Il y a maintenant un an, la Cour de Cassation a créé la surprise sur une question juridique intéressant le domaine de la construction.

Une jurisprudence constante de la Cour de Cassation retenait que « les désordres affectant des éléments d’équipement, dissociables ou non, d’origine ou installés sur existant, relèvent de la responsabilité décennale lorsqu’ils rendent l’ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination ».

Autrement dit, la garantie décennale des constructeurs était originairement due par le constructeur de l’ouvrage. Actuellement, cette garantie est due également par toute personne intervenant sur l’ouvrage même, à une condition précise.

Cette condition est l’installation d’un élément d’équipement, dissociable ou non (par exemple une pompe à chaleur). Ensuite, la responsabilité s’étend à tous les dommages affectant l’ouvrage mais seulement si ce dommage rend l’immeuble impropre à sa destination.

La perturbation générée par cette nouveauté a mobilisée les assureurs. Ils ont essayé de limiter cette garantie par le biais de l’article L. 234-1-1 II du code des assurances qui excluait du champ d’application de l’assurance obligatoire les « ouvrages existants avant l’ouverture du chantier, à l’exception de ceux qui, totalement incorporés dans l’ouvrage neuf, en deviennent techniquement indivisibles ».

La Cour de Cassation surprend à nouveau se fondant sur une application littérale du texte et a considéré que « ne sont pas applicables à un élément d’équipement installé sur existant ».

Enfin, la Haute Juridiction considère aujourd’hui que les dommages aux biens sont couverts par l’assurante obligatoire de la responsabilité décennale dès lors que les dommages résultent de l’installation sur existant et pas seulement de la construction de l’ouvrage initial.

L’apport a été novateur mais il s’agit d’une dérive jurisprudentielle suivie par deux séries de limites.

La première est que les installateurs d’équipements qui ne sont tout simplement pas au courant de cette jurisprudence s’exposent à des poursuites pénale. L’absence de souscription d’une telle assurance est en effet un délit d’après le code des assurances.

Deuxièmement, le champ des dommages couverts par l’assurance s’élargit aux équipements et dans les conditions précités avec les couts qui vont avec.

La suite était prévisible. Le jeux des pouvoirs dans la quête d’un équilibre entre l’intérêt des assurances et le choix de la Cour de Cassation a abouti, 25 juillet 2018, au « Projet de loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique », dit « ELAN », par le sénat.

Une nouvelle rédaction de l’article L.243-1-1 II du Code des assurances est prévue en ces termes : « II. – Les assurances obligatoires prévues aux articles L. 241‑1, L. 241‑2 et L. 242‑1 ne sont pas applicables et ne garantissent pas les dommages, aux existants avant l’ouverture du chantier, à l’exception de ceux qui, totalement incorporés dans l’ouvrage neuf, en deviennent techniquement indivisibles. »

Modification subtile qui ne donne aucune certitude quant à la suite. Affaire à suivre.



Références.

1/ (Cass. 3e civ., 15 juin 2017, n° 16-19.640 confirmé par Civ. 3e, 29 juin 2017, n° 16-16.637, Cass. 3e civ., 14 sept. 2017, n° 16-17.323).

2/(Cass. 3e civ., 26 oct. 2017, n° 16-18.120)