La ministre de la Justice Nicole Belloubet a proposé le 29 janvier 2020 un projet de loi la création de juridictions spécialisées pour l’environnement afin de répondre au mieux aux atteintes environnementales. Plus précisément, elle souhaite que des pôles spécialisés soient mis en place dans chacune des 36 cours d’appel qui comporteraient également des magistrats dédiés qui interviendront aussi bien au niveau de l’enquête que des procès.

Cette proposition intervient au lendemain de l’assignation de Total en justice. Ce litige engagé par des ONG et des communes pour inaction climatique se fonde sur le devoir de vigilance et sur la Charte de l’environnement.

Pour la garde des Sceaux et la ministre de la Transition écologique et solidaire, le constat est clair : « la justice tient un rôle incontournable de régulation, en prévenant, sanctionnant et réparant les atteintes écologiques ». Néanmoins, « les réponses judiciaires ne sont pas satisfaisantes », tant au niveau des délais de traitement, trop longs, que sur l’inadaptation des réponses.

Cette spécialisation permettra alors d’accélérer les procédures judiciaires, de raccourcir les délais de traitement de ces affaires, car les questions traitées dans ce domaine sont souvent très techniques.

Les tribunaux spécialisés sur les sujets environnementaux pourront prononcer de nouvelles peines ainsi que des travaux d’intérêts généraux dans un but de préservation de l’environnement. L’objectif de ces travaux étant « la sensibilisation des personnes placées sous main de justice aux enjeux écologiques » pour lutter contre la délinquance environnementale.
Les parties auront la possibilité de recourir à des conventions judiciaires qui permettront des réparations plus rapides. Ce type de contrat aura vocation à « intégrer des méca¬nismes de compensations ou de réparations environnementales ou encore des correctifs sous le contrôle d’un garant ». Avec pour finalités de restaurer l’état initial, d’éviter une nouvelle infraction ou de faire vite pour éviter une aggravation ou réitération.

De nouvelles réponses judiciaires entre préservation, réparations des milieux naturels et responsabilisation des acteurs économiques seront possibles.

Cette nouvelle organisation du système judiciaire sera orientée autour de la proximité et la spécialisation.

Dans un premier temps, la justice de proximité, relative aux affaires de la vie quotidienne des français et des élus locaux, doit être confortée. Les ministres précisent que lorsque « plusieurs tribunaux judiciaires existent dans un même département, un tribunal pourra être spécialisé pour ce contentieux comme le permet la loi de pro¬grammation et de réforme de la justice du 23 mars 2019 ».

En effet, cette loi prévoit la possibilité que « certains tribunaux judiciaires pourraient se voir confier par décret, sur proposition des chefs de cour et après avis des chefs de juridiction concernés, des contentieux spécialisés sur l'ensemble du ressort ».

Tandis que les tribunaux existants continueront de traiter les dossiers les plus simples telles que les infractions aux permis de pêche ou de chasse, les tribunaux spécialisés traiteront des sujet plus techniques tels que la pollution des sols ou les infractions à la règlementation des espèces protégées.

Les accidents les plus graves, comme celui de l'incendie de l'usine Lubrizol le 26 septembre 2019 à Rouen, ou les risques technologiques majeurs continueront de relever des pôles interrégionaux spécialisés à Paris et Marseille, les Pôles santé Publique et accidents collectifs.

Le projet de loi sera discuté le 25 février au Sénat. Pour permettre le financement de cette nouvelle justice verte dans un contexte budgétaire restreint, la loi de programmation des Finances publiques prévoit une augmentation du budget de le justice.

Cette réforme voit le jour à l’heure où seulement 1% du contentieux écologique débouche sur des condamnations pénales et 0,5 % sur des actions civiles. Elle permettrait de voir éclore une justice plus efficace face aux défis climatiques d’aujourd’hui.

Cependant, la réforme risque de se mettre à dos les ONG qui pourraient se sentir exclues par ce mode alternatif de règlement d’un litige.