CONDAMNATION DE LA SOCIÉTÉ TOTAL POUR NON PAIEMENT DE LA TGAP (CASS.COM. 27 MAI 2015, N°13-15.934)
Par Ngoc-My ABDUL
Correspondante Environnement
SNCF RESEAU
Posté le: 22/06/2015 11:20
La taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), instituée par la loi de finances de 1999 et entrée en vigueur au 1er janvier 2000, traduit le principe « pollueur-payeur » puisqu’elle a vocation à orienter les comportements des agents économiques, et à dissuader et prévenir ceux présentant le plus de risques pour l’environnement.
Si le champ d’application de cette taxe est clairement défini à l’article 266 sexies du code des douanes, la jurisprudence ne manque pas d’y apporter certaines précisions, comme ce fut le cas dans un arrêt récemment rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 27 mai 2015 (n° de pourvoi : 13-15.934).
I. Contexte
La société Total exploitait un gisement minier d’hydrocarbure gazeux situé dans la structure géologique dénommée « Crétacé 4000 » de Lacq, dans les Pyrénées Atlantiques. Un arrêté préfectoral du 27 février 2006 l’autorisait à y effectuer des injections d’effluents liquides.
Par deux autres contrats, la société Total autorisait deux autres sociétés à injecter leurs propres effluents dans cette même structure, moyennant rémunération. Par un procès verbal du 20 janvier 2008, l’administration des douanes notifia à la société Total l’absence d’acquittement de la TGAP entre 2003 et 2006 sur divers tonnages de déchets industriels, puis lui adressa un avis de mise en recouvrement (AMR) le 13 février 2008. La société Total, contestant cette AMR, assigna alors l’administration des douanes an annulation dudit AMR.
II. Un contentieux relatif à la nature des produits enfouis dans le sous-sol
La société Total estimait ne pas être redevable de la taxe générale sur les activités polluantes pour diverses raisons : la première, tenant à l’exclusion de son activité de la nomenclature des installations classées protection de l’environnement (ICPE), et la seconde tenant à la qualification de ses injections d’effluents liquides.
En effet, la société Total justifiait l’absence de paiement de la TGAP par le fait que son activité d’injection d’effluent n’entrait pas dans la nomenclature des ICPE en vertu de l’article 266 sexies du Code des douanes. Par ailleurs, elle arguait du fait que l’arrêté préfectoral délivré n’était pas constitutif d’une autorisation d’exploitation d’une installation classée de stockage des déchets soumettant la société à la législation des ICPE.
Or, la cour d’appel de Paris, au regard de l’article 266 sexies I-1 du code des douanes, relève que le paiement de la TGAP « n’est pas conditionné par l’inscription de l’installation dans la nomenclature des installations classées ». L’administration des douanes peut donc imposer l’installation à la taxe litigieuse si elle l’estime justifié. De même, l’activité d’injection d’effluents dans une structure géologique permet de qualifier une installation d’élimination des déchets soumis à la taxe litigieuse, peu important les autorisations administratives délivrées.
Autre argument de la société Total à l’encontre de l’administration des douanes : l’eau issue d’activité extractive ou minière et les effluents industriels liquides et gazeux ne sont pas constitutifs de déchets industriels banals (DIB) soumis à la taxe litigieuse. Un déchet industriel banal est un déchet ni inerte, ni dangereux, généré par les entreprises dont le traitement peut éventuellement être réalisé dans les mêmes installations que les ordures ménagères.
Or, la cour d’appel retient que la définition des déchets industriels assimilés aux déchets ménagers n’impose pas « que ces déchets soient effectivement collectés et traités ou stockés dans une filière de ramassage et de stockage ou traitement des déchets des ménages ». En somme, il importe peu que ces déchets soient traités communément ou séparément des déchets des ménages pour être qualifiés de déchets industriels banals soumis à la taxe générale sur les activités polluantes. En l’espèce, le fait que les effluents réinjectés dans la structure géologique de la société Total ne soient pas « effectivement collectés et traités dans les conditions du service public de collecte des déchets des ménages » ne remettait pas en cause leur qualification de déchets industriels banals relevant de la qualification de déchets assimilés assujettis à la TGAP.
C’est dans ces circonstances que la chambre commerciale de la Cour de cassation a rejeté le pourvoi introduit par la société Total, et condamné cette dernière à verser la TGAP pour ses activités des années 2003 à 2006.
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Sources :
http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000030655746&fastReqId=1965870901&fastPos=1
http://www.actu-environnement.com/ae/news/lacq-total-tgap-effluents-industriels-cretace-4000-dechets-24688.php4
http://www.actu-environnement.com/ae/news/amendement-david-habib-budget-2012-14588.php4