La gestion des déchets est aujourd’hui une question complexe, presque taboue. L’activité humaine génère des quantités considérables de résidus dont il faut ensuite assurer l’élimination. Mais face à la prise de conscience de l’enjeu environnemental que représente la gestion des déchets, les solutions d’élimination ne font pas l’unanimité. L’élimination des déchets en France se fait essentiellement par incinération et stockage. Le recyclage ne représente encore qu’une part minoritaire dans la gestion des déchets.

Institués par la loi du 13 juillet 1992 relative à la modernisation de la gestion des déchets, les plans départementaux d’élimination des déchets ménagers et assimilés ont pour finalité une gestion globale et optimisée de l’élimination des déchets par les collectivités locales.

L’élaboration de ces plans, régis par les dispositions des articles L. 541-14 et L. 541-15 du Code de l’environnement, relève de la compétence du conseil général, à l’exception de la région Ile-de-France qui est couverte par un plan régional.

Cet outil de planification se révèle être un instrument efficace dans la gestion des déchets. La loi du 12 juillet 2010 dite « grenelle II », apporte de légères modifications qui laissent néanmoins en l’état certaines lacunes de ce dispositif.

Les enjeux de la planification se concentrent aujourd’hui dans le contentieux administratif lié à la contestation de la création de nouveaux centres de stockage de déchets ou de nouveaux incinérateurs par les communes et les associations de protection de l’environnement. Se pose alors la question de l’interprétation et de la valeur juridique de ces plans.


I. Contenu des Plans Départementaux d’Elimination des Déchets Ménagers et Assimilés (PDEDMA)

Plusieurs documents de planification sont prévus par la loi s’agissant de l’élimination des déchets. Ils concernent des catégories différentes de déchets : plan départemental d’élimination des déchets ménagers et assimilés, plan régional ou interrégional d’élimination des déchets industriels spéciaux, plans nationaux d’élimination de certains déchets dangereux, plan départemental de gestion des déchets du bâtiment (BTP).

Le plan d’élimination des déchets ménagers et assimilés (PEDMA) couvre pour sa part un large spectre de déchets : les déchets des ménages, mais aussi tous les déchets qui y sont assimilés dans la collecte et l’élimination. La catégorie des déchets « assimilés » aux déchets ménagers recouvre pourtant des réalités bien différentes : c’est une notion à géométrie variable suivant les départements.

Dans le cadre du service public, il appartient à la commune de délimiter l’étendue des déchets qu’elle prend en charge, et en matière de planification, la définition des déchets couverts par le plan relève de la compétence du département (sauf en Ile-de-France).

Le PEDMA concourt à la réalisation des objectifs suivants :
- prévenir ou réduire la production et la nocivité des déchets ;
- organiser le transport des déchets pour le limiter en distance et en volume ;
- valoriser les déchets par réemploi, recyclage ou toute autre action visant à obtenir à partir des déchets des matériaux réutilisables ou de l’énergie ;
- assurer l’information du public.

Pour répondre à ces objectifs, le plan réunit dans un document commun les données intéressants l’élimination des déchets afin d’énoncer les priorités à retenir, compte tenu notamment des évolutions démographiques et économiques prévisibles. Ces priorités visent tout particulièrement la création d’installations nouvelles en vue de répondre au plus juste au besoin en capacités de stockage ou d'incinération.

La force contraignante de ces plans réside dans l’obligation de compatibilité. En application de l’article L. 541-15 du Code de l’environnement, les décisions des personnes morales de droit public et de leurs concessionnaires dans le domaine de l’élimination des déchets doivent être compatibles avec les divers plans d’élimination des déchets.

L’objectif est ici d’apporter une cohérence dans la politique menée, tout en préservant les enjeux environnementaux. En effet, l’incinération et le stockage impliquent certains effets néfastes pour l’environnement et il faut donc tendre à réduire le recours à ces méthodes d’élimination des déchets au strict besoin.

Le cadre légal des PDEDMA a été légèrement modifié par la loi dite Grenelle II. Néanmoins, certaines lacunes – révélées par le contentieux – demeurent.


II. Apports de la loi Grenelle II

La loi Grenelle II introduit une nouvelle disposition s’agissant des PDEDMA : ceux-ci doivent fixer une limite aux capacités annuelles d’incinération et d’enfouissement de déchets ultimes, étant précisé que cette limite doit être cohérente avec l’objectif d’un dimensionnement des outils de traitement des déchets par stockage ou incinération correspondant à 60% au plus des déchets produits sur le territoire.

En d’autres termes, les plans dressés ou modifiés à compter de la date de publication de la loi Grenelle II – à savoir le 14 juillet 2010 – devront fixer une limite aux capacités de stockage : 60% maximum des déchets pourront être incinérés ou stockés, le reste devant faire l’objet d’une valorisation matière.

Cette évolution est positive dans la mesure où elle chiffre précisément l’objectif de recyclage à atteindre. Dans ces conditions, aucune installation nouvelle ne pourra être construite si la part de 40% des déchets valorisés n’est pas respectée.

Malgré tout, cet objectif de limitation du stockage et de l’incinération sera difficile à mettre en œuvre dans la mesure où, pour chaque département, ce ne sont pas les mêmes déchets qui sont pris en compte.

La multiplication des documents de planification de l’élimination des déchets n’est pas sans ajouter des confusions quant aux champs d’application. Cette difficulté se réalise essentiellement pour ce qui relève de l’élimination des déchets industriels banals (DIB), qui, s’ils ne sont pas couverts par un PDEDMA, ne sont couverts par aucun plan. L’intégration des DIB dans le PDEDMA relève d’une initiative volontaire des départements ou de la région Ile-de-France.

Le PEDMA perd en efficacité dès lors que son champ d’application varie selon les départements du territoire français. Cette lacune est à l’origine de « batailles » de chiffres dans le cadre de contentieux, pour justifier le besoin ou l’absence de besoin de création d’une installation nouvelle.

La loi Grenelle II ajoute également : « Le plan peut tenir compte, en concertation avec les départements limitrophes, des besoins et capacités des zones voisines hors de son périmètre d’application et des propositions de coopération intercommunale afin de prendre en compte les bassins de vie ».

Cette disposition permet de répondre aux difficultés liées à la limitation du périmètre des PDEDMA. En effet, il est plus efficace de rechercher des solutions d’élimination globales, qui dépassent le seul cadre des départements.

Jusqu’à présent, un département pouvait chercher à répondre à ses besoins propres, sans se préoccuper des capacités existantes dans les départements limitrophes. Sur ce point, il convient de préciser que le principe de proximité ne saurait justifier la construction de capacités d’élimination au-delà du besoin réel.

Les plans antérieurs au 1er juillet 2008 devront être révisés dans un délai de deux à trois ans afin de tenir compte des nouvelles dispositions de la loi du 12 juillet 2010.

Les disparités qui existent entre départements s’agissant du champ d’application des PEDMA rendent complexes l’application des objectifs qu’ils contiennent. Malgré les récentes interventions du législateur, le cadre juridique des PDEDMA comporte donc toujours des imprécisions, ce qui empêche de donner à cet outil de planification pleine efficacité juridique.