L’année 2017 est sans aucun doute celle de la Responsabilité Sociétale des Entreprises . Si l’on a constaté de nombreuses initiatives et évolutions aux quatre coins de la planète (montée en puissance de l’ISBT, GRI Standards, l’expansion de l’IIRC, Directive Européenne sur la publication extra-financière…), l’actualité RSE de la France est également féconde. Néanmoins, force est de constater que la matérialiser et la concrétisation des politiques RSE en 2018 ne sont palpables que dans les 30% des entreprises du CAC-40.
En effet, après la loi Sapin 2 et la loi sur le devoir de vigilance, l’ordonnance du 19 juillet et son décret d’application du 9 août ont rendu effective la transposition de la directive européenne sur la publication des informations sociales et environnementales.
Désormais, le rapport extra-financier fait place à la déclaration de performance extra-financière. Une nouvelle appellation qui concrétise le passage à une RSE reconnue pour ses apports en matière de création de performance et de valeur, et donc à intégrer au cœur de la stratégie et du modèle d’affaire des entreprises.
Nous avions présenté dans un précédent article, « Du reporting RSE à la déclaration de performance extra-financière », le champ d’application de l’ordonnance.  Nous ajouterons ici, que contre toute attente, , la regrettable incohérence subsiste quant aux statuts concernés, puisque les SCS, SARL et les SAS échappent  toujours et encore à l’obligation, malgré les prises de position de nombreux observateurs dont le rapport publié en mai 2016 par l’Inspection Générale des Finances 

Toutes les entreprises exclues, en vertu des seuils et statuts, pourront bien sûr choisir de publier volontairement un rapport RSE. A ce sujet, la 5ème étude de Tennaxia sur les pratiques de reporting  réalisée auprès de 90 entreprises, montre qu’un nombre croissant d’entreprises publient un rapport RSE de façon volontaire : 37 % en 2018 contre 27 % l’année précédente.

Les nouveautés 
 Notons ici  que le décret ne donne aucun mode d’emploi et déjà de nombreuses entreprises se demandent comment procéder pour prendre en compte ces évolutions.  A n’en pas douter, les meilleures pratiques des entreprises les plus matures établiront un socle de référence sur lequel construire un reporting robuste. En attendant, concernant plus particulièrement l’identification des « risques » auxquels les entreprises sont confrontées, les référentiels internationaux et par là-même l’évolution des pratiques tendent vers la mise en œuvre d’une analyse de matérialité. L’objectif étant d’identifier les enjeux probants et pertinents auxquels l’entreprise est confrontée, en prenant en compte l’avis des parties prenantes internes et externes. Ce faisant, dans un deuxième temps, il conviendra d’apprécier pour les enjeux priorisés le risque encouru ; ce qui sous-tend une méthodologie ad-hoc.  La 5ème étude Tennaxia relève que 52% des entreprises interrogées réalisent une analyse de matérialité qui tend à devenir un véritable outil décisionnel pour le Top management, puisque 76% d’entreprises la présente désormais à leur comité de direction. Signalons ici que le rapport sur le reporting RSE de l’Inspection Générale des Finances, précédemment cité, recommande l’usage de l’analyse de matérialité.
Les informations à produire via le filtre d’une analyse de matérialité et des risques encourus sur les enjeux prioriséss’articuleront  toujours autour des chapitres « informations sociales, environnementales et sociétales » avec des précisions apportées par rapport au précédent décret d’application.
Par ailleurs, on remarque la prégnance des accords de Paris (COP 21) ;  on note une volonté marquée d’engager les acteurs économiques dans la lutte contre le changement climatique et la mise en œuvre de stratégies bas-carbone. Ainsi, le rapport devra produire les informations sur « les postes significatifs d’émissions de gaz à effet de serre générés du fait de l’activité de la société, notamment par l’usage des biens et services qu’elle produit ; les mesures prises pour l’adaptation aux conséquences du changement climatique ; les objectifs de réduction fixés volontairement à moyen et long terme pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et les moyens mis en œuvre à cet effet ».
Si la fin de la double liste des informations exigées des entreprises cotées et non cotées est entérinée par le décret du 9 août, reste que les entreprises cotées devront  néanmoins publier les « Actions engagées pour prévenir la corruption  la Promotion et le respect des stipulations des conventions fondamentales de l’Organisation internationale du travail relatives ,,,,Autres actions engagées en faveur des droits de l’homme ».
Enfin, dans le cadre de la simplification voulue par le gouvernement, la vérification des informations par un Organisme Tiers Indépendant (OTI) ne concernera désormais que les sociétés dont les seuils dépassent 100M€ pour le total du bilan OU 100M€ pour le montant du CA net et  500 M€ pour le nombre moyen de salariés permanents employés au cours de l’exercice.
Le dialogue et la transparence vis-à-vis des parties prenantes figurent au menu ; les entreprises devront publier leur déclaration de performance extra-financière sur leur site internet, et cela pendant cinq années, afin de favoriser la comparabilité des données sur le moyen terme.
 
En définitive
 
Avec ce décret d’application, la RSE change réellement de paradigme. Elle est désormais intrinsèquement liée à la performance globale de l’entreprise et sa capacité à générer de la valeur ajoutée est enfin reconnue.  L’exigence d’indicateurs clés de performance constitue un élément décisif dans sa mise en œuvre et son pilotage, et induit une plus forte implication du board des entreprises. A l’heure de la prolifération des questionnaires extra-financiers auxquels sont soumises les entreprises du monde entier, la future déclaration de performance extra-financière devrait constituer le nouveau cœur de la communication extra-financière  appelée à  adresser les parties prenantes de plus en plus désireuses d’interagir avec les entreprises.