À titre liminaire, il convient de rappeler que l’employeur est tenu a l’obligation d’évaluer régulièrement les risques professionnels et facteurs de pénibilité auxquels sont exposés ses salariés et les situations particulières de certains d’entre eux.

Cette évaluation est essentielle, car de ses résultats dépendront notamment les modalités de traçabilité et de surveillance médicale renforcée des salariés. Le suivi individuel d’exposition aux produits chimiques dangereux est une obligation réglementaire destinée à retracer l'historique de l'exposition des travailleurs.

La fabrication d’ouvrages métalliques, dans le secteur de la métallerie industrielle, exige la manipulation de divers produits chimiques. Par ailleurs, des fumées d’oxydes métalliques, émises par des alliages métalliques liquides, peuvent également être présentes lors des opérations de soudage.

En effet, le contact avec de telles substances chimiques est susceptible de provoquer des maladies pouvant apparaître des dizaines d’années après leur manipulation pendant le travail. Ainsi, il est rare d’être confronté immédiatement, en entreprise, aux conséquences de ces expositions.

Du fait du nombre d’années écoulées entre le moment où apparaît par exemple un cancer et celui de l’exposition au risque, cette traçabilité des expositions permet de faciliter le lien entre l’exposition à un risque professionnel et l’apparition de la maladie : cela permet la reconnaissance du caractère professionnel et par la suite, ouvre droit à une réparation du préjudice subi.

La mise en place de la traçabilité des expositions professionnelles permet aussi, au travers d’un suivi médical et toxicologique régulier, d’informer les salariés des risques liés à chaque produit ou procédé cancérogène auxquels ils peuvent être exposés et de les former aux précautions à prendre.

C’est la raison pour laquelle la règlementation en vigueur prévoit, dans de nombreux cas, une surveillance médicale renforcée. Afin que sa réalisation soit facilitée, l’employeur doit respecter l’obligation de traçabilité, en mettant en place un suivi des expositions.

L’obligation de traçabilité des expositions

Deux documents sont associés à la gestion du risque chimique pour permettre une traçabilité des expositions :
Selon l’article R 4412-40 du Code du travail, l’employeur a l’obligation de tenir une liste complète et actualisée des travailleurs exposés aux agents chimiques dangereux pour la santé. Il est tenu de préciser la nature, la durée et le degré d’exposition.
Au terme de l’article R 4412-41 du Code du travail, l’employeur a pour obligation d’établir, pour chacun de ces salariés, une fiche d’exposition des salariés (FIE). Cette fiche répond à une obligation réglementaire. Tout comme pour l’évaluation des risques professionnels, la circulaire du 24 mai 2006 précise les informations devant figurer dans la FIE :
la nature du travail effectué, c’est-à-dire le descriptif des tâches susceptibles d’être exposantes ;
les caractéristiques des produits, comprenant les agents chimiques concernés, les risques et les valeurs limites d’exposition ;
les périodes d’exposition ;
les équipements de protection collective et individuelle utilisés ;
la durée et l’importance des expositions accidentelles (dates, durée et description de l’événement ayant causé l’exposition accidentelle) ;
les autres risques ou nuisances d’origine chimique, physique ou biologique au poste de travail ;
les dates et les résultats des contrôles de l’exposition par poste de travail.

Ainsi, cette fiche permet donc à l’employeur de savoir quels sont les travailleurs exposés et à quels produits. Elle doit être mise à jour chaque année et au gré de toute modification des techniques de travail ou de nouvelles manipulations. L’autre intérêt, tout aussi important, est qu’elle est transmise au médecin du travail dans le cadre de la surveillance médicale renforcée.

La surveillance médicale renforcée
La surveillance de la santé consiste en « l’évaluation de la santé d’un travailleur en fonction de son exposition à des agents chimiques spécifiques sur le lieu de travail ».

Pour garantir l’efficacité de sa politique de prévention des risques professionnels, le chef d’entreprise a pour obligation de déterminer seul, lors de l’évaluation des risques professionnels, les salariés en Surveillance Médicale Simple (SMS) et ceux qui seront en
Surveillance Médicale Renforcée (SMR). Pour les salariés SMR, il doit précisément déterminer les effectifs qu’il aura à déclarer.
La Surveillance Médicale Renforcée a pour but d’assurer le suivi médical des salariés exposés à des risques particuliers à leur poste de travail ou qui doivent être surveillés du fait de leur situation personnelle.

