Les 3 et 4 avril 2017, le Parlement européen s’est penché sur ce qui ressemble à un gros pavé dans la mare. Il s’agit d’un débat sur la possibilité d’encadrer le recours à l’huile de palme et notamment afin de limiter la déforestation en Asie du Sud-Est. Les eurodéputés ont du se prononcer concernant une résolution à ce sujet, pour faire face à une situation qualifiée de « critique », et dans laquelle l’Union européenne à sa part de responsabilité. En effet, l’Europe est le deuxième plus grand importateur mondial de cette huile contribuant ainsi lourdement à la plus rapide et la plus grande déforestation connue à ce jour.

L’huile de palme, à peine utilisée il y a encore une trentaine d’années, est aujourd’hui présente dans de nombreux produits alimentaires de notre quotidien, comme la margarine, les chips, la pâte à tartiner, les biscuits, mais également dans les cosmétiques, les détergents ou les biocarburants. Ainsi, en 2014, près de la moitié de l’huile de palme consommée en Europe se trouvait dans le diesel.

Cette consommation contribue à la déforestation et à la disparition d’espèces naturelles dans les régions tropicales où elle est cultivée. Alors que les pratiques de cette monoculture se sont fortement dégradées dans les pays producteurs, principalement en Indonésie et en Malaisie, mettant en péril les populations locales et les espèces animales, la consommation d’huile de palme a explosé en Europe ces dernières années. Face à une telle consommation c’est un réel enjeu environnemental qui est en train de se jouer.

Certains pays producteurs d’huile de palme, comme la Malaisie, l’Indonésie et la Colombie ont tenté d’empêcher la mise en œuvre de telles mesures et demandé dans une lettre aux eurodéputés de voter contre le rapport.
Le principal producteur d’huile de palme en Indonésie, l’entreprise Golden Agri-Resources (GAR), a fait savoir qu’il s’opposait à ces limitations. « L’UE nous pousse déjà à produire de manière plus responsable à travers ses exigences de production durable », a indiqué la présidente de GAR. « Je pense que l’UE peut obtenir plus de résultats en soutenant le développement durable. »


A l’occasion de cette session plénière à Strasbourg, les députés européens devaient se prononcer sur un projet de résolution demandant à l’Union européenne de prendre de nouvelles mesures pour une production plus durable de cette huile alors que son utilisation pourrait doubler d’ici 2050. Le texte demande également de cesser complètement d’ici à 2020 l’utilisation de l’huile de palme dans les biocarburants et de développer une certification pour les produits contenant de l’huile de palme produite de manière « socialement responsable ». Parallèlement l’idée est aussi de créer une traçabilité efficace des produits entrant sur le territoire européen afin d’éviter l’arrivée d’huiles illégales ou non durables, ou encore un système d’étiquetage unique pour l’ensemble des consommateurs. Si les ONG rejoignent les députés sur l’ensemble des propositions, elles insistent cependant sur l’urgence de la situation : « il faut agir vite […] et mettre en place un plan contraignant à une échelle européenne. C’est la Commission qui doit mettre en place un contrôle à grande échelle », rappel Sébastien Risso de Greenpeace Europe.

« Le Parlement européen doit être très ambitieux sur la question. Nous devrions clairement dire à la Commission que nous souhaitons développer des biocarburants qui ne détruisent pas la vie des gens et ne mettent pas en danger la biodiversité », souligne Katerina Konečná (députée tchèque du groupe de la Gauche unitaire européenne / Gauche verte nordique en charge du dossier au Parlement.


Ainsi les députés européens ont massivement voté pour l’adoption du rapport d’initiative visant à limiter le recours à l’huile de pale sur l’ensemble du territoire européen. Si l’ensemble de l’hémicycle a accueilli le rapport très positivement (adopté par 640 voix contre 18, avec 28 abstention), il ne constitue pas encore un acte contraignant. Cette résolution non-législative est maintenant entre les mains de la Commission européenne qui devrait rapidement actionner une procédure législative ordinaire.