Aux termes de l’article 47-2 de la Constitution, la Cour des comptes contribue par ses rapports publics à l’information des citoyens. Son rapport public annuel (RPA) en est une occasion privilégiée.Celui-ci est composé de deux tomes. Le premier expose une sélection d’observations et de recommandations de la Cour et des chambres régionales et territoriales des comptes (CRTC). Le second présente l’organisation et les missions de la Cour et des CRCT ainsi que les résultats de leur action. Voici plusieurs thématiques non-exhaustives.


I) Les certificats d’économie d’énergie sur la bonne voie

La Cour apprécie et encourage les certificats d’économie d’énergie (CEE), note un progrès, remarque que certaines recommandations n’ont pas été appliquées et en pose de nouvelles.

Selon la Cour des comptes, les certificats d’économie d’énergie constitue une démarche appréciable pour plusieurs raisons. Tout d’abord leur coût est faible pour les finances publiques car ce sont les fournisseurs d’énergies, dénommés « obligés »qui doivent inciter leurs clients à réaliser des économies d’énergie sous peine de pénalités financières. En contrepartie de cette obligation, elle considère que les moyens octroyés par les CEE sont souples pour permettre au fournisseur de parvenir à leur résultat.
Ensuite, ils constituent un outil de sensibilisation à l’égard des clients des fournisseurs d’énergie. Ensuite, le CEE permet de procéder à une estimation des économies d’énergie en amont.

Outre ces avantages, la Cour considère que ce mécanisme de certification a considérablement gagné en maturité depuis sa mise en place il y a dix ans notamment grâce au suivi des recommandations émises dans les précédents rapports. Ainsi la complexité de mise en œuvre du mécanisme a été réduite grâce au passage du mode déclaratif pour présenter une demande de CEE. Le ciblage de ces certificats a été précisé avec notamment « le principe d’une obligation distincte et spécifique en matière de précarité énergétique ».

Reste deux recommandations, non encore appliquées, que la Cour réitère. En particulier, il s'agit de « rendre obligatoire les études a posteriori auprès des obligés pour améliorer les connaissances des économies réellement obtenues » La Cour formule aussi trois nouvelles recommandations : mettre en œuvre l'obligation supplémentaire « précarité énergétique », poursuivre la simplification du dispositif et développer les procédures de contrôle a posteriori. Ce qui est rendu d'autant plus nécessaire, estime-t-elle, par le passage au régime déclaratif.

II) La maintenance des centrales nucléaires : une politique remise à niveau, des incertitudes à lever

EDF a l’ambition de réaliser un projet d’envergure dans le domaine du nucléaire afin de maintenir le parc actuel en état de répondre au besoin de la consommation française. Au travers de cet objectif, l’enjeu est également de porter la durée de vie des réacteurs au-delà de quarante ans.
La Cour des comptes met en avant le travail accompli « le coefficient de disponibilité a cessé de se dégrader et s’est maintenu au-dessus d’un plancher de 78% » avec le parc actuel notamment grâce aux investissements des dernières années ». Cependant, elle confirme également la nécessité d’une maintenance qui selon elle reste plus économique que de continuer l’activité du parc nucléaire en l’état actuel.

« une baisse de production aurait des conséquences plus importantes sur les coûts que la hausse des dépenses de maintenance".
Cependant au regard de la loi sur la transition énergétique votée en août 2015, elle enjoint EDF a modifier son programme de maintenance. En effet, la loi a modifié deux articles du code de l’énergie engendrant une fermeture de réacteur avant le terme prévu par EDF. La loi imposant un plafond de la puissance nucléaire installée en France à 63, 2 gigawatts (GW)
cette modification va donc nécessiter « une profonde révision du programme de maintenance de l’ensemble du parc nucléaire ».

Enfin la Cour enjoint EDF via une étude d’impact prévue par la loi relative à la transition énergétique à identifier les conséquences industrielles et financières à identifier les conséquences industrielles et financières de la maintenance des réacteurs nucléaires.

