Les chiffres sont vertigineux : la criminalité environnementale représente près de 190 milliards d’euros par an. Un marché juteux, et peu risqué pour les trafiquants. Elle occupe aujourd’hui le quatrième rang des activités illicites dans le monde après les stupéfiants, la contrefaçon et le trafic des êtres humains.
Interpole a fait de la criminalité environnementale sa priorité. Aujourd’hui, une quarantaine de personne pourchasse les trafiquants. Les douanes françaises ont saisi 448 kg d’ivoire brut, des chiffres exceptionnels pour l’année 2015. En 2016, ce score est déjà atteint en moins de six mois, de quoi s’interroger sur la montée de cette criminalité et sur ces conséquences sur l’environnement. Le braconnage est responsable de la mort de 30 000 éléphants en Afrique chaque année, afin de fournir les réseaux de trafiquants, souvent installés au Vietnam, où l’ivoire est d’abord travaillé avant d’alimenter le reste des marchés asiatiques, et surtout chinois.
Ce trafic que tentent de limiter les douaniers français illustre la situation dramatique de la faune sauvage en Afrique. Les rhinocéros semblent avoir connu pour leur part leur pire année en 2015, avec au moins 1 338 spécimens abattus. Quant au pangolin, il aurait perdu plus d’un million des siens en une décennie, ce qui fait de lui le mammifère le plus braconné au monde.
A l’échelle mondiale, ces activités auraient augmenté de 26 % en 2015 pour atteindre entre 91 milliards et 258 milliards de dollars selon Interpol. L’ensemble des autorités publiques savent à présent que les crimes environnementaux sont directement liés aux organisations mafieuses et alimentent les groupes terroristes. Les enjeux sont écrasants, les moyens totalement insuffisants.
La Commission européenne a présenté en février dernier un plan d’action sur cinq ans destiné à coordonner la lutte contre la criminalité environnementale. Federica Mogherini, chef de la diplomatie de l’Union, et trois commissaires européens ont joint leurs voix pour enjoindre aux vingt-huit Etats membres de se mettre en ordre de bataille pour porter cette offensive dans leur politique d’aide au développement comme dans leurs échanges commerciaux. La Commission demande aux Etats d’adapter leurs législations respectives afin notamment de punir les trafiquants d’au moins quatre ans de prison. Elle envisage également de stopper l’exportation d’objets anciens en ivoire en provenance de son territoire, de renforcer la coopération des services répressifs comme Europol ou encore de soutenir les communautés rurales vivant dans les zones où abondent les animaux sauvages afin qu’elles en tirent profit.
Les ONG Wildlife Conservation Society (société pour la conservation de la vie sauvage) et l’IFAW (Fond international pour la protection des animaux) applaudissent la mobilisation des commissaires européens. La première parle d’un « pas de géant dans la lutte contre ces trafics qui menacent la vie sauvage », la seconde se félicite de voir lancé ce plan qu’elles ont toutes deux contribué à élaborer.