
La réduction de 30% des émissions de gaz à effet de serre : un argument pour une meilleure santé !
Par Anne-Laure TULPAIN
Posté le: 27/09/2010 12:44
L’Alliance pour la Santé et l’Environnement (HEAL) et Health Care Without Harm (HCWH) ont publié le 14 septembre 2010 un rapport sur la relation entre la politique de lutte contre les émissions de gaz à effet de serre et les conséquences sur la santé. Au delà des bienfaits sur le climat, l’objectif de l Europe de réduire les émissions de GES aurait également des répercussions positives sur la santé de la population Européenne.
Ce rapport évalue de manière chiffrée avec les méthodes conformes aux standards développés pour la Commission européenne et en vertu de la Clean Air For Europe (CAFE), les conséquences d’un passage de l’objectif actuel de 20% de réduction des émissions de GES d’ici 2020 par rapport à 1990, à un nouvel objectif renforcé de 30%. Les conséquences du passage à cet objectif ambitieux pour l’Union Européenne, permettraient des économies de coûts de santé qui seraient de 30,5 milliards d’euros.
Ce rapport intervient suite à la communication le 26 mai 2010 de la Commission Européenne sur le passage aux 30% et l’analyse des coûts de cet objectif envisagée par l’Union européenne lors de la conférence de Copenhague sur le climat fin 2009. Elle est prête à faire un effort supplémentaire en allant jusqu'à 30 % à condition que d'autres pays industrialisés promettent d’opter pour des réductions comparables. Des ministres Allemands, Britanniques et Français de l’Energie et de l’Environnement se sont prononcés peu de temps après en faveur de cet objectif.
Le rapport donne des estimations au niveau de l’Union mais aussi des chiffres plus précis concernant 8 pays européens (Allemagne, Pologne, France, Italie, Pays Bas, Belgique, Espagne, Royaume Uni). Les chiffres sont implacables : cela ferait économiser à la France entre 1,2 et 3,5 milliards d’Euros de coûts de santé publique par an.
Les calculs de Health Care Without Harm et Health and Environment Alliance s'appuient sur les chiffres officiels de l'Union européenne concernant trois sortes de polluants (oxyde d'azote et dioxyde de soufre et les particules fines) et sur les statistiques sur la mortalité et sur la maladie. Le lien entre gaz à effet de serre et santé est simple: émettre moins de gaz contribuant au réchauffement climatique aurait pour effet collatéral d'améliorer la qualité de l'air ce qui a des conséquences directes sur la santé. Ainsi, réduire les émissions de gaz à effet de serre de l’Union Européenne, c’est aussi en réduire la pollution atmosphérique et donc les maladies respiratoires et cardiaques.
Paul Brunel, Chargé de projet Energie Climat au WWF-France tient à préciser qu’a coté de l’argument de la création d’emplois additionnels en matière d’énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique ainsi que la baisse de nos dépenses d’importation de gaz et de pétrole, ce rapport ajoute un argument de poids en montrant combien les budgets des systèmes de santé bénéficieraient d’une telle politique climatique.
En Europe, 30 millions de personnes souffrent d’asthme et d’autres maladies respiratoires chroniques selon le Comité Permanent des Docteurs Européens. Les avantages d’une réduction plus accrue des émissions de GES concerneraient, d’abord pour la santé de l’Europe les améliorations de l'espérance de vie, la santé respiratoire et la santé cardiaque, la réduction des admissions et consultations à l'hôpital, sur la prévalence les maladies respiratoires, les crises d'asthme et la réduction des jours de maladie. Ca revient à dire qu’une meilleure qualité de l’air, c’est aussi moins de jours d’activité limitée, moins de prises de médicaments, moins d’hospitalisation et donc autant de dépenses de santé en moins.
Le Professeur Jean-Pierre BESANCENOT explique que « toute augmentation du taux de CO2 dans l'air ambiant a pour conséquence de perturber la purification du sang et que ce phénomène peut atteindre des taux élevés dans certaines grandes villes. Il souligne à quel point l'organisme est en contact direct avec l'air ambiant à travers la peau (moins de 2m2) et les alvéoles pulmonaires (90 m2). Par ailleurs, l'homme adulte inhale dix fois plus d'air qu'il n'absorbe de nourriture solide et liquide, la présence dans l'air de gaz à effet de serre ne peut donc être sans influence sur la santé de l'homme.
Selon le Dr Michael Wilks, Conseiller pour le Climat et ancien président du Comité Permanent des Docteurs Européens (CPME) « Les médecins ont souligné trop timidement les risques pour la santé humaine d’une augmentation des gaz à effet de serre. Ce rapport leur donne l’opportunité de faire ressortir les enjeux médicaux et montre qu’un investissement maintenant peut donner un retour rapide en termes de santé ».
Ces chiffres prometteurs ne sont cependant pas le reflet exact de la réalité, les économies pouvant être encore plus importantes car les chiffres mesurés dans cette étude ne prennent pas en compte l’impact plus large du changement climatique sur la santé causé par des phénomènes et catastrophes naturelles résultant du dérèglement climatique. Cela comprend les inondations, la canicule, la malnutrition due aux terres agricoles asséchées, le déplacement des zones où sévit le paludisme qui sont des exemples de conséquences à long terme du réchauffement climatique sur la santé. Ils ne prennent pas non plus en compte un ensemble de mesures bénéfiques pour la santé, tels que ceux liés à une politique climatique visant à réduire l’usage de la voiture individuelle et à promouvoir davantage la marche ou le vélo, ce qui améliorerait la forme et réduirait les maladies cardio-vasculaires, le diabète, les cancers et les dépressions.
L’Alliance pour la Santé et l’Environnement (HEAL) et Health Care Without Harm (HCWH) précisent que les économies de santé évaluées dans le rapport ne sont seulement que la partie visible de l'iceberg. Cette étude pourrait bien inciter Bruxelles a promouvoir ce nouvel objectif de réduction des émissions de GES en Europe lors du prochain Conseil Européen de l’Environnement qui aura lieu le 14 octobre 2010.