III) Biocarburants, des objectifs en progrès, des adaptations nécessaires.

La Cour des comptes intègre une étude sur les biocarburants dans son rapport public car ils constituent selon cette instance « le principal instrument pour atteindre l’objectif communautaire de 10% d’énergies renouvelables dans les transports en 2020. » Cependant à l’heure actuelle, les objectifs d’incorporation fixés dont difficilement atteignables.

Si la filière biodiesel se parvient se hisser à l’objectif de 7,7% escompté, la filière de l’éthanol accuse du retard sur les 7% dû à une distribution insuffisamment développée. Dans cette filière la Cour constate donc que l’objectif d’incorporation n’apparaît pas atteignable à court et moyen terme.
Pour améliorer l’incorporation des biocarburants, la Cour des comptes appelle à s’appuyer sur la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) qui vise à sanctionner le non-respect des cibles d’incorporation. Toutefois dans les recommandations émises, la haute instance financière enjoint à alléger cette taxe pour l’éthanol afin de ne pas pénaliser cette filière et à accélérer son application sur les gazoles non-routiers pour lesquels les objectifs sont atteints.

En résumé, les points à améliorer et les difficultés rencontrées sont les suivants :
- Les cibles nationales d’incorporation sont incompatibles avec les normes de qualité UE et impossibles à respecter pour l’éthanol. En outre la TGAP sanctionne de manière trop importante la non-atteinte
- Les biocarburants entraînent une surconsommation de carburant et un coût élevé par rapport à un carburant « classique ».
- Il existe une instabilité des règles communautaires et une ambition environnementale européenne qui repose moins sur les biocarburants.

IV) La gestion des déchets encore perfectible

A titre liminaire, il convient de préciser que la gestion des déchets constitue un pôle économique important puisque selon le RPA de la Cour rendu en 2013, ce secteur mobilise plus de 10 milliards d’euros par an. Il n’est donc pas surprenant que la Cour consacre une thématique de son RPA paru le 10 février 2016 sur ce secteur.
Dans un premier temps, la Cour des Comptes constate une hausse importante des taux de collecte et de traitement des déchets. « Par exemple, la filière la plus ancienne, celle des emballages ménagers a vu les quantités collectées et triées passer de 14 à 50 kg par habitant et par an entre 1992 et 2013. »

La Haute instance financière limite immédiatement ces propos en soulignant que les résultats sont disparates selon les filières. Par exemple, dans le domaine des DEEE (déchets d’équipements électriques et électroniques), le taux de collecte reste inférieur ou égal à 40% alors que le taux atteint 90% sur les pneumatiques et dépasse 60% sur les médicaments et emballages.

Elle apporte plusieurs explications à ces résultats variables selon les filières. Tout d’abord, les objectifs nationaux sont plus élevés que ceux à l’échelle européenne. Par conséquent, il conviendrait peut-être de s’aligner sur les objectifs fixés au niveau européen qui sont eux respectés voire dépassés. En outre et ce second facteur est peut-être le plus important, l’Etat n’a jamais, à ce jour, sanctionné un éco-organisme n’ayant pas rempli ses obligations.
Enfin, dernier point, les éco-organismes ont un rôle qui peut parfois suggérer celui de gestionnaire de fonds : ils ont tendance à constituer des provisions dont le montant cumulé est trop important voir non justifié au regard de leurs dépenses.

Pour améliorer le processus de gestion des déchets, la Cour de Comptes appelle également à une meilleure maîtrise des coûts pour la collecte et le tri : les centres de tri sont trop nombreux et leurs performances sont insuffisantes. Ainsi « en 2013, la France comptait 253 centres de tri pour 63, 4 millions d’habitants (1 centre de tri pour de 250 000 habitants) alors que l’Allemagne en compte 80 pour 81,9 millions soit 1 centre de tri pour 1,02 million d’habitants). La Cour est donc favorable à un rapprochement de certains éco-organismes comme Eco-emballages et Ecofolio ainsi qu’à une réduction et à une modernisation des centres de tri.