Quid des travailleurs concernés obligatoirement par la SMR ? Le champ d’application de la Surveillance Médicale Renforcée est définie par l’article R 4624-18 du Code du travail, qui note ceux qui :
« Bénéficient d'une surveillance médicale renforcée :
1° Les travailleurs âgés de moins de dix-huit ans ;
2° Les femmes enceintes ;
3° Les salariés exposés :
a) A l'amiante ;
b) Aux rayonnements ionisants ;
c) Au plomb dans les conditions prévues à l’article R. 4412-160 ;
d) Au risque hyperbare ;
e) Au bruit dans les conditions prévues au 2° de l'article R. 4434-7;
f) Aux vibrations dans les conditions prévues à l'article R. 4443-2 ;
g) Aux agents biologiques des groupes 3 et 4 ;
h) Aux agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction mentionnés à l'article R. 4412-60 ;
4° Les travailleurs handicapés ».

En l’espèce, il s’agira de soumettre à une surveillance médicale renforcée les salariés exposés « aux agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction », de catégorie 1 ou 2. C’est l’article R 4412-60 du Code du travail qui donne la définition des agents concernés par cette réglementation :

« On entend par agent cancérogène, mutagène ou toxique pour la reproduction les substances ou mélanges suivants :
1° Toute substance ou mélange qui répond aux critères de classification dans la catégorie 1A ou 1B des substances ou mélanges cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction définis à l'annexe I du règlement (CE) n° 1272/2008 ;
2° Toute substance, tout mélange ou tout procédé défini comme tel par arrêté conjoint des ministres chargés du travail et de l’agriculture ».

Ainsi, la surveillance opérée par le médecin du travail concernant le risque chimique peut être découpée en trois phases correspondant aux différentes périodes de la vie professionnelle d’un salarié : avant l’affectation à l’emploi, pendant la durée de l’emploi et après la fin de l’emploi. L’ensemble de ces examens sont à la charge de l’employeur.
Nous nous intéresserons plus particulièrement aux deux dernières.

Pendant la durée de l’emploi

En dehors des visites périodiques, tous les deux ans l’employeur doit faire examiner par le médecin du travail tout travailleur exposé à des agents chimiques dangereux, qui se déclare incommodé par des travaux qu’il exécute. Il s’agit là de visites complémentaires , du fait de sa propre initiative ou celle du salarié.

Par ailleurs, l’employeur a l’obligation de procéder de façon régulière au mesurage de l’exposition des travailleurs aux agents chimiques dangereux et agents CMR présents dans l’atmosphère des lieux de travail, dont les résultats seront communiqués par le chef d’entreprise au médecin du travail et au CHSCT ( ou à défaut, aux délégués du personnel).

Après la fin de l’emploi

Lors du départ de l’établissement d’un travailleur, une attestation d’exposition aux agents chimiques dangereux- listés par l’employeur - est remplie par lui-même et le médecin du travail. Elle est remise au travailleur à son départ, quelqu’en soit le motif.

N.B. Depuis le décret 2012-135, offrant une nouvelle définition pour la surveillance médicale renforcée à partir du 1er juillet 2012

Jusqu’à présent, il s’agissait d’une liste extensive, c’était le médecin du travail qui déterminait les salariés soumis à SMR ou aidait l’employeur à le faire. Désormais, il s’agit d’une liste limitative, c’est le code du travail qui prévoit la surveillance médicale renforcée pour l’exposition au plomb, à  l’amiante, aux vibrations, dans certaines conditions décrites dans le code du travail.

D ‘autre part pour les salariés soumis à SMR, il n’y a plus d’obligation de renouveler la visite médicale au moins tous les ans ( sauf pour les rayonnements ionisants) : le médecin du travail est juge des modalités de la surveillance médicale renforcée en tenant compte des recommandations de bonnes pratiques existantes.

Cette surveillance  médicale renforcée comprend au moins un ou des examens de nature médicale selon une périodicité n’excédant pas 24 mois.