Le 2 juin dernier la Cour d'appel de Bordeaux a rendu un arrêt Mme M. c/M. et Mme P. dans lequel elle a retenu que les coassements des grenouilles présentes dans une mare étaient constitutifs d’un trouble anormal de voisinage justifiant la condamnation des propriétaires au comblement de leur mare.

Les époux P., propriétaires à Grignols en Dordogne, d’un terrain d’une superficie de plus de 15 hectares, avaient décidé de creuser une mare d’environ 20 mètres sur 20 pour 1,20 mètre de profondeur, à 10 mètres de la maison des époux M. et à moins de 4 mètres de la limite séparative. Or des grenouilles avaient naturellement élu domicile dans la mare. Le 20 février 2012, les époux M. avaient assigné leurs voisins devant le Tribunal de Grande Instance de Périgueux, afin qu’ils fassent cesser le trouble anormal de voisinage subi par la présence de batraciens dans la mare. Les demandeurs soutenaient que les grenouilles provoquaient un bruit infernal au moment de la période de reproduction, soit de mars à juillet, les empêchant de dormir les fenêtres ouvertes. Il était donc demandé au juge, entre autres problèmes de voisinage, que soit ordonné le comblement de la mare et que soit installé un enclos fermé autour de la mare dans l’attente de son comblement.

Le Tribunal de Grande Instance de Périgueux a, par un jugement du 25 mars 2014, débouté les époux M. de leurs demandes. Le juge a considéré qu’aucune pièce ne justifiait ni l’illégalité de la construction de la mare ni les nuisances sonores dont les époux M. se plaignaient et que les demandeurs n’invoquaient aucune disposition législative ou réglementaire de nature à exiger la construction d'un enclos sur le périmètre de la mare. Interjetant appel du jugement, les époux M. ont argué d’une part de l’existence d’un trouble anormal de voisinage et d’autre part, de la faute commise par leurs voisins suite à la création d’une mare à seulement quelques mètres de leur propriété.

La Cour d’appel de Bordeaux a partiellement infirmé le jugement rendu en première instance. Faisant sienne l’opinion de l'expert amiable, elle a considéré tout d’abord que l'implantation d'une mare devait faire l'objet d'une autorisation administrative et se situer à plus de 50 mètres des immeubles habités par des tiers. Pour la Cour d’appel de Bordeaux, il ressortait ensuite des pièces du dossier et des données non sérieusement contredites que la mare engendrait des inconvénients anormaux de voisinage. Elle a ainsi ordonné le comblement de la mare dans un délai de quatre mois et ce, sous astreinte de 150 euros par jour de retard. Les époux P. ont également été condamnés aux dépens de première instance et d’appel ainsi qu’à verser à leurs voisins la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile. En revanche, la décision du premier juge a été confirmée en ce qu'il n'y avait pas lieu d'imposer la construction d'un enclos temporaire sur le périmètre de la mare, dès lors que les appelants ne justifiaient pas, quelle disposition législative ou réglementaire ils invoquaient à l'appui de leurs prétentions sur ce point.

Les époux P. ont décidé de se pourvoir en cassation.

Ainsi, les bruits provoqués par un animal sauvage, également appelé animal non domestique, peuvent être à l’origine d’un trouble anormal de voisinage et ce que cet animal ait été introduit volontairement ou non sur une propriété.