La loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 vise à protéger la biodiversité, la nature et les paysages, notamment au travers de la création d'un régime de responsabilité en cas de préjudice écologique, et également au travers d'un régime de compensation des atteintes à l'environnement et d'obligations réelles environnementales. De plus, la loi a créé un principe de non-régression.

Le Conseil d’Etat a donné des précisions sur la notion du « préjudice écologique », dans une décision du 31 mars 2017. Si l’exploitant d’une ICPE démontre qu’il existe une atteinte à l’intérêt public liée au risque de préjudice écologique cela établie l’urgence à suspendre l’exécution d’une décision de refus d’enregistrement d’une ICPE pour une installation de stockage de déchets inertes. En l’espèce, il s’agissait du report de la clientèle du site vers d’autres sites plus éloignés en cas de fermeture de ce site de stockage comme cause de préjudice.

Une société sollicite l'enregistrement au titre de la réglementation des ICPE d'une installation de stockage de déchets inertes, auprès du préfet compétent. Dans un arrêté du 15 juillet 2016, ce dernier refuse et décide de l’arrêt définitif de l'installation de stockage de déchets et de la remise en état du site. Selon le préfet, l’installation projetée est incompatible avec le Plan local d'urbanisme (PLU) en vigueur dans la commune d’implantation.

La société demande au Tribunal administratif d’annuler cette décision. Dans l’attente de la réponse à cette demande, elle a demandé la suspension de son exécution en raison d’un risque pour l’intérêt public occasionné par la mise à l’arrêt de l’installation de stockage de déchets inertes. La décision de suspension d’un acte administratif nécessite la réunion de deux conditions que sont l’urgence et l’existence d’un doute sérieux sur la légalité de la décision. Le Tribunal administratif rejette la demande en estimant que la condition d’urgence fait défaut.

L'affaire est portée devant le Conseil d'Etat par la société.

- Sur la condition d'urgence : Le Conseil d'Etat a décidé que l’arrêt définitif de l'exploitation impacterait financièrement la société et les emplois en découlant, ainsi que l'intérêt public lié à la présence des sites de stockage de déchets inertes, insuffisants dans la région concernée. Il juge que ces éléments ainsi que le préjudice écologique qui risque d'être causé par le report de la clientèle du site vers des sites plus éloignés justifient la condition d'urgence à suspendre l’arrêté préfectoral de refus d’enregistrement. En effet, le préjudice serait causé notamment par des dépôts sauvages ou par les transports supplémentaires qu'il conviendra de réaliser pour acheminer ces déchets vers d'autres sites.

- Sur l’existence d’un doute sérieux sur la légalité de la décision : Le Conseil d’Etat relève que le PLU de la commune d’implantation de l’installation de stockage de déchets inertes en vigueur lors de la demande d’enregistrement par la société, prévoit que sont autorisés les aménagements et installations nécessaires aux services publics ou d’intérêt collectif, en vue notamment de la gestion et de la mise en valeur des espaces naturels.

Le préfet a décidé que l’installation était incompatible avec le PLU malgré son intérêt public, en utilisant comme argument un doute sur la légalité de sa décision de refus d’enregistrement de l’exploitation.

En conclusion, le Conseil d’Etat annule le jugement du Tribunal administratif et suspend ainsi provisoirement l'exécution de l'arrêté du 15 juillet 2016. L’arrêté n’étant pas annulé, l’exploitant de l’installation ICPE soumise à enregistrement n’est pas autorisé. Il revient au juge de se prononcer indépendamment sur ce point.

Sources :
Arrêt du Conseil d'Etat, n°403297, du 31 mars 2017