MESURES COMPENSATOIRES ANNEXÉES AUX PERMIS


L’ordonnance n°2016-1058 du 3 août 2016 a réformé les règles applicables à l’évaluation environnementale des projets, plans et programmes.

Cette ordonnance a modifié l’article L.424-4 du Code de l’urbanisme, cet article concerne les décisions prises à la suite d’une demande de permis. Il dispose que « lorsque la décision autorise un projet soumis à évaluation environnementale, elle comprend en annexe un document comportant les éléments mentionnés au I de l'article L. 122-1-1 du code de l’environnement ».L’objectif de ce texte est de prendre les mesures pour éviter, réduire et si possible compenser les effets négatifs notables du projet sur l’environnement.


Dans l’étude d’impact.

Cette ordonnance impose d’annexer ces mesures compensatoires citées dans l’article L.424-4 du Code de l’urbanisme, mesures qui sont dites « mesures ERC ». Elles s’appliquent pour les autorisations de construire et cette ordonnance fait alors peser des nouveaux risques sur les projets. Ce qui a pour conséquence d’obliger les maîtres d’ouvrage à être plus attentifs aux engagements pris dans l’étude d’impact. A ce titre les engagements pris devront être intégrés annexés au permis de construire.

Pour rappel, l’article L.424-4 du Code de l’urbanisme est l’objet de la transposition en droit interne de la directive européenne n°85/337/CEE du Conseil du 27 juin 1985 relative à l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement. L’objectif de ce texte est que l’auteur d’une décision qui aurait des conséquences sur l’environnement porte à la connaissance du public ces conséquences. Par la suite, la décision prise, l’auteur doit donner des informations complémentaires sur les motifs et les considérations qui ont fait qu’il a pris cette décision.

Avant l’ordonnance de 2016.

Avant l’ordonnance de 2016, les « mesures ERC » visées par le Code de l’environnement devaient figurer dans un document « accompagnant » le permis de construire d’un projet soumis à étude d’impact.

Pour les juges administratifs, le non-respect de cette exigence n’avait pas d’influence sur la légalité de l’autorisation d’urbanisme. Au niveau de la haute juridiction, le Conseil d’Etat par un arrêt en date du 16 octobre 2015 (n°385114) a jugé que l’article L.424-4 du Code de l’urbanisme prévoit uniquement que l’auteur « de la décision, une fois cette dernière prise, porte à la connaissance du public une information supplémentaire explicitant les motifs et les considérations qui l’ont fondé, ne saurait être interprétées comme imposant une motivation en la forme de la décision qui serait une condition de sa légalité ». A ce titre, la jurisprudence administrative estime que la production de ces informations ne doit pas nécessairement intervenir concomitamment à la délivrance du permis de construire. En l’espèce ces informations pouvaient intervenir après la délivrance du permis mais avant la réalisation des travaux.

Depuis l’ordonnance de 2016.

Le nouveau régime de l’article L.424-4 du Code de l’urbanisme casse avec la jurisprudence antérieure. Effectivement depuis l’entrée en vigueur de l’ordonnance de 2016, l’article L.122-11 du Code de l’environnement impose également des précisions supplémentaires concernant la motivation de la décision. A ce titre, cette dernière doit être motivée au regard des incidences notables du projet sur l’environnement. Cet article dispose que « si une requête déposée devant la juridiction administrative contre une décision d'approbation d'un plan ou d'un programme visé à l'article L. 122-4 est fondée sur l'absence d'évaluation environnementale, le juge des référés, saisi d'une demande de suspension de la décision attaquée, y fait droit dès que cette absence est constatée ».

Il faut alors des mesures nécessaires, adéquates et proportionnées. Cette ordonnance impose que l’autorisation soit assortie des prescriptions « ERC » nécessaires, adéquates et proportionnées au regard des impacts environnementaux du projet. Ce qui est assez complexe à concilier avec l’objectif du permis de construire qui est uniquement le respect des règles d’urbanisme.

Du côté des instructeurs, une difficulté se pose, ils doivent apporter une motivation complémentaire sur leur décision d’octroi ou de refus du permis de construire et donc apporter des appréciations sur les mesures « ERC ». Ce qui n’est pas assez aisé pour eux, étant donné que ces services instructeurs ne devaient avant l’entrée en vigueur de cette ordonnance que de vérifier la régularité du permis quant aux règles d’urbanisme. De ce fait, une augmentation du contentieux pourrait voir le jour tendant à démontrer l’insuffisance ou le défaut de motivation de l’autorisation de construire.

La difficultés concernant les mesures compensatoires.

Tout d’abord la nature juridique de ce document reste encore inconnu car n’est toujours pas précisée, il est de même pour son contenu. Ce qui laisse une marge d’appréciation de l’autorité administrative compétente et du juge administratif en cas de recours.

Il faut savoir que la méconnaissance de l’obligation d’annexer de telles mesures est susceptible d’entacher d’illégalité le permis de construire octroyé.