Les deux plus gros pollueurs de la planète font un pas de plus en faveur du climat.
Les présidents chinois et américain, réunis à Washington, ont annoncés dans la journée du vendredi 25 septembre, une série de mesures permettant d’atteindre leurs objectifs de réduction d’émissions de gaz à effet de serre.
A un peu plus de deux mois de la COP21, qui réunira à Paris 195 pays pour négocier un accord mondial visant à limiter le réchauffement climatique à 2 degrés, ces annonces envoient un signal positif. "C'est une très bonne nouvelle, notamment en vue de la COP, mais cela fait déjà plusieurs mois que la Chine donne des gages sur le climat, c'est la suite logique de leurs précédentes annonces", réagit l'entourage de François Hollande.

Lors d’une visite datant de novembre 2014 du Président américain à Pékin , la Chine s’était engagée à atteindre un pic de ses émissions de CO2 en 2030 ou avant, tandis que les Etats-Unis avaient de leur côté promis d’avoir réduit en 2025 leurs rejets carbonés de 26 % à 28 % par rapport aux niveaux de 2005.
Par leurs annonces de vendredi, en discussion depuis le mois d’avril, les deux premières puissances de la planète devaient détailler les moyens mis en oeuvre afin de tenir ces objectifs. «  On voit les deux pays préciser les pas qu’ils franchiront et le faire de manière transparente  », s’est félicité un haut responsable de l’administration Obama auprès du Wall Street Journal.


• Quelles mesures la Chine veut-elle prendre ?

La Chine devait notamment dévoiler son ambition de lancer un marché d’échange de crédits carbone à l’horizon 2017, une mesure qui nécessitera également l’adoption d’un plafond chiffré de ses émissions de gaz à effet de serre.
La Chine devrait également, pour la première fois, s’engager à participer à un fonds de soutien aux pays les plus pauvres dans la lutte contre le changement climatique, une tâche que Pékin rejetait auparavant sur les épaules des pays riches occidentaux, évoquant leur responsabilité historique.
Les officiels chinois devaient prendre un « engagement financier très substantiel ». De leur côté, les Etats-Unis se sont déjà engagés à verser trois milliards de dollars (2,7 milliards d’euros) au Fonds vert pour le climat de l’Organisation des Nations unies.



• Comment Pékin entend-il limiter les émissions de gaz à effet de serre ?

La Chine observe de longue date le fonctionnement des marchés carbone, notamment aux Etats-Unis et en Europe, qui s’est dotée d’un système européen d’échange de quotas d’émission en 2005.
Le mécanisme consiste à fixer une limite chiffrée d’émissions de gaz à effet de serre aux entreprises et à leur attribuer des crédits, sorte de droits à polluer, qu’elles peuvent ensuite s’échanger sur un marché.
En 2012, le gouvernement central avait déjà exigé de sept villes et provinces parmi les plus dynamiques du pays, dont Pékin, Shanghaï, Chongqing ainsi que le Guangdong et le Hubei, de lancer leurs propres marchés et il était depuis clair qu’il s’agissait, en mettant ces expériences en concurrence, de s’essayer à ces mécanismes avant d’adopter un plan à l’échelle nationale.
« Ces marchés se sont révélés un succès dans la mesure où ils ont fourni une perspective d’apprentissage », juge Jeff Huang, directeur pour la Chine d’Intercontinental Exchange, structure qui gère plusieurs marchés boursiers et carbone aux Etats-Unis et qui a conseillé des villes et provinces chinoises dans cet effort.
Selon M. Huang, la puissante Commission nationale pour le développement et la réforme, grand ministère de l’industrie et de la planification, ne devrait pas retenir un modèle parmi les sept en particulier, mais plutôt faire la synthèse de ce qui a fonctionné.

• Quelles seront les entreprises concernées par les mesures ?

Les industries les plus polluantes devraient être concernées par ce nouveau marché, notamment la métallurgie, la cimenterie, la papeterie et la production d’électricité au charbon, qui couvre encore les deux tiers des besoins chinois en énergie.
Pour Ling Xiong, professeur au centre de recherche sur le changement climatique, l’énergie et l’environnement de Wuhan (centre), la Chine a conclu qu’il n’y avait pas de méthode plus efficace que l’incitation du marché pour respecter ses engagements en matière de lutte contre le changement climatique.
« L’influence des marchés carbone est restreinte lorsqu’elle se limite aux sept villes et provinces pilotes, mais l’impact devrait être énorme lorsqu’ils seront généralisés à l’échelle nationale », juge M. Ling.


• Les engagements chinois sont-ils de nature à changer les discussions au niveau mondial ?

Reste dans tous les cas à savoir si cet engagement de la Chine va donner un coup d’accélérateur à des négociations climatiques chaotiques. Plusieurs acteurs-clés des discussions comme l’Inde - troisième pollueur mondial - ou le Brésil, n’ont toujours pas dévoilé leurs intentions. "Avec ces engagements, la Chine et les Etats-Unis, les deux premiers pollueurs mondiaux, ont pris leurs responsabilités, analyse Célia Gautier, spécialiste des enjeux climatiques au sein du Réseau action climat (RAC). Cela crée un contexte plus favorable pour essayer de parvenir à un accord contraignant à Paris. Mais il ne faut pas croire que cela va tout changer. L'Inde par exemple veut toujours sortir de la pauvreté en se développant...". Du côté de l'Elysée, même prudence. "La Russie et l'Inde sont très discrets, on ne sait pas trop ce qu'ils vont faire, appuie l'entourage du président français. Le Japon non plus ne nous aide pas beaucoup. On va voir si ces engagements font bouger les lignes."
En effet , seuls 74 pays sur 195 ont remis à ce jour leur contribution nationale, c’est-à-dire leurs engagements de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Et l’effort n’est pas suffisant  : l’ensemble des contributions ne permet pas de rester sous le seuil de 2 °C de réchauffement de la planète, limite au-delà de laquelle les risques de dérèglement climatiques sont considérables.

Les négociateurs, qui se retrouveront à Bonn, du 19 au 23 octobre, lors d’une ultime session de discussions avant la conférence de Paris, en décembre, doivent tenter de débloquer d’autres points clés.
La question de la nature juridique de l’accord, celle du financement de la lutte contre le changement climatique et de l’adaptation continuent d’opposer pays riches et pays pauvres.


Sources :
- http://www.challenges.fr/challenges-soir/20150925.CHA9818/changement-climatique-le-virage-chinois-est-une-bonne-nouvelle.html
- http://www.lemonde.fr/paris-climat-2015/article/2015/09/25/climat-la-chine-et-les-etats-unis-aux-avant-postes_4771427_4527432.html
- http://www.lexpress.fr/actualite/societe/environnement/climat-la-chine-et-les-etats-unis-s-engagent-sur-les-gaz-a-effet-de-serre_1620927.html