Encore une conséquence probable du réchauffement climatique : la multiplication des blooms d’algues toxiques. Cela pourrait bien affecter les littoraux français.
Si vous habitez près d’un littoral, notamment en Bretagne, vous connaissez forcément le phénomène des blooms d’algues. La présence de nitrates et de phosphates dans les eaux littorales voire dans certains fleuves et lacs (à cause des déchets de l’agriculture intensive par exemple) a tendance à contribuer à la multiplication des algues marines.
Ce phénomène pose de nombreux problèmes écologiques : diminution de l’oxygène et émergence de zones mortes, émissions de phytotoxiques ou d’hydrocarbures halogénés, nocifs pour la couche d’ozone. Les autorités locales qui y sont confrontées mettent donc en œuvre diverses stratégies pour empêcher la prolifération de ces blooms d’algues. Le problème, c’est que le phénomène pourrait bien être renforcé par le réchauffement climatique.
En effet, un corpus d’études récentes tend à laisser penser que le phénomène des blooms d’algues se renforce lorsque les températures sont plus élevées. En 2014, la NOAA (Agence Américaine d’Observation de l’Océan) mettait en lumière les premières inquiétudes sur le lien entre réchauffement climatique et algues toxiques. En 2015, un groupe de chercheurs spécialisés sur les efflorescences d'algues confirmait ce lien en montrant comment le réchauffement climatique avait d’ores et déjà dans certaines zones contribué à renforcer les blooms. Depuis, la recherche s’est accélérée et plusieurs études spécifiques ont renforcé ces inquiétudes. En 2017, une première étude mettait en évidence le lien direct entre l’augmentation des températures océaniques et la multiplication des algues. En 2018, une autre étude démontrait comment le réchauffement climatique augmentait la présence d’algues potentiellement toxiques dans les eaux arctiques.
Juridiquement parlant, il existe un précédent en l'espèce, c'est le niveau de l'atteinte, le plus souvent scientifiquement déterminé, aux conditions posées qui identifie le préjudice, qualifié par le législateur de « détériorations directes ou indirectes mesurables de l'environnement » (C. envir., art. L. 161-1). C'est le cas pour la mort d'un cheval due à des algues toxiques  , le juge précisant que « l'ensemble de ces éléments ainsi qu'une étude publiée en 2013 dans une revue médicale et relative à l'intoxication au sulfure d'hydrogène sur des plages costarmoricaines permettent de tenir pour établi que la mort du cheval d'un riverain est survenue en raison d'une intoxication provoquée par de l'hydrogène sulfuré dégagé par la décomposition d'un amas important d'algues vertes ; que, dès lors, il existe un lien direct de causalité entre les fautes commises par l'État et la mort de cet animal » (CAA Nantes, 21 juill. 2014, M. B. A, req. no 12NT02416 ).
Ce phénomène s’explique par une conjonction de facteurs qui varient selon les écosystèmes. Pour que les micro-algues se développent, elles doivent bénéficier de certaines conditions particulières : présence de lumière, de nutriments, de CO2, mais aussi ds conditions de température spécifiques. En l’occurrence, il semble qu’en moyenne, les algues se développent plus facilement dans des eaux plus chaudes, ou tempérées. De ce fait, l’augmentation de la température moyenne des océans et des lacs sur la planète serait un paramètre contribuant à la multiplication des blooms.
Mais ce n’est pas tout. Lorsqu’ils ont étudié le lien entre le réchauffement climatique et la présence de micro-algues dans les eaux arctiques, les scientifiques ont mis en évidence une autre relation. À cause du réchauffement climatique, la neige et la glace arctiques sont moins froides. Or en se réchauffant, elles deviennent moins opaques, plus transparentes et laissent passer plus de lumière dans les eaux. C’est cette présence de lumière qui permet aux algues de se développer plus facilement, sans compter l’augmentation de la température.
Le problème c’est que la multiplication de ces algues pourrait bien avoir des effets pervers très complexes à prévoir et à éviter. Par exemple, l’hypoxie (diminution de l’oxygène) provoquée par les blooms d’algues dans l’océan contribue à créer des zones mortes, sans vie organique. Or sans cette vie organique, sans le plancton et le reste des micro-organismes marins, l’océan stocke moins de CO2 et produit moins d’oxygène, ce qui renforce à son tour le réchauffement climatique. C’est donc un cercle vicieux avec des conséquences environnementales potentielles de long terme. Une raison de plus d’avoir une approche globale des problèmes environnementaux et de lutter vraiment contre le réchauffement climatique.

Références

(1) https:// e-rse. Net/ réchauffement – climatique - blooms – algues – toxiques – 270665/
(2) Dalloz
: