Après la réalisation d’une étude d’impact, d’une enquête publique et de l’obtention d’un permis de construire, la société La Compagnie du vent a fait édifier, sur des terrains lui ayant été donnés en location, deux parcs éoliens constitués, chacun, de cinq aérogénérateurs. A la suite de la mise en service de ces éoliennes en juillet 2007, la SCI Fekra et ses associés ont saisi la juridiction judiciaire sur le fondement de la théorie des troubles anormaux du voisinage, afin d’obtenir l’enlèvement des installations litigieuses et le paiement de dommages et intérêts. Les requérants invoquaient les nuisances visuelles, esthétiques et sonores résultant de leur implantation à proximité du château de Flers, ainsi que la dépréciation de ce bien immobilier, dont elle est propriétaire.

La Cour d’appel de Montpellier a jugé dans un arrêt du 28 juillet 2015 incompétente la juridiction judiciaire pour connaître de leur demande. Les requérants ont alors formé un pourvoi en cassation considérant que si l’action portée devant le juge judiciaire, aux fins d’obtenir l’enlèvement d’une éolienne régulièrement autorisée et implantée sur une propriété privée ou sur le domaine public, relève en principe de la compétence du juge administratif, le juge judiciaire reste néanmoins compétent pour connaître des demandes tendant à la cessation des nuisances liées à un tel engin, ces derniers n’ayant pas le caractère d’un ouvrage public.

Dès lors, la question portée devant la Cour de cassation était de savoir si le juge judiciaire pouvait être compétent s’agissant des demandes de démontage et d’enlèvement d’éoliennes en raison de nuisances visuelles, esthétiques ou sonores.

La Cour de cassation a dans un premier temps rappelé que l’article L.553-1 du Code de l’environnement donnait compétence au juge judiciaire pour se prononcer tant sur les dommages-intérêts à allouer aux tiers lésés par le voisinage d’une telle installation classée, que sur les mesures propres à faire cesser le préjudice que cette installation pourrait causer dans l’avenir, à condition que ces mesures ne contreviennent pas aux prescriptions édictées par l’administration en vertu des pouvoirs de police spéciale qu’elle détient.

Elle a dans un deuxième temps rappelé que le principe de la séparation des autorités administratives et judiciaires s’opposait, dès lors que le juge judiciaire substituait sa propre appréciation à celle que l’autorité administrative a portée sur les dangers ou inconvénients que peuvent présenter ces installations.

Enfin, la Cour va donc finir par rejeter le pourvoi et confirmer l’arrêt de la Cour d’appel, considérant que « la demande tendant à obtenir l’enlèvement des éoliennes litigieuses, au motif que leur implantation et leur fonctionnement seraient à l’origine d’un préjudice visuel et esthétique et de nuisances sonores, impliquait une immixtion du juge judiciaire dans l’exercice de cette police administrative spéciale et qu’elle a, en conséquence, relevé d’office, en application de l’article 92 du code de procédure civile, l’incompétence de la juridiction judiciaire pour en connaître ».

La Cour de cassation vient réaffirmer la compétence du juge administratif concernant les demandes de démontage et d’enlèvement d’éoliennes en raison de nuisances visuelles, esthétiques ou sonores.