Les dispositifs européens de lutte contre la pollution :

L’Union européenne s’est fixée comme objectif d’améliorer significativement la qualité de l’air en Europe. A cette fin, une série de mesure a été adopté afin de limiter l’émission de certains polluants. Ces mesures s’inscrivent dans le cadre du train des mesures sur la qualité de l’air. Ce dernier consiste en une communication sur le programme « Air pur pour l’Europe » et trois propositions législatives sur les émissions et la pollution atmosphérique. Sa mise en œuvre devrait permettre une amélioration de la qualité de l’air en Europe et une diminution des dépenses de santé pour les pouvoirs publics.

Parmi les mesures adoptées, deux directives, une du 23 octobre 2001 (directive n° 2001/81/CE) et une du 21 mai 2008 (directive n° 2008/50/CE) imposent les seuils d’exposition pour plus d’une quinzaine de polluants atmosphériques dont les particules fines ou le dioxyde d’azote. Elles ont été renforcées par la directive du 14 décembre 2016 relative à la réduction des émissions nationales de polluants atmosphériques. Cette directive fixe plusieurs obligations aux Etats membres, telle que la surveillance des incidences négatives de la pollution atmosphérique sur les écosystèmes par des indicateurs de surveillance, qui devront être communiqués à l’Agence européenne pour l’environnement tous les 4 ans.

Cependant, bien que les politiques européennes en matière de qualité de l’air aient contribué à faire diminuer les émissions, la qualité de l’air ne s’est pas améliorée au même rythme, et l’impact sur la santé publique est considérable. Un rapport de la Cour des comptes européenne du 11 septembre 2018 en atteste. Dans ce rapport elle considère que les normes de qualité de l’air de l’UE sont trop peu contraignantes et trop anciennes. Par ailleurs, bien que la qualité de l’air s’améliore, la plupart des Etats membres ne respectent pas les normes de l’UE en la matière, et n’agissent pas avec assez d’efficacité pour améliorer la qualité de l’air. Plus récemment, par deux communications du 1er mars 2019, l’UE a explicité ses attentes en matière de lutte contre la pollution atmosphérique. Elle a notamment donné ses orientations pour l’élaboration des programmes nationaux de lutte contre la pollution atmosphérique.

Il semble que la position de la Cour des comptes se confirme également au niveau européen.En effet, dans le cadre de son intervention en matière de justice climatique, la Commission européenne a renvoyé la France et cinq autres pays européens devant la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) pour non-respect des valeurs limites de pollution de l’air. Elle a également mis en demeure la France pour transposition incomplète de la directive de 2008, l’invitant à aligner sa législation en matière de qualité de l’air ambiant.



Les dispositifs français de lutte contre la pollution atmosphérique :

L’implication des Etats est primordiale à la réussite des objectifs fixés au niveau européen, de sorte que les réglementations nationales se sont renforcées. En effet, les mesures prises en matière de lutte contre la pollution atmosphérique ne relèvent pas que de l’UE. La France s’inscrit également dans cette démarche, notamment par le biais des zones environnementales (ZE) qui comprennent deux types de restriction de circulation. Les zones environnementales correspondent aux zones à circulation restreinte (ZCR) et aux zones de protection de l'atmosphère (ZPA).


Tout d'abord les zones à circulation restreintes (ZCR), futures zones à faibles émissions (ZFE), correspondent aux territoires dans lesquels est instaurée une interdiction d’accès pour certaines catégories de véhicules polluants ne répondant pas à certaines normes d’émissions, sur des plages horaires déterminées. Leurs modalités de mise en place sont prévues par l'article L.2213-4-1 du Code général des collectivités territoriales qui dispose que ces zones ne peuvent être instaurées que dans les agglomérations et les zones pour lesquelles un plan de protection de l'atmosphère (PPA) a été adopté ou est en cours d'élaboration ou de révision.

Leur mise en place aura lieu par un arrêté pris par l’autorité disposant du pouvoir de police de circulation (maire ou président d’un établissement de coopération intercommunale à fiscalité propre). Cet arrêté fixera les mesures de restriction de circulation applicables (périmètre géographique, modalités horaires, progressivité des règles dans le temps, et dérogations) et les catégories de véhicules concernés. À intérieur d’une zone de circulation restreinte, les véhicules doivent être identifiés grâce à la vignette dénommée certificat qualité de l'air.

Ensuite, les zones de protection de l’air (ZPA) sont des zones géographiques définies, qui peuvent englober plusieurs municipalités et/ou métropoles, où des mesures restrictives temporaires sont activées en cas de pic de pollution atmosphérique. La mise en place d’une ZPA relève de la compétence du préfet comme cela ressort de l’article R.411-19 du code de la route. Les restrictions de circulation fixées par l’arrêté préfectoral ne seront activées qu’en cas de forte pollution atmosphérique. Certaines catégories de vignettes Crit’Air seront alors exclues du trafic afin de réduire les émissions de polluants

Le projet de loi LOM entend renforcer ces dispositifs en facilitant le déploiement des ZFE par l'assouplissement des procédures de mise en oeuvre. De plus, le projet prévoit que les communes dans lesquels les normes de qualité de l’air sont régulièrement dépassées devront mettre en œuvre une ZFE avant fin 2020. Toutes les agglomérations de plus de 100 000 habitants seront par ailleurs tenues d’étudier la mise en place d’une ZFE.



Malgré ces initiatives, les mesures restent insuffisantes c’est la raison pour laquelle la France est également poursuivie devant les juridictions nationales. En juin dernier, le Tribunal administratif de Montreuil (25 juin 2019, n°1802202) a reconnu la carence fautive de l’Etat en raison de l’insuffisance des mesures prises en Ile-de France pour réduire la pollution atmosphérique. Cependant, sa responsabilité n’a pas été engagée, la reconnaissance de la carence fautive n’étant pas suffisante pour ouvrir droit à réparation. Un mois plus tard, le tribunal administratif de Paris a suivi le même raisonnement (4 juillet 2019, n°1709333/1810251/1814405). Ces décisions vont dans le sens d’un arrêt du Conseil d’Etat de juillet 2017 (12 juillet 2017, pourvoi n°394254) selon lequel le respect des valeurs limites de concentration des polluants fixées par la réglementation européenne constitue une obligation de résultat. La haute juridiction avait alors demandé à l'Etat de réviser et de durcir les plans de protection de l'atmosphère.

Allant dans le même sens, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) se penche depuis le mardi 3 septembre sur l'opportunité de condamner à une peine de prison des élus politiques allemand n'ayant pas pris de mesures permettant d'assainir la qualité de l'air à Munich. L'avocat général de la CJUE présentera le 14 novembre ses conclusions. L'avis des magistrats de européen est très attendu en Allemagne, où les interdictions de voitures diesel suscitent la controverse sur l'ensemble du territoire.