Le 8 février 2017, la Cour de cassation apporte des précisions sur l'indemnisation d'un héritier, à l'égard de l'Oniam, au titre de son préjudice d'accompagnement. Un patient a présenté une infection nosocomiale à la suite de la réalisation de deux opérations par un chirurgien vasculaire et endocrinien au sein des locaux d’une clinique Saint-Charles en mars et juillet 2007.La prise en charge de cette infection a été assurée par le praticien jusqu'à l'admission du patient dans un centre hospitalier universitaire et à la réalisation, en octobre 2007, d'une amputation fémorale bilatérale ayant entraîné un déficit fonctionnel de 70 %. Le patient est décédé en avril 2010, après avoir sollicité une expertise en référé. Ses enfants et héritiers ont assigné la clinique en responsabilité et indemnisation de leurs préjudices ainsi que de ceux éprouvés par leur père, puis l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (l'Oniam) en intervention forcée et mis en cause la caisse qui a sollicité le remboursement de ses débours. La clinique a appelé en garantie le praticien en invoquant une faute de ce dernier dans la prise en charge de l'infection. Le 15 avril 2015, la cour d’appel de Poitiers a rejeté la demande de l’un des héritiers à l'égard de l'Oniam au titre de son « préjudice d'accompagnement ».

La cour de cassation rappelle plusieurs règles essentielles contenues dans la loi n° 2002-1577 du 30 décembre 2002, qui a partiellement amendé les dispositions initiales en matière d'infection nosocomiale sous la pression des assureurs qui jugeaient le poids de l'indemnisation trop lourd. Du fait de cette décision, le régime d'indemnisation diffère selon la gravité du dommage. 

Si l’infection nosocomiale à provoquer chez la victime une incapacité permanente à l'intégrité physique ou psychique inférieur ou égal à 25 % et dans ce cas, le régime d'indemnisation classique s'applique. Si les conditions de l’indemnisation au titre de la solidarité nationale sont réunies et en l’absence de responsable désigné, alors la victime est indemnisée soit par l’assureur dont la responsabilité sera établie, soit par l'Office national d'indemnisation (ONIAM),
Si comme dans la décision rapportée, l'infection nosocomiale est à l'origine d'un dommage correspondant à un taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à 25 %, c'est alors l'ONIAM qui indemnisera la victime, indépendamment de l'existence ou non d'une responsabilité civile (CSP, art. L. 1142-1-1, 1°) Donc, la l’ONIAM prend en charge au titre de la solidarité nationale que les infections nosocomiales les plus graves. En ce sens, les plus dommages les plus lourds sont à la charge de la collectivité tandis que les dommages les moins graves sont à la charge des établissements et plus particulièrement à la charge de leurs assureurs.

Toutefois, au terme de l’article L1142-17, al 7 du Code de la santé publique, une exception est admise en cas de faute établie de l’assuré à l’origine du dommage.

Ainsi la Cour de cassation va en l’espèce, faire jouer cette exception, la faute du praticien ayant réalisé l’opération à la suite de laquelle la victime décédée avait contracté une infection nosocomiale ayant concouru, selon l’appréciation des juges du fond, pour 40% à la survenance du dommage. En conséquence, après avoir rappelé que dans ce cas et au titre d'une telle faute, les tiers payeurs ayant versé des prestations à la victime de dommages consécutifs à une infection nosocomiale peuvent exercer une action subrogatoire contre l'établissement où cette infection a été contractée ou contre le professionnel de santé ayant pris en charge la victime, dans la limite de leur part de responsabilité dans la réalisation du dommage, elle approuve en ce sens les juges du fond d’avoir jugé que le recours de l’ONIAM à l'encontre du praticien pouvait être exercé mais seulement dans la mesure du pourcentage de sa responsabilité.
Enfin, la Cour de cassation rappelle qu’en vertu des dispositions de l'article L. 1142-1, I, alinéa 2, et L. 1142-1-1, 1°, du Code de la santé publique, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère, les établissements, services et organismes mentionnés à l'article L. 1142-1, I, alinéa 1er du Code de la santé publique, sont tenus, sur le fondement de leur responsabilité de plein droit, de réparer l'ensemble des dommages résultant d'infections nosocomiales, qu'ils aient été subis par les victimes directes ou indirectes et que, lorsque les dommages résultant de telles infections atteignent le seuil de gravité fixé par l'article L. 1142-1-1, 1° du Code de la santé publique, leur réparation incombe, dans les mêmes conditions, à l'ONIAM, en leur lieu et place. Donc « le préjudice d’accompagnement » lequel a pour objet d’indemniser les bouleversements que le décès de la victime directe entraîne sur le mode de vie des proches au quotidien, les troubles dans leurs conditions d’existence du fait qu’ils partageaient une communauté de vie effective et affective avec la victime, devait être intégralement pris en charge par l’ONIAM.

(Civ, 1ère 8 février 2017 n°15-19.716)