L’action de groupe est un nouveau mécanisme introduit en France par la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation qui a l’objectif de permettre à plusieurs personnes placées dans une situation similaire de se regrouper pour obtenir une réparation devant les tribunaux civils ou administratif. Ces actions sont possibles en matière de consommation, en matière de santé et en matière environnementale.
Toutefois, certains régimes spéciaux de responsabilité peuvent susciter des doutes lors de la mise en œuvre de ces actions. Est-il possible d’utiliser l’action de groupe pour obtenir réparation dans le cadre de la responsabilité du fait d’un produit défectueux ?
La responsabilité du fait des produits défectueux est régime de responsabilité objective lequel ignore la distinction entre la responsabilité contractuelle et la responsabilité délictuelle. La victime d’un produit défectueux, soit un consommateur soit un professionnel, peut demander la réparation de son préjudice au producteur du produit sans besoin d’avoir un contrat avec lui. Cependant, il est nécessaire que le produit ait été mise en circulation après le 21 mai 1998, date d’entré en vigueur de la Loi du 19 mai 1998. Les produits que peuvent faire l’objet de ce régime de responsabilité sont tous les biens meubles, y compris les biens naturels et les produits du corps humain.
Par la responsabilité du fait des produits défectueux il est possible d’avoir la réparation des dommages qui résultent « d’une atteinte à la personne » ainsi que « les dommages supérieurs à un montant déterminé par décret, qui résulte d’une atteinte à un bien autre que le produit défectueux ». Donc, pour envisager la responsabilité du fait des produits défectueux il faut que trois conditions soient présentes : le défaut du produit qui s’entend de l’atteinte à la sécurité à laquelle on peut légitiment s’attendre, le dommage et le lien de causalité entre les deux.
Ce régime a comme avantage pour les victimes l’inversion de la charge de la preuve (la victime est dispensée de prouver la faute du producteur et celui que devra démontrer qu’il n’est pas coupable) et le fait que les clauses limitatives de la responsabilité qui peuvent être inclus dans le contrat avec le producteur, sont, en principe, exclues de ce régime, alors le producteur ne peut s’exonérer que dans les cas énumérés par le code civil.
Tenant en compte ces informations sur la responsabilité du fait des produits défectueux et les actions de groupe, nous pouvons désormais analyser l’application de ce régime dans les domaines de cette action. En matière de consommation, les préjudices de consommateurs ne peuvent faire l’objet de cette action que dans le cas où ils sont des préjudices patrimoniaux résultant de dommages matériels sur un bien distinct du produit défectueux. Les consommateurs victimes d’atteintes à la personne du fait du défaut de sécurité de produits de consommation ne peuvent pas s’utiliser de cette action pour obtenir une réparation, et non plus les consommateurs victimes des dommages patrimoniaux purs. Donc, l’utilisation de l’action de groupe dans le domaine de consommation est très limitée vu qu’il est très difficile de regrouper les conditions et le fait que le recours de cette d’action est incompatible avec l’étude au cas par cas, lequel est nécessaire pour déterminer le préjudice dans la matière de consommation.
Dans le domaine des produits de santé, l’action de groupe prévoit deux phases : (i) un jugement sur la responsabilité et (ii) la procédure individuelle de réparation des préjudices et la procédure collective de liquidation de préjudice. La victime d’un dommage patrimonial pur ne peut pas utiliser cette action et devra engager une action individuelle. En matière des préjudices liés aux défauts de sécurité de produits environnementaux, l’action de groupe est possible dans le cas où un dommage à l’environnement résulte du défaut de sécurité d’un produit défectueux. La définition de produits, dans ce cas, peut inclure l’électricité et les pesticides ou herbicides qui sont des produits nocifs pour l’environnement.
En conclusion, néanmoins l’objectif de l’action de groupe est de faciliter la réparation des préjudices, il est difficile de la mettre en œuvre en raison d’incompatibilité entre les régimes existant en droit français.
Source : Ozan AKYUREK et Virginie BALUSSEAU. Les incertitudes des actions de groupe en matière de responsabilité du fait des produits défectueux. Petites affiches, n° 125 du 23 juin 2017.