Le 14 juin 2017 le Parquet national financier a requis de lourdes peines à l’encontre des prévenus de l’affaire « Crépuscule », une affaire d’escroquerie en bande organisée à la TVA sur le marché des quotas d’émission de CO2.

Ce procès vise à juger quatorze prévenus suspectés d’avoir pris part à l’escroquerie en bande organisée la plus importante enregistrée, dans un temps record. L’arnaque s’est produite dans les années 2008 et 2009 et aurait coûté au total 1,6 milliard d’euros de perte pour le fisc français et 5 milliards d’euros au niveau européen selon Europol.

Dans l’affaire « crépuscule » du nom de la société opérant sur le marché d’échange des quotas, le montant de la TVA éludé atteint les 146 millions d’euros de fraude à la taxe carbone mais ne constitue que l’un des nombreux volets d’une escroquerie qualifiée par la Cour des Comptes « d’arnaque du siècle ».

Cette escroquerie consistait à acheter, par l’intermédiaire d’entreprises indépendantes, des quotas hors taxe à l’étranger pour les revendre en France en ajoutant 19,6% de TVA et au lieu de reverser la TVA facturée à l’État les entreprises blanchissaient l’argent grâce à diverses méthodes. Répétée à de multiples reprises cette pratique permettait aux sociétés de récupérer à chaque opération les 19,6% de TVA.

L’escroquerie a été facilitée par plusieurs éléments. Tout d’abord les formalités pour créer une entreprise de quotas carbones sont limitées, ensuite les quotas carbones sont par définition immatériels et ne laissent pas de traces. Enfin le régime de perception de la TVA n’a pas été suffisamment sécurisé pour éviter les fraudes sur des transactions en temps réel.

Le Parquet national financier a requis des peines allant jusqu’à 12 ans de prison et un million d’euros d’amende à l’encontre des principaux prévenus. La peine la plus lourde a été requise contre Richard Touil, l’un des prévenus en fuite. Une amende de 16,5 millions d’euros a également été requise à l’encontre de la banque turque Garanti Bankasi poursuivie pour blanchiment d’argent.

Des peines importantes qui viennent confirmer les premiers jugements dans cette « saga » puisque la Cour d’appel de Paris a été amenée à rejuger un autre volet de cette fraude, dans un dossier portant sur 283 millions d’euros de TVA éludées. Dans cette affaire le Tribunal Correctionnel de Paris avait condamné Arnaud Mimran et Marco Mouly à huit ans de prison et 283 millions d’euros de dommages et intérêts.

La justice a pris la mesure de la fraude et des commissions rogatoires internationales ont été lancées en Suisse, à Hong Kong, au Luxembourg, à Chypre, au Monténégro, et en Israël. Au total une quinzaine d’enquêtes distinctes ont été ouvertes.

Une problématique se pose cependant sur la responsabilité de l’État dans cette fraude. En effet dès la fin de l’année 2008 le risque de fraude à la TVA est jugé « très élevé » et malgré plusieurs alertes de Tracfin le service de renseignement du ministère de l’économie, la fraude va pourtant continuer jusque fin 2009, date à laquelle la TVA sur les échanges de quotas va être exonérée en France.