L'ordonnance relative à « l’indépendance des activités de conseil à l’utilisation des produits phytopharmaceutiques et au dispositif de certificats d’économie », qui a mis en place la séparation des activités de conseil et de la vente des produits phytosanitaires a été publiée au Journal officiel du 25 avril 2019. Cette disposition organisant leur séparation capitalistique devra être effective au 1er janvier 2021. Retour sur les principales dispositions.

I- Celui qui conseille n'est plus celui qui vend

Ce texte explique qu’il a pour objectif de rendre l’activité de vente « incompatible avec celui de l'activité de conseil à l'utilisation de produits phytopharmaceutiques autre que celle portant sur les informations relatives à l'utilisation, aux risques et à la sécurité d'emploi des produits cédés et de modifier le régime applicable aux activités de conseil, d'application et de vente de ces produits ».

Ainsi, le conseil actuellement délivré aux agriculteurs est majoritairement un conseil opérationnel donné par les conseillers des coopératives et négociants. Ce sont ces acteurs qui vont devoir se réorganiser pour désormais séparer les deux activités.

La séparation concerne toutes les utilisations de produits phytosanitaires, qu'elles soient agricoles ou non. Elle devra se traduire sur le terrain par des interlocuteurs différents mais aussi dans l'organisation interne des coopératives et négociants. Elle devra être appréciée "au regard des participations au capital ou des droits de vote au sein des organes d'administration des établissements concernés et de la composition de leurs organes de surveillance, d'administration et de direction", indique le ministère de l'Agriculture. Des contrôles lors de la délivrance de l'agrément nécessaire à l'exercice des différentes activités s'assureront du respect de cette disposition.

Deux types de conseils aux agriculteurs sont donc institués pour qu'il fasse un choix éclairé. Tout d'abord, le conseil stratégique à l'utilisation de produits phytopharmaceutiques. Formalisé par écrit, il s'adresse à tous les utilisateurs et est obligatoire. De l'autre côté, un conseil spécifique réalisé à la demande des exploitants.

II- Une obligation de conseil stratégique

L’ordonnance précise que « dans toute entreprise utilisatrice de produits phytopharmaceutiques non soumise à l'un des agréments prévus à l'article L. 254-1, toute personne qui décide des traitements phytopharmaceutiques doit être en mesure de justifier s'être fait délivrer des conseils stratégiques selon une périodicité définie par voie réglementaire, dans la limite maximale de trois ans entre deux conseils. Cette justification est exigée pour le renouvellement du certificat mentionné au II de l'article L. 254-3 dans des conditions fixées par décret ».

Des dérogations à l’obligation de conseil stratégique sont prévues, notamment pour les produits de biocontrôle ou quand « l'exploitation agricole au bénéfice de laquelle sont utilisés des produits phytopharmaceutiques est engagée, pour la totalité des surfaces d'exploitation, dans une démarche ou une pratique ayant des incidences favorables sur la réduction de l'usage et des impacts des produits phytopharmaceutiques et figurant sur une liste établie par arrêté conjoint des ministres chargés de l'agriculture et de l'environnement ».

Le conseiller devra s'appuyer sur un diagnostic qui intègre les enjeux spécifiques de santé publique et d'environnement. Dans des conditions fixées par décret, la justification de la délivrance de produits phytosanitaires sera une condition pour le renouvellement des certificats individuels phytopharmaceutiques (certiphyto).

III- Un conseil spécifique à la demande des exploitants agricoles

Le second conseil, le conseil spécifique, vise la réduction de l'usage et des impacts des produits phytopharmaceutiques. Il privilégie ainsi des méthodes alternatives. Egalement diffusé sous forme de préconisation écrite, il préconise des produits phytopharmaceutiques ou des substances actives pour faire face à un bioagresseur donné, notamment en cours de campagne. Il est délivré à la demande des exploitants agricoles. Le conseiller doit également promouvoir les certificats d'économie des produits phytopharmaceutiques (CEPP).

IV- Le dispositif des CEPP pérennisé

Avec ce dispositif, les distributeurs de produits phytopharmaceutiques agricoles, sont incités à promouvoir ou à mettre en œuvre auprès des professionnels des actions pour réduire l'utilisation, les risques et les impacts de ces produits. En contrepartie, ils reçoivent des certificats. L'expérimentation des CEPP devaient initialement durer cinq ans.

L'ordonnance précise qu'à partir de 2022, le dispositif des CEPP inclut tous les produits phytopharmaceutiques utilisables en agriculture, à l'exception des produits de biocontrôle. Les obligés seront étendus aux personnes auprès desquelles la redevance pour pollutions diffuses est exigible. Chaque distributeur se verra attribuer des objectifs de réalisation d'actions annuels pour 2020 et 2021 par l'autorité administrative. A partir de 2022, les périodes seront fixées par décret en Conseil d'Etat, dans la limite de quatre ans.

Sources :
Ministère de l’agriculture et de l’alimentation et consultation du public
Phytosanitaires : l'ordonnance séparant la vente du conseil est publiée, Dorothée Laperche
Vitisphère, Parution de l’ordonnance sur la séparation vente/conseil phyto, Marion Ivali