Les arrêts forcés de certains réacteurs nucléaires poussent EDF à revoir à la baisse ses ambitions. Mercredi soir, le groupe public a indiqué que son objectif de production nucléaire pour cette année serait de 380-390 térawattheures (TWh), alors qu'il avait déjà rabaissé sa cible fin juillet de 3 %, à 395 à 400 TWh. Conséquence : il a annoncé une réduction de son objectif d'excédent brut d'exploitation (Ebitda) pour 2016 « à 16,3-16,6 milliards d'euros contre 16,3-16,8 milliards précédemment ».

L'explication trouve son origine dans les « irrégularités » des dossiers de fabrication de l'usine Areva du Creusot. Dans la foulée de la découverte de falsifications de documents sur des éléments de réacteurs produits sur le site bourguignon, en avril dernier, l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a demandé à EDF de mener des investigations sur les générateurs de vapeur équipant 18 de ses réacteurs nucléaires.

L'ASN veut s'assurer qu'aucune anomalie similaire à celle détectée sur l'EPR de Flamanville ne se retrouve sur d'autres réacteurs. Mais ces contrôles vont « conduire notamment à la prolongation de certains arrêts pour rechargement, en particulier des réacteurs 1 et 3 de Tricastin », dans la Drôme, a expliqué mercredi EDF.

Début septembre, Philippe Sasseigne, directeur du parc en exploitation d'EDF, indiquait que « 8 tranches ont été contrôlées et ont eu le feu vert de l'ASN. Cinq autres sont à l'arrêt et poursuivent les contrôles, et il en restera cinq à faire entre la fin 2016 et le début 2017 ».

A Gravelines (Nord), le réacteur numéro 5, à l'arrêt depuis avril pour sa visite décennale, ne devrait pas redémarrer avant la fin mars 2017, le temps de vérifier les nouveaux générateurs de vapeur fournis par Areva. A Fessenheim (Bas-Rhin), la date de redémarrage du réacteur numéro deux a été repoussée elle aussi à fin mars 2017.

Au-delà des suites du dossier du Creusot, EDF doit aussi gérer la remise en état du réacteur numéro deux de Paluel (Seine-Maritime), mis à l'arrêt en mai 2015 pour sa troisième visite décennale. Les problèmes se sont enchaînés, jusqu'à la chute d'un générateur de vapeur de près de 500 tonnes dans le bâtiment du réacteur.

A la centrale du Bugey (Ain), c'est un défaut d'étanchéité de l'enceinte de confinement du réacteur numéro 5 qui empêche son redémarrage. A l'arrêt depuis août 2015, le réacteur est jugé indisponible jusqu'à la fin février 2017. Une date « sans doute » optimiste, selon l'ASN.

Tout cela va donc peser sur la performance du parc tricolore, qui s'était redressée après un dérapage en 2012 et 2013. Au premier semestre, la production nucléaire d'EDF en France avait déjà baissé de 2,5 % par rapport au premier semestre 2015, avec un impact négatif de 161 millions d'euros sur l'Ebitda du groupe. Et l'impact dépassera la seule année 2016. Pour 2017, « compte tenu de ces contrôles et des vérifications engagées suite à l'audit mené par Areva [...], le groupe estime que la production nucléaire devrait s'établir dans une fourchette de 390-400 TWh », estime EDF.

L'annonce des réductions d'objectifs d'Ebitda et de production d'EDF a entraîné un recul du titre de l'électricien ce jeudi en Bourse. Il affichait une baisse de 0,9 % à 11h30, alors que le SBF 120 progressait de 1,4 %. Dans la matinée, le cours a même atteint un plus bas depuis le 6 juillet dernier.

Par ailleurs, l'agence de notation Standard & Poor's a abaissé la note à long terme de l'électricien français, la ramenant de « A » à « A- », estimant que les risques liés au projet de construction d'EPR anglais à Hinkley Point sont élevés.




EBITDA = Sigle anglais pour Earnings Before Interest, Taxes, Depreciation, and Amortization, l'EBITDA désigne communément les revenus d'une entreprise avant soustraction des intérêts, impôts, dotations aux amortissements et provisions sur immobilisations