Par une publication du 27 juin 2017, l’agence de protection de l’environnement des États-Unis (EPA) ; ainsi que et le corps des ingénieurs de l’armée américaine (chargé notamment de l’évaluation des demandes de permis de construire sur le périmètre des eaux fédérales, et notamment les zones humides) ont conjointement annoncé leur souhait d’annuler la réglementation sur l’eau (Clean water rule) adoptée en 2015 sous la présidence Obama.

Cette réglementation, qui visait à renforcer le périmètre des zones protégées par le Clean Water Act, de 1972, loi sur l’eau des États-Unis, étendant la protection de cette loi sur des milliers de kilomètres carrés de zones humides qui contribuent à filtrer l'eau potable, était dans le viseur du président Trump.

En effet, en février 2017, ce dernier avait adopté une ordonnance appelant l’EPA à démanteler le Clean Water rule en vue de restreindre le périmètre des eaux protégées par la loi.

Ce périmètre, extensif, donnant de très larges prérogatives d’intervention à l’EPA et au corps des ingénieurs, suscitait depuis longtemps une vigoureuse opposition de la part d’une partie du camp conservateur et notamment de Scott Pruitt, nommé nouvel administrateur de l’EPA par Donald Trump. Cette régulation était vue selon lui comme « la plus grande entrave a la propriété privée des temps moderne », une mesure nuisible au développement économique, marque d’un État fédéral trop interventionniste, voulant réguler jusqu’à la moindre goutte d’eau.

Il est vrai que la notion d’« eaux navigables » telle qu’elle est libellé par le Clean Water Act, dans son article 404, ne se cantonne pas aux lacs et rivières effectivement navigables, cette notion a en effet évolué depuis 1972 pour, au fur et à mesure des interprétations de la loi, et des changements de gouvernement, recouvrir toutes les « eaux des États-Unis » soient les ruisseaux, marais, mares, rivières créés occasionnellement par des pluies importantes, zones humides. ..Dès l’instant que ceux-ci avaient une connexion avec les eaux navigables.

Néanmoins ce dernier critère restait disputé, et sujet à division, en particulier devant la cour suprême : ainsi en 2001 la décision Solid Waste Agency of Northern Cook County (SWANCC) v. U.S. Army Corps of Engineers, marquait le premier recul, les juges dit conservateurs jugeant, en majorité, que les zones humides isolées des voies navigables ne rentraient plus dans le cadre de protection du Clean Water Act.

En 2006 à l’occasion de l’affaire Rapanos Vs USA en 2006, les juges conservateurs, et notamment le juge Antonio Scala, souhaitèrent aller plus loin et créer une nouvelle définition des zones d’eau concernées beaucoup plus restrictive, estimant que l’actuelle laissait une trop grande latitude à l’agence fédérale, et la possibilité d’abus d’autorité répétés de cette dernière à l’encontre des propriétaires fonciers et entrepreneurs souhaitant développer des projets sur ces zones protégées.
Aucune majorité d’opinion ne se dégageant d’un débat très polarisé, le mot de la fin était pour le juge Kennedy, estimant que, pour être couverte par la loi, une zone d’eau devait avoir «un lien significatif» avec des voies d’eau plus importantes.

Cette interprétation pour le moins floue avait ouvert la voie à de nombreux contentieux dans les 8 années suivantes, et plusieurs tentatives, ayant toutes échoué, de faire passer une nouvelle réglementation devant le congrès, afin de sécuriser le périmètre de couverture de la loi sur l’eau.

Le Clean water rule, adopté en 2015, et inspiré des lignes de conduite imposées à l'EPA par l’administration Obama, venait enfin apporter la clarification nécessaire sur les affluents et eaux adjacentes couvertes par le CWA, et offrait une couverture de protection très large. Trop sans doute pour la nouvelle présidence, ainsi malgré sa popularité, cette réglementation aura fait long feu.

Le projet de Donald Trump vise désormais à revenir largement en arrière en ce qui concerne le champ du Clean Water Act, en le restreignant aux seules eaux réellement navigables, suivant en cela l’interprétation stricte qu’en avait fait à plusieurs le juge Antonin Scalia, décédé peu de temps avant l’élection de Donal Trump.

La décision de l’EPA suscite les craintes des associations de protection de l’environnement, mais également des professionnels de santé : priver les eaux adjacentes, affluents, et zones humides de protection fédérale contre les pollutions, alors qu’elles sont connectées aux eaux navigables, et que tous les États fédérés n’ont pas une législation locale préventive en la matière, fait courir un risque énorme pour la santé des citoyens américains.