations dont bénéficie le ministère des armées selon trois régimes distincts :

- La soustraction du dossier soumis à l’enquête publique des éléments « nécessaires à la sauvegarde des intérêts de la défense nationale » permettant de limiter strictement le cas d’enquête publique
- Lorsque le nombre d’éléments à écarter est trop important pour permettre la constitution d’un dossier intelligible d’enquête publique, la qualification « d’opération sensible intéressant la défense nationale » permettra de dispenser le projet d’enquête publique. La notion d’opération sensible vient harmoniser les différentes législations prévoyant des dérogations aux procédures d’information et de participations du public prévue par les différents codes en leur donnant une définition unique. La qualification d’un projet, plan, en opération sensible est distincte de celle faite au titre de la protection du secret de la défense nationale et est attribuée au cas par cas, par arrêté du ministre et dans un temps limité, celui de la réalisation de l’opération
- Les installations, aménagements, ouvrages, travaux et activités « soumis à des règles de protection du secret de la défense nationale » donc comportant des informations classifiées au sens du code pénal.


Afin de procéder à l’harmonisation des différentes procédures dérogatoires, l’ordonnance 2020-7 vient modifier les différentes législations concernées.

Un titre IX relatif aux « opérations sensibles intéressant la défense la nationale » apparait dans le code de la défense. Il indique quelles sont les conditions afin que la qualification d’opérations sensibles intéressant la défense nationale soit attribuée et rappelle également quels sont les dispositifs dérogatoires auxquels cette qualification ouvre droit.

Le code de l’environnement est également modifié. Une harmonisation des termes est apportée afin de faire référence à la protection du secret de la défense nationale. Est également prévue la possibilité d’organiser une enquête publique en soustrayant certains éléments nécessaires à la sauvegarde des intérêts de la défense nationale. Les règles de dérogations en matière d’enquête publique sont explicitées.

Le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique s’enrichit de dispositions relatives aux opérations intéressant la défense nationale dont la réalisation suppose une privation de propriété. Sont ajoutées des dispositions prévoyant la possibilité d’organiser une enquête publique tout en ne communiquant pas les éléments nécessaires à la sauvegarde des intérêts de la défense nationale.

Dans le code des relations entre le public et l’administration, la distinction entre les éléments classifiés et les éléments nécessaire à la sauvegarde du secret de la défense nationale est clarifiée.

S’agissant du code de l’urbanisme, la disposition relative à la dérogation d’organiser une enquête publique est complétée.

De plus des dispositions transitoires sont prévues pour les opérations secrètes en cours. Ainsi, les décisions de classement en opérations secrètes intervenues avant la date d’entrée en vigueur de l’ordonnance n°2020-7 sont régies par les dispositions du code de l’environnement et du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique dans leur rédaction antérieure à l’ordonnance.