L’eutrophisation est un phénomène qui consiste en l’accumulation de nutriments dans l’eau, ce qui engendre la surproduction et la prolifération d’algues qui asphyxient les écosystèmes aquatiques. Ces algues se nourrissent de ces substances nutritives, qui sont principalement le phosphore présent dans les lessives et l’azote présent dans les engrais. Leur prolifération asphyxie les écosystèmes en les privant de l’oxygène dont ils ont besoin pour vivre.

Ce phénomène est davantage observable dans les profondeurs qui sont de facto moins oxygénées. Il provoque la multiplication des bactéries aérobies, du fait du manque d’oxygène. Ces bactéries produisent notamment du méthane et du sulfure d’hydrogène.

Aujourd’hui, ce phénomène qui ne connaît pas de diminution hormis en eau douce, vient de faire l’objet d’une expertise scientifique collective menée notamment par une quarantaine d’experts notamment issus du CNRS ou encore de l’INRA et soutenue financièrement par l’Agence Française pour la biodiversité (AFB). Cette dernière fait suite à une demande expresse du gouvernement et plus précisément des ministères chargés de l’écologie et de l’agriculture.

L’eutrophisation est connue depuis le début du XXème siècle. Malgré de nombreuses actions visant son anéantissement, ce phénomène persiste et ne cesse d’être de plus en plus important. Les premières actions publiques menées en la matière visaient explicitement les pollutions industrielles et domestiques. Elles ont permis de réduire l’eutrophisation dans les rivières et dans les lacs, mais pas dans les mers et les océans.

Comme susmentionnées, les résultats de cette nouvelle étude démontrent une augmentation significative de la concentration d’azote et de phosphore dans les eaux marines. Ce qui aboutit à un triplement des zones « pauvres » en oxygène depuis les années 1960.

Plusieurs mécanismes en sont à l’origine. Les eaux usées qui sont rejetées dans le milieu marin, l’agriculture intensive ou encore le changement climatique. Les experts donnent des pistes à suivre pour éviter la prolifération de l’eutrophisation et notamment des micro-algues toxiques. Toutefois, ils mettent d’office de côté certaines mesures qui ne seront pas assez efficaces ou trop couteuses, comme la réoxygénation artificielle de l’eau ou encore l’introduction d’espèces modifiant la structure des réseaux trophiques.

Ils préconisent donc une amélioration du traitement des eaux usées, avec un traitement spécifique de l’urée, des fèces et des déchets agro-industriels. Cela passerait notamment par l’augmentation du nombre de petites stations d’épuration. Il faudrait également une réduction à la source des déchets ménagers.

Ils mettent particulièrement l’accent sur les modes de cultures. Les régions comptant le plus d’animaux d’élevage devraient recycler leurs effluents, réduire considérablement leur utilisation de fertilisants et l’élevage intensif devrait diminuer de manière significative. Dans le secteur agricole, toute nouvelle structure devrait être obligée de respecter les éléments susmentionnés.

Ils incitent à prendre davantage en compte le changement climatique qui peut être à l’origine de l’amplification du phénomène d’eutrophisation. De modifier les normes relatives à potabilité de l’eau en baissant le seuil de nitrate à 3mg/L d’eau plutôt que 50mg/L comme aujourd’hui.

Enfin, ils appellent à un ciblage géographique particulier des actions publiques en matière de pollution de l’eau, en évitant les mesures génériques à grande échelle, qui traitent toutes les zones de façon similaire, alors que certaines nécessitent un encadrement spécifique.