Une aide avait été promise aux agriculteurs souhaitant se lancer dans une exploitation bio, afin d’obtenir le label « Agriculture biologique ». Ce label public impose aux producteurs un niveau élevé d’exigences environnementales avec notamment l’interdiction de recourir à des OGM et à la chimie de synthèse, et la prise en compte du bien-être animal.

Il était prévu que les agriculteurs souhaitant se lancer dans ce processus de certification bénéficient d’une partie du budget européen de la Politique Agricole Commune (PAC). Ce budget est financé par deux fonds spécifiques : le Fonds Européen Agricole de Garantie (FEAGA), et le Fonds Européen Agricole pour le Développement Rural (FEADER). Cette politique, la plus ancienne de l’Union Européenne en terme budgétaire, vise quatre objectifs principaux :

- stabiliser le marché agricole au sein de l’Union Européenne

- permettre aux consommateurs de bénéficier de prix raisonnables

- augmenter la productivité des agriculteurs et leur assurer un niveau de vie équitable

- assurer la sécurité des approvisionnements

À la PAC devaient s’ajouter des aides de l’Etat pour les agriculteurs français souhaitant se lancer dans une démarche de certification du label « Agriculture biologique », et notamment les « aides à la conversion ». Ces aides visaient à aider les agriculteurs dans ce changement de mode d’exploitation, qui représente souvent un bouleversement dans l’organisation. En effet les pratiques de production conformes au label nécessitent une main d’œuvre plus importante car les procédés de production sont plus lourds, mais les agriculteurs ne peuvent augmenter leur prix pendant au moins deux ans car c’est la durée minimale pour obtenir le label. Plusieurs agriculteurs se sont donc lancés dans ce processus, comptant sur les aides à la conversion promises par l’Etat pour pallier à cette augmentation des charges.

Mais la Fédération Nationale de l’Agriculture Biologique (FNAB) dénonce un désengagement de la part de l’Etat, avec des promesses non honorées : les paiements des aides sont très fréquemment en retard, versés au compte-goutte voire simplement non versés. L’absence de ces aides a mis en difficulté de nombreux agriculteurs qui pour beaucoup ont été contraints de s’endetter voire de cesser leur activité. La demande des consommateurs en produits bio est pourtant de plus en plus grandissante, et le pays doit finalement importer près de 30 % de ses produits bio.

La FNAB a déclaré début 2019 que 25 % des aides pour 2016, 50 % des aides pour 2017 et 100 % des aides pour 2018 n’avaient toujours pas été versées. Sur les 37 000 agriculteurs bio, 20 % sont concernés par ces retards de paiement. Trois agriculteurs ont même décidé d’attaquer l’Etat en justice le 22 février 2019 par une procédure de référé-provision auprès des tribunaux administratifs de Lyon, Nantes et Poitiers. Les demandeurs invoquent des préjudices économiques, dus notamment aux intérêts des crédits engagés faute de versement des aides, ainsi que des préjudices moraux.

En ce qui concerne le motif de ce dysfonctionnement, le ministère a invoqué d’importantes difficultés administratives, qui seraient reliées à des « problèmes informatiques et techniques ».

L’annonce par le président de la République Emmanuel Macron à Gréoux-les-Bains (Alpes-de-Haute-Provence) lors du Grand débat le 7 mars 2019 n’a fait que raviver la grogne des agriculteurs bio : le chef de l’Etat a en effet évoqué la réduction de cinq à trois années la durée des aides à la conversion.

Suite à ces déclarations, le FNAB a alors demandé au gouvernement de se prononcer officiellement sur un éventuel changement de durée de versement d’aides. Le ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation a finalement déclaré que la durée de versement resterait à 5 ans et ne serait pas réduite à 3 ans. Le ministère a par ailleurs précisé : « L’objectif de la France dans son programme Ambition Bio est de passer de 6,5 à 15 % de surface agricole utile d’ici 2022 convertie en agriculture biologique. Cette ambition est également en cohérence avec l’objectif d’avoir 20 % des aliments bio en restauration collective à la fin du quinquennat". La ministère précise que plus de 1,1 milliards d’euros seront mobilisés afin de permettre cette transition, et que cet investissement colossal se justifie par l’ambition de faire de la France le « premier pays bio d’Europe ».