Les équipements individuels de combustion de bois, que sont les cheminées ou encore les poêles et chaudières à bois, font de plus en plus d’adeptes. En effet, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) a publié en juillet 2013 une enquête dans laquelle il s’avérait que 7,4 millions de foyers se chauffait au bois à cette date, contre 5,9 millions en 1999. Le chauffage au bois coûtant moins cher que celui au gaz, beaucoup de personnes ont ainsi décidé de favoriser ce moyen énergétique au détriment du second.

Néanmoins, il est également reconnu que le chauffage au bois est source d’émission de polluants. Des particules fines sont émises par ce moyen de combustion et se retrouvent d’autant plus nombreuses en cas de mauvais contrôle de la combustion ou en cas d’utilisation de bois non appropriés, tels que du bois mouillé ou du bois peint. C’est pour cette raison qu’il a été décidé d’encadrer juridiquement l’utilisation de ces équipements individuels de combustion, afin de poursuivre un objectif d’amélioration de la qualité de l’air ambiant et de l’atmosphère dans la région parisienne. Mais le gouvernement, par l’intermédiaire du ministère de l’Ecologie, a toutefois souhaité ne pas faire de mesure punitive en demandant qu’un arrêté inter-préfectoral soit édicté afin de supprimer l’interdiction des feux de cheminée en Ile-de-France.

C’est ainsi que le tribunal administratif de Paris a été saisi d’une requête demandant l’annulation de cet acte administratif.


• Le contexte


Le plan de protection de l’atmosphère (PPA) pour la région Ile-de-France, prévu par un arrêté inter-préfectoral du 25 mars 2013, établit un objectif de limitation des émissions de particules imputables aux équipements individuels de combustion de bois, que sont les cheminées ou encore les poêles à bois. Une interdiction totale de l’utilisation de foyers ouverts a ainsi été prévue, aussi bien en pour l’utilisation en tant que chauffage d’appoint ou en tant que flambée d’agrément, dans 435 communes de la régions, à partir du 1er janvier 2015.

Cependant, Ségolène Royal, ministre en charge de l’Ecologie, a souhaité que ces dispositions soient abrogées par les préfets, en raison des difficultés liées à la mise en place de cette mesure. Dans une lettre adressée aux préfets d’Ile-de-France en date du 15 décembre 2014, elle estimait que ceci n’était pas adapté aux actions de lutte contre la pollution atmosphérique dans cette région et que cela donnait une image négative notamment en ce qui concerne la volonté des pouvoirs publics à développer la biomasse, énergie renouvelable.

C’est ainsi qu’un arrêté inter-préfectoral du 21 janvier 2015 modifie les dispositions du PPA concernant la combustion du bois. Les feux de cheminée ont été à nouveau autorisés pour le chauffage d’appoint et les flambées d’agrément. Toutefois, cet acte administratif n’a pas fait l’objet d’un accueil chaleureux de la part de tout le monde : une association de protection de l’environnement a ainsi contesté sa légalité devant le tribunal administratif de Paris.


• Le jugement


L’association Ecologie Sans Frontière a décidé, le 3 mars 2015, de saisir le tribunal administratif de Paris afin de solliciter l’annulation de l’arrêté du 21 janvier 2015 modifiant l’arrêté du 25 mars 2013 relatif au PPA. Ce texte supprimait les mesures d’encadrement et d’utilisation des équipements individuels de combustions antérieures et l’association soutenait qu’il était alors illégal en raison d’une composition irrégulière des conseils départementaux de l’environnement et des risques sanitaires (CODERST) de l’Essonne et des Yvelines, pour modifier le PPA. Estimant par ailleurs que la combustion de bois présente des risques pour la santé publique, en raison notamment des particules émises, elle soutient également que l’arrêté est entaché d’erreur manifeste d’appréciation, ainsi que d’erreur de droit du fait de leur inadéquation avec le PPA d’Ile-de-France.

Le tribunal donne foi à la demande de l’association et décide donc d’annuler l’arrêté du 21 janvier 2015 aux motifs que l’autorité préfectorale ne saurait prendre des mesures incompatibles avec les objectifs du PPA et les mesures permettant expressément de les atteindre, même dans le cadre de son obligation de moyen concernant les mesures à prendre pour sa mise en œuvre. Il a estimé que la suppression de mesures réglementaires prévues initialement par l’arrêté du 25 mars 2013, ainsi que l’autorisation d’utiliser des foyers ouverts pour le chauffage d’appoint ou la flambée d’agrément, étaient contraires aux mesures du PPA permettant de mettre en place les objectifs de lutte contre la pollution atmosphérique en région parisienne. Le tribunal estime ainsi dans son huitième considérant que « les mesures prévues par l’arrêté attaqué (…) sont ainsi contraire aux mesures prévues par le plan de prévention de l’atmosphère ».


Pour être régulières, il aurait fallu qu’une évolution préalable du PPA ait été prise en amont, dans les formes requises par le droit, comme il est précisé par l’instance parisienne au même considérant : « et ne pouvaient par la suite être prises sans évolution préalable dudit plan, dans les formes requises ». L’Etat est donc condamné, l’arrêté est annulé et l’interdiction des feux de cheminée pour les 435 communes visées par le texte initial est rétablie.



Sources :

- GUYARD Gaëlle, « L’interdiction des feux de cheminée en Ile-de-France rétablie », Code permanent Environnement et nuisances, 12 août 2015
- MOUCHON Frédérique, « Interdiction des feux de cheminée : Ségolène Royal désavouée », Le Parisien, 8 juillet 2015, www.leparisien.fr
- VAN EECKHOUT Laetitia, « Pourquoi Ségolène Royal veut revenir sur l’interdiction des feux de cheminée en Ile-de-France », Le Monde, 9 décembre 2014, www.lemonde.fr