Les touristes souhaitant visiter l’île d’Oléron pourraient devoir mettre la main à la poche s’ils veulent emprunter le viaduc d’Oléron avec leur véhicule….

Le Conseil Constitutionnel vient en effet de confirmer la légalité, dans une décision du 24 mai 2017 faisant suite à une question prioritaire de constitutionnalité, de l’article L321-11 du code de l’environnement, instituant la possibilité pour les collectivités d’instaurer un droit départemental de passage (plus communément appelé « écotaxe ») sur les ponts reliant le continent aux îles. Or cet article sert de base légale de la décision, prise par la communauté de l’île d’Oléron, avant aval du conseil départemental de Charente-Maritime, de rendre payant l’usage du pont

Le recours à la fiscalité environnementale trouve sa source dans le principe du « pollueur payeur inscrit dans la Charte de l’environnement, partie intégrante du bloc de constitutionnalité depuis 2005, et dans l’article L.110-1 du code de l’environnement. L’article L312-11 a été inscrit dans le code de l’environnement à l’occasion de la loi dite « Barnier » » du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement (art. 49).

Destiné initialement au financement de mesures de protection et de gestion des espaces naturels, et plafonnée à 3,05 euros par véhicule, cette disposition a ensuite été amendée par la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013, laquelle déplafonnait la contribution départementale et élargissait son assiette (elle n’était plus destinée qu’à la seule préservation de l’environnement; mais aussi au développement de transports en commun fonctionnant avec des véhicules propres)

Le 17 décembre 2014, après des années de débat sur le sujet, vingt-trois élus de la communauté de communes de l’île d’Oléron sur trente-cinq votaient en faveur d’une délibération consistant à demander au conseil général (renommé « conseil départemental » à partir de mars 2015) de la Charente-Maritime la mise en place d’un droit départemental de passage, s’inspirant de ceux établis par les intercommunalités insulaires de l’Île de Ré et de Noirmoutier. Il est à noter qu’un péage avait déjà été mis en place pour rallier Oléron avant 1991.

Cette « écotaxe » ne devaient concerner que les véhicules en provenance du continent, et non pas ceux des résidents permanents, avec une tarification allégée pour les résidents secondaires Cette taxation, palliant à la baisse des dotations communales, avait pour but de financer l’aménagement du territoire et la préservation des espaces naturels (notamment le renforcement des ouvrages de défense des côtes). Chaque jour, 15 000 véhicules franchissent en effet le pont gratuitement, et 30 000 pendant la saison touristique.

Néanmoins la mesure se voit contestée par une association de riverains, plaidant pour la gratuité du passage, craignant son impact négatif sur la manne touristique. Après avoir obtenu à deux reprises l’annulation par la tribunal administratif d’un référendum sur la question de l’écotaxe, elle soulève deux points litigieux : d’une part la méconnaissance du principe d’égalité devant les charges publiques, en raison de tarifs modulés selon l’origine géographique, insulaire ou non des usagers et du type de véhicule, ces critères n’étant « ni objectifs ni rationnels » au regard de la finalité de diminution de l'impact environnemental du transport routier poursuivi ; d’autre part une atteinte disproportionnée au principe de liberté d’aller et venir, en raison du montant du droit de passage.

Or, ces critères étant conformes à l’article L321-11 du code de l’environnement, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013, l’association souhaite questionner la conformité de la norme à la constitution. Le Conseil d’État, saisi après plusieurs recours devant le juge administratif, fait droit à la demande et renvoie vers le Conseil Constitutionnel, avec le risque qu’en cas d’inconstitutionnalité du texte, toutes les mesures analogues, notamment les droits de passage pour gagner l’île de Ré et de Noirmoutier, deviennent illégales.

Sur le premier grief, le Conseil estime que la modulation de tarif est possible, autant en fonction du type de véhicule, que de son origine géographique, dans le premier cas parce que, au regard de l'emprise au sol et du gabarit des véhicules, l’impact sur le trafic routier et l’environnement diffère selon le « profil » du véhicule, dans le second cas parce que la fréquence de passage des usagers de l’ouvrage d’art domiciliés ou travaillant dans l'île, les place dans une situation différente des autres usagers. La finalité du législateur étant de limiter le trafic routier dans les îles maritimes reliées au continent par un ouvrage d'art en vue de préserver l'environnement, cette modulation est donc légitime.

Et c’est également cette finalité, constituant un motif d’intérêt général, qui légitime l’atteinte à liberté d’aller et venir, selon le conseil, le montant maximum du droit de passage n’étant, de fait, pas considéré comme excessif par lui.

Les estivants ont néanmoins encore une sursis : la constitutionnalité de la loi ne présume ni l’aboutissement du référendum local sur l’écotaxe, dont le périmètre, jugé trop restreint, est encore contesté, ni de la décision finale du conseil départemental d’instituer la mesure.

En revanche pour les vacanciers souhaitant passer leur séjour à d’ile de Ré ou à Noirmoutier, une certitude : ils devront s’acquitter d’un droit de passage….